Point de monnaie unique dans la zone Cedeao dès 2020, s’accordent à dire des économistes sénégalais. Ils l’ont soutenu samedi dernier, en conférence publique dans le cadre des activités mensuelles des samedis de l’économie, organisés par l’Africaine de recherche et de coopération pour l’Appui au développement endogène (Arcade), en partenariat avec la Fondation Rosa Luxembourg autour du thème: «ECO ou CFA: Quelle monnaie pour la CEDEAO en 2020?»
L’effectivité de la monnaie « ECO » pour la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) dès 2020 est tout simplement une utopie, s’accordent à dire le professeur Moustapha Kassé, Ndongo Samba Sylla et Chérif Salif Sy. Pour le premier nommé, la mise en circulation de l’ECO implique d’abord l’unification de la zone franc, composée de la zone Uemoa et de la zone Cemac.
Et pour ce faire, il faut d’abord régler trois problèmes fondamentaux à savoir «l’inter-parité des différentes monnaies, les réserves et la gouvernance de la monnaie», a relevé le Pr Moustapha Kassé, non moins doyen honoraire de la FASEG et Président de l’Ecole de Dakar. Au vu de tout ceci, s’interroge le professeur: «Comment veut-on mettre ensemble ce qui ne s’assemble pas pour prétendre avoir une bonne mêlée». Et de poursuivre : «Est-il pensable de voir un géant économique comme le Nigéria accepter d’être dirigé par un Gambien?»
En somme, note Pr Kassé, «Toutes ces questions sont loin d’être réglées, y compris celle relevant de la bancarisation des avoirs extérieurs entre autres… La question de la monnaie unique est éminemment politique. Et à ce sujet, les points de vue des chefs d’Etats sont divergents… ».
Chérif Salif Sy, directeur du Forum du Tiers-monde de renchérir: «La monnaie est juste un instrument pour réaliser le développement». Pour s’en convaincre, l’économiste convoque l’histoire: «La revendication de la monnaie CFA est légitime et ne date pas d’aujourd’hui. Et ça, l’histoire nous le concède… Mais ce qui demeure constant, c’est qu’il n’y aura pas de monnaie unique en 2020». Au demeurant, invite-t-il: «Ceux qui sont intéressés par la réforme adaptative devraient également dire ce qui convient de faire en étant réalistes… ».
Ndongo Samba Sylla, pour sa part dira: «Avoir une monnaie unique pour toute la zone Cedeao implique d’abord un fédéralisme des Etats. Or, nous sommes dans une optique néolibérale qui favorise les développement des espaces… ».
Se voulant cohérent, l’économiste et chercheur à la Fondation Rosa Luxembourg s’est toutefois démarqué du Pr Kassé en faisant savoir que «La monnaie n’est pas une question technique, parce qu’elle est étymologiquement politique. De ce point de vue-là. La monnaie, c’est la créature et l’instrument de l’Etat. Si les Africains veulent un gouvernement fédéral, il faudra que chacun aille battre sa propre monnaie». Toutefois, a-t-il noté, «il est tout à fait possible d’avoir des monnaies nationales solidaires».