Aujourd’hui, il y a de «nouveaux» jeunes qui émergent au Mali. Ils sont près de 50% de la population. Ils ont entre 30 et 12 ans. Ils connaissent et mettent en œuvre une mutation sociale majeure du fait qu’ils sont désormais en réseaux sociaux. Ils ne sont plus la périphérie.
Quand ils sont en connexion, ils sont un des centres du monde. Ils produisent la modernité du pays et se reconnaissent peu dans les repères anciens et dans les valeurs prônées par nos autorités sur les chaînes de télévision, les radios et dans les journaux. Ce grand écart entre nouveauté et repère ancien est très perturbant et ouvre la porte à des aventures souvent désespérées : exil, extrémisme religieux, délinquance, abus des drogues, contestation de toute expertise et autorité… Encore plus inquiétante est la montée continue en leur sein de propos «complotistes», négationnistes, homophobes et de temps en temps racistes.
Malgré leur apparente «modernité», influencés et infantilisés par certaines formes perverties de l’Islam, ils développent de plus en plus des propos sans retenue, sans filtre, comme par exemple : «celui dont le front ne touche pas le sol mérite l’enfer et ne doit avoir aucune considération de notre part». Comme si le chrétien ne mérite pas notre considération. Comme si le juif ne mérite pas notre considération. Comme si les gens de la religion traditionnelle ne méritent pas notre considération.
Le développement de ces préjugés repose sur un manque de culture et une méconnaissance totale de notre histoire. C’est également la conséquence de l’absence d’actions continues de construction d’un univers symbolique moderne commun. Pour une nouvelle dynamique du Mali post-crise, il urge de freiner la montée de cette défiance et de construire un univers symbolique commun en phase avec le monde d’aujourd’hui.
Si je suis IBK, je vais entreprendre de confronter ces jeunes avec la réalité de notre histoire, aux enjeux de mémoire et à la nécessité de comprendre leur situation. Si je suis IBK, pour atteindre cet objectif, je monterais un parcours initiatique citoyen destiné dans un premier temps aux lycéens et aux étudiants. Ce parcours initiatique partira de toutes les collectivités territoriales du pays jusqu’à Taoudenit. Taoudénit est une ville symbole de notre pays. Elle a logé le tristement célèbre bagne de Taoudénit. Plusieurs mémoires témoignent de cette partie brutale de notre histoire récente.
Je transformerais le site du bagne en un musée moderne. Le musée doit pouvoir raconter l’histoire récente du pays à travers la documentation de chaque prisonnier politique qui y a passé un séjour ou y a laissé sa vie. Très moderne, j’en ferais un site commémoratif de mémoire collective, de transmission de l’histoire et de réflexion. Très ludique et attirant pour les jeunes, je ferais de sorte que ce musée soit le cœur d’une industrie touristique nationale destinée à booster l’économie de la région de Taoudénit…
J’y encouragerais la construction d’infrastructures modernes d’accueil comme des campings modernes. Je ferais que chaque année plus de 200 000 jeunes, en lien avec leur collectivité territoriale, une fondation, l’Etat, des privés et autres partenaires, traversent tout le pays pour venir visiter le musée à Taoudenit. Ces 200 000 jeunes dépenseront en moyenne 20 000 FCFA dans la ville, soit un apport de 4 milliards par an. Je créerais une fondation destinée à piloter tout le dispositif en lien avec les mairies, les écoles, les partenaires.
Ce parcours initiatique doit donner la possibilité à chaque jeune participant, par la découverte du pays, par l’expérimentation, de développer et de renforcer ces compétences citoyennes. Il doit lui permettre, de façon concrète, de revaloriser ses liens sociaux et sa civilité, de connaître les valeurs de la République et l’amener à devenir un citoyen responsable.
Le parcours organisera une mobilité des jeunes sur l’ensemble du territoire et tissera de façon concrète un autre lien avec le pays. Enfin, c’est un potentiel économique formidable pour la région de Taoudenit. Il permettra des investissements pour la construction du musée, des campings modernes, des maisons, des hôtels, de voiries modernes et des routes. Il fera de Taoudenit une destination d’opportunité. Bien à tout le monde !!! C’est ma dernière chronique de 2018. Nous allons nous retrouver à partir du 20 janvier 2019. Bonne année 2019 ! Que de la paix pour notre pays !!!
Alioune Ifra NDIAYE
Source: Le Reporter