Le putsch qui, en janvier, a renversé le président burkinabè, Marc-Roch Kaboré, a certes fragilisé les relations entre Paris et Ouagadougou. Pour autant, il n’a pas remis en cause la coopération militaire entre les deux pays, le Burkina Faso abritant le groupement français de forces spéciales « Sabre ».
Cependant, et comme cela a été le cas précédemment au Mali [et en Centrafrique], et alors que les groupes jihadistes y renforcent leur influence, un sentiment anti-français semble se répandre au Burkina Faso, comme en témoignent les difficultés rencontrées en novembre par un convoi logistique de Barkhane devant traverser le pays pour rejoindre Gao… ou comme encore les campagnes d’infox sur les réseaux sociaux.
La semaine passée, la coalition « Faso Lagam Taaba Zaaka » a manifesté à Ouagadougou pour appeler le nouveau pouvoir en place, incarné le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, à rejeter les accords avec la France pour se tourner vers la Russie, jugée mieux placée pour combattre les organisations terroristes.
« Les autorités doivent diversifier leur partenaires dans cette lutte contre le terrorisme en allant vers les pays comme la Russie, la Chine, la Corée du nord qui sont des puissances militaires », a expliqué Ismaël Nana, le secrétaire général de cette coalition. Et d’insister : « Nous contestons l’installation de bases de forces étrangères qui ne méritent plus notre confiance. Nous demandons l’annulation des accords coloniaux en matière de défense ».
La Russie est-elle à la manoeuvre, comme au Mali? Ce n’est pas exclu, d’autant plus que le putsch de janvier avait été salué par Evguéni Prigojine, un proche du Kremlin qui est aussi l’un des principaux actionnaire du groupe paramilitaire russe Wagner…
« Tous ces soi-disant coups d’État sont dus au fait que l’Occident essaie de gouverner les États et de supprimer leurs priorités nationales, d’imposer des valeurs étrangères aux Africains, parfois en se moquant clairement d’eux », avait ainsi fait valoir celui que l’on surnomme le « cusinier de Poutine ».
En outre, et d’après des informations du journal en ligne The Daily Beast, l’auteur du coup d’État aurait demandé au président Roch Marc Christian Kaboré de « faire intervenir le groupe Wagner » afin d’aider les forces burkinabè. Une idée « rapidement rejetée », celui qui allait être renversé quelques jours plus tard ayant rappelé que les « gouvernements européens venaient de condamner le déploiement de ces paramilitaires russes au Mali ».
Quoi qu’il en soit, nommé à la tête du gouvernement burkinabè il y a un mois, Albert Ouédraogo a estimé, ce 4 avril, que son pays devait « diversifier » ses partenariats militaires, sans donner plus de précisions.
« En ce qui concerne la coopération militaire avec d’autres États notamment, l’option est désormais de diversifier les partenariats, afin d’optimiser les atouts spécifiques de chaque partenaire », a en effet déclaré M. Ouédraogo. « En tout état de cause, ces partenariats seront fondés sur le respect de notre indépendance territoriale et la sincérité », a-t-il ajouté. Des propos qui font écho à ceux tenus par Choguel Kokalla Maïga, le chef du gouverment de transition malien, en septembre 2021.
« Face au péril terroriste, nous n’avons d’autre choix que de sauvegarder l’intégrité territoriale, en libérant les zones occupées par les groupes terroristes, en y ramenant la sécurité et en assurant la continuité du service public et le développement local », a encore ajouté le Premier ministre burkinabè, qui a également affirmé avoir « engagé d’importants projets d’équipements qui vont permettre de renforcer les moyens matériels et logistiques des forces de sécurité, construire de nouvelles infrastructures de sécurité et apporter un appui au déploiement de l’administration publique ».