Cette offensive, au cours de laquelle un médecin militaire français a été tué, a été lancée aux confins du Gourma malien (centre-est), sanctuaire pour plusieurs groupes armés, mobilisant quelque 700 militaires français et 150 maliens.
Après un an et demi de lutte antijihadiste dans le Liptako voisin (nord-est), Barkhane amorce l’extension de ses efforts dans cette nouvelle zone, à cheval sur trois régions maliennes (Gao, Tombouctou et Mopti) et frontalière du Burkina. Les Français y ont récemment fait sortir de terre une base avancée, en périphérie de la ville de Gossi, à 150 km à l’ouest de Gao (nord).
A partir de cette nouvelle emprise, des dizaines de blindés français ont convergé fin mars vers le camp de l’armée malienne à Hombori (80 km au nord de la frontière burkinabè). Ce camp, cerné d’imposants massifs rocheux, a servi de point de départ pour attaquer les sanctuaires jihadistes plus au sud, selon des journalistes de l’AFP sur place.
Côté Burkina, “des forces armées burkinabè étaient déployées pour interdire toute tentative d’exfiltration de l’ennemi vers le sud de la zone”, d’après le porte-parole de l’état-major français, le colonel Patrik Steiger.
L’opération, étalée sur une dizaine de jours, a débuté dans la forêt de Foulsaré, à la frontière, réputée servir de refuge au groupe jihadiste Ansaroul Islam. Il est accusé de semer la terreur dans le nord du Burkina, théâtre d’attaques régulières depuis 2015 que les forces de sécurité semblent incapables d’enrayer.
Après des frappes aériennes et l’envoi de commandos au sol, Français et Maliens ont mis au jour “une véritable plateforme logistique” et saisi des équipements complets avec armes et munitions, roquettes, et du matériel de confection d’engins explosifs artisanaux (IED).
Les jihadistes sont en revanche parvenus à s’évanouir dans la nature. “L’ennemi a déserté la zone à l’arrivée de Barkhane et n’a pas cherché le combat”, d’après le colonel Steiger.
Plan de sécurisation du centre
Cette offensive coïncide avec la relance par le gouvernement malien de son Plan de sécurisation intégrée des régions du Centre (PSIRC), lancé en 2017 pour tenter d’enrayer l’explosion des violences dans cette zone, souvent à dimension intercommunautaire.
Le chef de l’Etat, Ibrahim Boubacar Keïta, a ainsi présidé mardi une réunion extraordinaire du Conseil supérieur de la Défense nationale portant sur le centre du pays, où les violences depuis le début de l’année ont fait 15.000 déplacés dans la seule région de Mopti, selon des organisations humanitaires.
Bien qu’ils soient restés invisibles pendant l’opération, les jihadistes ont revendiqué l’explosion d’une mine qui a coûté la vie le 2 avril au médecin militaire Marc Laycuras, 30 ans, touché au passage de son véhicule blindé.
L’opération s’est ensuite déplacée dans la forêt de Serma, sanctuaire de la katiba éponyme, soupçonnée d’implication dans des attaques dans la région et les pays voisins, particulièrement au Burkina Faso.
Le 7 avril, “une opération aéroterrestre” a visé notamment “un camp d’entraînement de la katiba Serma au sud de la ville de Boni”, selon l’état-major.
Plus d’une trentaine de jihadistes ont été “mis hors de combat” (tués ou capturés) par les forces armées, qui ont également saisi des véhicules, dont “une dizaine de motos” et de l’armement.
L’armée française a déjà lancé des opérations ponctuelles dans ces forêts proches de la frontière burkinabè, très denses et difficiles d’accès.
En janvier, Barkhane a mené une série d’opérations avec les forces maliennes dans la forêt de Serma, aboutissant à la neutralisation d’une vingtaine de jihadistes.
En avril 2017, l’armée française s’était par ailleurs déployée en forêt de Foulsaré avec les forces maliennes et burkinabè. Un soldat français y avait été tué.
Désormais, Barkhane compte s’installer durablement dans cette zone. “Avant, on a mis les pieds dans la région et on est ressortis. Là, on plante le drapeau et on y reste”, résume un haut gradé français.