Les administrateurs de l’ANPE ont tenu hier, mardi 28 février, au siège de l’agence, une session extraordinaire de leur instance présidée par le président du conseil d’administration, Mamadou S. Coulibaly. Elle a été l’occasion pour le Directeur général de l’ANPE, le Pr Makan Moussa Sissoko de dresser l’état des lieux de l’opération taxi lancée par sa structure en partenariat avec certaines banques de la banque et les organisations faitières des chauffeurs. Une manière pour lui de mettre les choses au point par rapport à cette affaire qui a fait l’objet de beaucoup de polémique. Il a déclaré que l’opération avec la BRS Mali a été un succès alors que celle avec la BIM-SA a connu des revers.
Dans son exposé devant les administrateurs, le Directeur général de l’ANPE a rappelé le concept de cette l’opération taxi. A ce niveau, il a souligné que » l’état de vétusté du parc de véhicules de transport de personnes au Mali est un constat partagé par tous les acteurs du secteur du transport. Les désagréments occasionnés sont multiples tant pour les passagers que pour les professionnels du métier. Ceci est d’autant plus vrai que le nombre de chauffeurs propriétaires de leurs véhicules est faible « .
C’est convaincu de la pertinence de l’opération que l’ANPE a décidé d’appuyer le projet en partenariat avec la coopérative des chauffeurs et conducteurs de taxis du Mali (CCCTM), principale organisation de ce corps de métiers avec près de 2 000 membres. Pour sa mise en œuvre, il a été fait appel à toutes les banques qui souhaitaient y participer. La phase test a été réalisée avec la BRS-Mali, et, suite à la vitalité de celle-ci, cette banque s’est engagée à financer l’acquisition de 500 véhicules. La BIM-SA s’est s’engagée elle aussi pour le même nombre de véhicules, mais finalement elle financera pour 100. Quant à la Banque Atlantique, elle a financé 8 autobus.
Aux dires de Makan Moussa Sissoko, les négociations se poursuivent avec la BMS-SA pour l’achat de 22 autobus devant compléter le parc à 30 autobus qui seront mis à la disposition de la coopérative des chauffeurs de Sikasso.
A la date d’aujourd’hui, le parc total mis en place par l’APNE est de 544 véhicules. Initié par l’ANPE, la CCCTM et leurs partenaires, le projet a une triple dimension : sociale, environnementale et économique.
La dimension sociale est le principal objet du projet. C’est pourquoi, tous les acteurs impliqués sont décidés à garantir sa réussite et sa pérennité. Car il s’agit non seulement de permettre à des salariés taximen de créer leur micro entreprise, mais aussi de professionnaliser la corporation. Les chauffeurs ont eu droit à l’assistance de leur organisation mais aussi du cabinet conseil chargé d’assurer l’ingénierie financière et organisationnelle de l’opération. Ainsi, le chauffeur bénéficiaire, à la fin du remboursement de son prêt, a deux options : revendre sa voiture et repartir sur un nouvel achat neuf avec des charges journalières en diminution, donc un revenu croissant ou continuer sa profession avec un outil de travail payé et donc des charges nulles de remboursement. La dimension environnementale visait à renouveler le parc de taxis, donc atténuer l’émission de gaz à effet de serre, responsable des changements climatiques.
La dimension économique réside dans le caractère novateur du projet, dans la démarche de son financement et dans l’implication des acteurs. En effet, il s’agit de permettre à une couche de la population, qui évoluait jusque là en dehors du système financier et du crédit bancaire d’en bénéficier, d’accéder à une indépendance professionnelle via l’entrepreneuriat, grâce à la garantie apportée par l’ANPE, à travers un accompagnement adéquat. La crédibilité de l’opération a été prouvée d’où l’intérêt des grandes banques.
Principe du prêt et de sa sécurité
Selon le directeur général de l’ANPE, » le mécanisme financier mis en œuvre se décline suivant le principe du prêt et de sa sécurité via la bonne gestion « . En effet, la banque accorde un prêt d’une durée de 40 mois, la coopérative collecte chaque jour auprès des chauffeurs le remboursement journaliser et le reverse sur un compte » collector » de la banque. Le candidat verse à la prise en main du véhicule une caution d’entrée avancée par l’ANPE et ce, afin de garder une marge de sécurité en cas d’impayés.
Au niveau des garanties bancaires, elles sont multiples : le nantissement du véhicule au profit de la banque jusqu’au paiement à terme du crédit et des intérêts, la mutuelle de la coopérative alimentée par une caution, la mobilisation des fonds de garantie (ANPE-FARE) et l’assurance tout risquse des véhicules couvrant la durée du crédit bancaire.
En cas de constant d’impayé, la coopérative prend attache le jour même avec le chauffeur afin que ce dernier s’acquitte de sa dette. La coopérative procède elle-même à la régularisation des impayés via le compte » collector » qui débite la caution d’entrée, jusqu’à un seuil de tolérance fixé à cinq jours de retard. Au-delà de cinq jours, le véhicule peut être immobilisé jusqu’à la régularisation. La sanction peut aller jusqu’au retrait pur et simple du véhicule. En effet, explique le DG de l’ANPE, le chauffeur emprunteur doit impérativement se conformer aux règles définies dans le cadre de la coopérative, il peut être exclu du projet de renouvellement en cas d’un arrêt de paiements au-delà de la caution d’entrée de 500 000 FCFA, en cas de manquement à la régularité des entretiens dans les garages agrées et en cas d’un problème de comportement illégal ou grave.
Après une première phase test lancée en 2009 avec 30 véhicules et qui a montré sa rentabilité, la BRS Mali s’est engagée à financer 500 véhicules directement pour la coopérative avec laquelle elle a signé une convention.
L’opération avec la BRS-Mali a été une réussite
Cette opération réalisée dans les règles de l’art se déroulait normalement jusqu’aux évènements tragiques de mars 2012 et la crise qu’ils ont engendrée. Progressivement, l’opération a commencé à connaître des difficultés se traduisant par l’insuffisance des recettes journalières, le manque de pièces de rechange à cause des difficultés d’approvisionnement du concessionnaire, le manque de collaboration de la justice pour les cas des bénéficiaires défaillants et les problèmes internes à la BRS.
Afin de résoudre ces difficultés, l’ANPE et la CCCTM ont entrepris des actions avec les nouvelles autorités de la BRS, qui ont abouti à l’élaboration du plan de relance. Ce plan est bâti autour du scénario suivant : mobilisation de la TAF dont l’exonération avait été accordée par le ministère des finances, (340 millions de FCFA) mise en état des véhicules immobilisés avec le montant récupéré, mise en place d’un système efficace d’entretien maintenance, mise en place d’une gestion privée de l’ensemble de l’opération avec la signature d’un contrat avec un prestataire. « Aujourd’hui, nous demeurons convaincus de la pertinence de la relance effective de l’opération taxi BRS qui a été une vraie réussite en permettant la création de 470 emplois directs « , a affirme M. Sissoko.
Annulation des saisies pratiquées sur les comptes de l’Agence
Contrairement à l’opération avec la BRS, Makan Moussa souligne que celle avec la BIM-sa et Taxi pro a été un échec à cause de la défaillance des principaux acteurs que sont Prize auto et la BIM-sa. En effet, à la suite de longues négociations, la convention « Taxi pro » signée le 27 janvier 2010 entre la BIM-sa, Prize auto, la Coopérative et l’ANPE. » Dès le départ, nous avons relevé une défaillance notoire du concessionnaire de la BIM-sa qui n’a jamais pu assurer le minimum de service après-vente, ce qui a entraîné l’arrêt de tous les véhciules FIAT Albéa. Cet arrêt a entraîné la naissance d’un contentieux avec la BIM-sa qui a voulu faire jouer la garantie à première demande qu’elle avait réussi à nous imposer presque sept mois après la signature de la convention cadre » a relevé Makan Moussa Sissoko. Avant de rappeler un principe général de droit qui dit » nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude« .
Selon ses dires, » si, par ce principe l’ANPE est liée par cette signature, ce même principe est applicable à la BIM car la lettre ne remplit aucune des conditions de forme exigées par l’OHADA pour sa validité. Nous avons obtenu auprès des tribunaux l’annulation des saisies conservatoires pratiquées sur nos comptes avant le jugement définitif des tribunaux. Néanmoins, comme c’est la survie de l’opération qui est notre objectif premier, nous avons fait des propositions de sortie de crise à nos partenaires » a conclu le DG de l’ANPE.
Yousssouf CAMARA
Source: L’Indépendant