L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS)prépare activement sa septième Conférence des Parties (COP) prévue à New Delhi en Inde en Novembre 2016. La COP est l’organe exécutif de la Convention Cadre pour la Lutte Antitabac (CCLAT) de l’OMS. Elle regroupe des représentants de chacun des États ayant ratifié le traité. La COP7 promet d’être houleuse. Un rapport très critique contre l’OMS vient de paraitre. Un rapport qui risque de faner la conception traditionnelle de la lutte contre le tabagisme en démontant quelques idées reçues, fortement répandues.
PIEDS DANS LE PLAT
La CCLAT a été adoptée en mai 2003 et est entrée en vigueur en février 2005. Elle vise à établir une réglementation mondiale antitabac. Si l’on en juge par certains des thèmes qui y seront abordés à la COP7 comme l’exclusion du tabac des accords commerciaux internationaux ; le paquet et la cigarette neutre (sans signe distinctif) ou encore l’augmentation des taxes sur le tabac à hauteur de 75% du prix de vente au détail, elle encourage à arrêter de fumer.
A la veille de cette importante réunion, un rapport inattendu tient le haut du pavé journalistique. L’auteur du rapport, Dr Gary Johns, un ancien ministre australien, a choisi le 22 septembre, date de clôture des candidatures pour l’élection du prochain Directeur général de l’OMS pour le publier. Selon lui, la prochaine convention internationale de l’OMS sur le tabac n’a pas bénéficié de la transparence et du dialogue requis qui sous-tendent les valeurs des Nations Unies. Cela fait de la CCLAT un club fermé qui utilise l’exclusion pour empêcher le débat. Pour le Dr Johns, ceci est l’une des nombreuses questions auxquelles le prochain Directeur général de l’OMS doit apporter d’urgence des réponses pour la survie de l’organisation. Il recommande que ladite Convention ouvre ses portes à tous les acteurs, et à de nouvelles idées particulièrement pour les nouveaux produits vaporisant le tabac et considérés maintenant comme beaucoup moins nocifs que les cigarettes conventionnelles afin de réduire le nombre de décès causés par le tabac.
Dr Johns écrit notamment: « Je sais par mon expérience, en tant qu’ancien ministre travailliste australien, que les politiques les plus efficaces sont celles qui intègrent un large éventail de parties prenantes et de points de vue, même si vous êtes en désaccord. Ces réunions devraient être organisées de façon transparente et en présence du public..». Or, pour Johns, la Conférence de New Delhi, refuse la participation d’acteurs majeurs du secteur, d’autres parties prenantes ou des médias pertinents, pour discuter des nouveaux développements de l’industrie et qui pourraient sauver des vies dans le monde entier.
LA COP 21 : L’EXEMPLE TYPE
Il préconise de suivre l’exemple de la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques notamment (Conference of the Parties) COP 21 de Paris pendant laquelle l’Organisation des Nations Unies a accueilli les dirigeants du monde entier, des intervenants externes et le public à la Conférence de Paris sur les changements climatiques en novembre 2015, notamment 3000 journalistes accrédités lors de ladite conférence. Elle a constamment mis à jour une plateforme d’informations en ligne, fournissant des publications sur les décisions et activités de la conférence, tout en offrant une fonctionnalité de mise à jour des infos par e-mail.
La Conférence de Paris a également publié des projets de textes clés négociés à la réunion et diffusés en ligne des sessions, des débats et des conférences de presse.
Outre la COP 21, d’autres conventions de l’ONU sont ouvertes, et encouragent la libre discussion avec des experts donnant l’occasion de partager une plate-forme pour offrir les meilleures opportunités de progrès et de bénéfices.
Il n’ya pas pour cet ancien pensionnaire de l’Université de Queensland que de soutenir sa demarche en citant Mary Robinson, ancienne Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, qui déclarait à son temps: “Si seulement ceux qui ont le pouvoir … écoutaient ceux qui ont une connaissance personnelle et directe de la réalité de la situation sur le terrain et intégraient leur expérience, les résultats auraient transformé les idées du leadership et de la prise de décision». Le Dr Gary Johns déplore que la CCLAT ne fournit pas une telle fenêtre dans son processus de prise de décision avec le public, les médias, l’industrie, les services chargés de l’application de la loi et d’autres parties prenantes externes clés, ce qu’il regrette en tant que contribuable australien dont les impôts soutiennent la Convention. En ces temps où le trafic illicite du tabac est en nette progression et contribue à financer le terrorisme et le crime organisé, ce sera tout bénéfice pour une organisation de travailler avec les producteurs de tabac, les agriculteurs, les distributeurs, les associations des consommateurs pour s’assurer que les produits contrefaits, considérés plus toxiques que le véritable tabac, soient éradiqués.
Ainsi, le débat sur le tabac s’instaurera inévitablement et loyalement. Déjà, de nouveaux dispositifs qui permettant de consommer de la nicotine sans passer par le stade de la combustion du tabac émergent. Nombre de recherches ont démontré que c’est bien la combustion du tabac que cette dernière qui est cause des maladies liées au tabagisme. Ainsi, entre la cigarette classique et sa jeune sœur électronique, de nouveaux produits du tabac font leur apparition, notamment les vaporisateurs de tabac et les inhalateurs de nicotine. C’est comme si les technologies de pointe permettent sans le moindre doute au fumeur d’allier plaisir et forte réduction des risques encourus. C’est au tant de sujets à débat pouvant raffermir l’arsenal destiné à lutter contre les méfaits du tabac lorsque toutes les preuves scientifiques sont faites comme quand Michael Russel, spécialiste et pionnier américain de la lutte contre le tabagisme affirme: « Les gens fument pour la nicotine mais meurent à cause du goudron».
NICOTINE CONTRE GOUDRON
L’urgence, c’est d’envisager l’ensemble des solutions permettant aux fumeurs de prendre en main leur consommation de tabac, par tous les moyens disponibles sur le marché, notamment ceux qui peuvent résulter d’un choix de sa part, comme les cigarettes électroniques, les vaporisateurs et les inhalateurs. C’est presque ce que disait un rapport du Collège royal des médecins britanniques en rapportant que non seulement la cigarette électronique n’est pas une passerelle vers la consommation classique de tabac, mais qu’elle peut, au contraire, constituer une «porte de sortie du tabagisme».
La COP7 risque de donner lieu à une passe d’armes sur de nombreuses autres questions comme sur le paquet neutre qui signifie que les sociétés titulaires de marques régulièrement enregistrées ne seront plus autorisées à utiliser lesdites marques. Quant à la cigarette neutre elle va désigner un produit standardisé sans possibilité de le différencier d’un autre liquidant ainsi le droit de propriété intellectuelle des propriétaires des marques de cigarettes et leur droit à la liberté de commerce au mépris des dispositions internationales relatives au droit de la propriété intellectuelle. Des libres penseurs comme Dr Johns pensent qu’il ya davantage de questions importantes comme les maladies non transmissibles (MNT). Un débat ouvert peut mettre à l’ordre du jour les MNT et la régulation des produits associés : l’alcool, le sucre, le tabac en même temps. C’est peut être le prochain cap à condition que la COP7 de l’OMS soit moins draconienne et transparente à l’image de la COP21 !
La rédaction