Face au silence du comité exécutif de l’Adema-Pasj sur la question de la candidature à l’interne du parti, les militants perdent, de plus en plus, patience. L’Adema ne manque pas de candidats mais c’est le Comité exécutif du parti qui n’a pas encore fini de sonder la direction du vent avant de se positionner. Entre le soutien à IBK et la candidature à l’interne du parti, les mains des barons de la ruche continuent à trembler, comme pour annoncer un séisme, à l’image de ce qui s’est passé en 2013.
A l’Adema-Pasj, rien ne va, ou tout au moins, tout va à l’envers. L’approche du double scrutin présidentiel de 2018 annonce une implosion inévitable puisque les divergences de vue ont atteint un point de non-retour. Conséquence : depuis le rappel à l’ordre du Maire de Sikasso, Kalfa Sanogo, par le Comité exécutif du parti, le 17 septembre 2017, suite à son meeting d’annonce de sa candidature à la primaire du parti, la pression des militants à la base de la ruche ne fait que monter pour obtenir la candidature du parti.
Pour preuve, le candidat malheureux du parti en 2013, Dramane Dembélé, a rejoint le Maire de Sikasso sur le front, le dimanche 21 janvier 2018, en annonçant à la presse sa candidature dans la course pour être le porte étendard du parti. Constat : les partisans du soutien des abeilles à la candidature d’IBK perdent de plus en plus le terrain. Face à cette situation de bras de fer, l’ancien député de Kangaba, Lancéni Balla Kéïta sonne l’alerte et dénonce la politique des ministres du parti au pouvoir qui, selon lui, risque de « donner la liberté aux structures, militantes et militants du parti, d’aller voter pour qui ils veulent au mois de juillet 2018. »
Comme en 2013, les militants de l’Adema seront-ils dispersés, en juillet 2018, entre les autres candidats ?
Dans un entretien qu’il nous a accordé, l’ancien député accuse ses camarades ministres qui sont dans le Gouvernement de conduire les abeilles dans une aventure de dislocation du parti en juillet 2018. « L’Adema doit avoir son candidat, conformément aux recommandations de la 15ème Conférence nationale tenue en mars 2017. S’ils veulent empêcher cela, ils finissent par donner la liberté aux structures militantes du parti d’aller voter pour qui ils veulent. Et leur objectif de donner un second mandat à IBK ne sera pas atteint», avertit l’ex député.
A l’en croire, c’est une formation, coquille vide, qui risque de soutenir IBK en juillet 2018 si le parti refuse de présenter un candidat au 1er tour.
Selon lui, la méthode utilisée par ses camarades ne profite guère au président sortant. « Ce qu’ils doivent faire, c’est de présenter un candidat au 1er tour. Si ce dernier ne partait pas au second tour, alors le Comité exécutif aura la latitude de dire aux structures, aux militantes et militants de voter pour IBK au cas où « Boua Ka Bla » ne sera pas une réalité. C’est ça le processus électoral dans une démocratie normale. Pour rappel, dans les élections démocratiques, normalement, au deuxième tour, les soutiens et alliances sont repartis entre la 1ère et la 2ème forces du paysage politique. Mais, dès le départ si la 1ère force et la 2ème force font alliance, la démocratie est piégée. C’est dans ce scénario que les ministres Adema veulent nous amener. Ils sont au Gouvernement pour eux-mêmes, mais pas pour le Mali et le parti. On ne peut pas se réclamer le titre d’acteur du mouvement démocratique et agir de la sorte. Ils doivent se rappeler que certains ont perdu leurs vies afin que le jour soit», explique l’ancien ministre.
L’Adema-PASJ sacrifié?
Pour le député, si ses camarades ministres sont, aujourd’hui, dans le Gouvernement, c’est grâce à l’Adema. Une réalité, selon lui, qu’ils ne doivent jamais perdre de vue. « Je m’insurge contre une pratique que nos dirigeants ont apportée dans notre démocratie. C’est le fait de choisir les ministres dans le parti sans l’avis de ce dernier. Dans ces conditions, ces ministres ne se sentent pas lier au parti, mais à l’homme du jour. Cette pratique contribue à affaiblir le parti au profit d’un régime en place.
IBK en son temps, lorsqu’il n’était pas encore arrivé à Koulouba, critiquait cette pratique d’ATT entre 2002 et 2012. Le cas de l’actuel Ambassadeur du Mali en France, Toumani Djimé Diallo est édifiant. Lorsqu’en 2007, ATT a voulu nommer ce dernier dans le Gouvernement Modibo Sidibé comme ministre de l’Agriculture sans passer par le parti, IBK a dit non. Cela a créé un froid entre Toumani Diallo et IBK pendant longtemps. Il a fallu qu’IBK intercède auprès d’ATT pour le nommer Ambassadeur au Maroc. C’est après que Dr Bokary Tréta a été proposé au nom du RPM à ATT pour entrer dans le Gouvernement de Mariam Kaïdama Cissé.
« L’homme est un inconnu connu, dit-on, sinon, comment IBK, après avoir lutté contre une pratique, se permet une fois au pouvoir de s’engouffrer dans la même chose. C’est pourquoi, je dis que les hommes politiques africains ne tirent aucune leçon des expériences passées afin de mieux gouverner leur mandat.
La situation qui est arrivée au Mali est de la faute des partis politiques, qui ont abandonné le vrai combat pour l’ancrage profond de la démocratie au profit des intérêts personnels des candidats de partis politiques de 2002 à 2012. Nous sommes tous concernés par cette faute politique. Les partis ou les candidats de partis ne doivent plus continuer à faire le griot politique pour se voir nommer après PDG ou PCA par-ci et par-là ou membre du Gouvernement », regrette Lancéni Balla Kéïta.
Soutien à Kalfa Sanogo et à Dramane Dembélé
Selon l’ancien député, les partis ou les candidats de partis ne doivent plus continuer à faire le griot politique pour se voir nommer à de hautes fonctions.
« Si les partis ne peuvent pas jouer leur rôle de formation des militants et d’ancrer profondément la démocratie au Mali, ce n’est pas la peine que le financement public soit donné aux partis politiques aphones ou qui désistent à présenter un candidat à l’élection présidentielle. C’est en cela que je soutiens le principe de candidature de Kalfa Sanogo et de Dramane Dembélé.
En se présentant comme candidats à la candidature, ils ne feront que sauver l’Adema d’une dispersion électorale entre les autres candidats, qui affaiblira davantage le parti pendant les élections législatives. Le cas Dioncounda Traoré est difficile à traiter. Car, il a été toujours muet sur les questions de poste. Il ne le demande jamais. C’est toujours les autres qui le poussent à l’avoir. La seule fois qu’il a demandé au CE Adema, c’est de lui accorder un dernier mandat à la tête du Comité exécutif, c’était lors du congrès de 2010. Il y a eu des oppositions à sa demande, mais finalement, tout est rentré dans l’ordre. Dioncounda est le meilleur candidat pour le Mali en 2018. Il a fait ses preuves avec des moyens limités. Il a la confiance du peuple, sauf que les chefs religieux le qualifient de libre penseur. Mais, c’est quelqu’un qui ne fait rien au hasard et il a toujours eu sa proie. C’est ça la baraka », conclut Lancéni Balla Kéïta.
Youssouf Z KEITA
Info Soir