Ces personnes qui ont quitté leurs contrées à cause de l’insécurité sont confrontées, malgré la solidarité agissante, à des difficultés du quotidien en termes d’alimentation et de scolarisation des enfants
La Région de Ségou ne cesse d’accueillir un nombre croissant de personnes déplacées. à l’origine de ces mouvements de populations, on notera la peur des représailles et la dégradation de la situation sécuritaire caractérisée par des attaques sporadiques des groupes terroristes. Les milliers de personnes déplacées internes sont venues pour la plupart des Cercles de Bankass, Bandiagara, Djenné, Ténenkou, Macina et Niono (Régions de Mopti et Ségou). Certains vivent dans des familles d’accueil ou dans les maisons louées et sur les sites provisoires. Grâce aux efforts conjugués, la distribution de vivres et non vivres, les déplacés se sentent réconfortés. Cependant, plusieurs défis restent à relever en matière de logement, de santé, de nutrition, etc.
Vendredi, nous sommes sur la route menant à Zogofina, une Commune rurale jouxtant la capitale des Balanzans. La voie est bordée d’arbres et de champs de mil, de maïs, d’arachide, etc. Dans le dédale des ruelles de Zogofina, des poulets picorent librement tandis que les vaches broutent de l’herbe aux alentours.
Mamadou Djanda fait partie des milliers de personnes déplacées internes en provenance de Diallassagou, une commune du Cercle de Bankass, dans la Région de Mopti. Il a trouvé refuge à Zogofina. Assis sur une natte près d’un grand caïlcédrat, drapé dans un boubou noir, il explique que la situation sur place, le tourmentait à tel point qu’il avait peur pour sa vie et celles des siens. Après quelque temps de réflexion, il a pris son courage à deux mains pour quitter son terroir, effectuant un saut dans l’inconnu.
Après plusieurs jours de voyage en transport en commun, il est arrivé à Ségou les mains vides. Aujourd’hui, c’est un sentiment de réconfort et une joie de vivre qui animent l’homme. Depuis son arrivée, lui et d’autres déplacés ont bénéficié de la générosité de la population, des autorités et des organisations humanitaires. Les dons ont vite afflué. Mais passé les premiers moments, les appuis commencent à se faire rares. «Malgré les multiples dons, nous sommes toujours dans le besoin. Des vivres et non vivres supplémentaires nous seront d’un grand soutien», plaide-t-il.
Nemoutou Traoré, une déplacée, vit à Ségou depuis exactement 5 mois. Elle indique que les jeunes ont rejoint la capitale pour chercher du travail. Ils ne voulaient pas continuer à dépendre de l’assistance des autres. Ils ont à cœur de gagner de quoi subvenir aux besoins de la famille. Notre interlocutrice explique que le déplacement forcé a engendré la non scolarisation des enfants. Nombreux sont les mômes des familles déplacées en âge d’être scolarisés qui ne fréquentent plus l’école et n’ont aucune occupation éducative dans les communautés d’accueil, malgré la présence d’écoles fonctionnelles. Les enfants essayent tant bien que mal de s’adapter à leur nouvel environnement et sont constamment près de leurs mères pour les tâches ménagères. «Ici ça va, nous sommes réconfortés et nous nous sentons mieux et surtout en sécurité», confie-t-elle. Son souhait est que la paix règne partout.
Drissa Traoré, habitant de la Commune de Zogofina, héberge actuellement des centaines de déplacés par solidarité. Sa concession est grouillante de monde. Des femmes s’affairent à la cuisine. D’autres pilent le mil à un rythme cadencé. Plus loin, les enfants papotent. Drissa Traoré explique que la plupart des déplacés internes vivant dans la commune, viennent de Diallassagou. Après leur avoir donné des abris, il leur a attribué un champ pour qu’ils cultivent le niébé. Malheureusement, la récolte n’a pas été bonne à cause du manque de matériels agricoles. Malgré leur nombre pléthorique, il parvient à nourrir les familles déplacées. Drissa Traoré ajoutera que les habitants de Zogofina, les autorités locales et bien d’autres personnes ont fait montre d’une grande solidarité en apportant des vivres et non vivres aux personnes déplacées de Mopti.
Au service local du développement social et de l’économie solidaire de Ségou, la journée n’est pas de tout repos souvent. Les déplacés n’arrêtent pas d’appeler pour s’enquérir de la disponibilité des vivres et non vivres. Selon Modibo Naco, chargé d’action humanitaire au sein de la structure, Ségou accueille 24.370 déplacés au niveau régional et 5.520 au niveau cercle. Les déplacés sont toujours dans le besoin. La dernière distribution de vivres date de plus de deux mois, signale Modibo Naco.
Les sites d’accueil se situent à Bougouni, Angoulême, M’Peba, Sébougou, Pélengana, Zogofina, Sirakoro… Les sites de Zogofina et Pélengana accueillent le plus grand nombre de personnes déplacées. Le premier site abrite 237 personnes et le deuxième 653 personnes. Spécifiquement, ces deux communes rurales ont reçu un important lot de vivres et non vivres et une somme de 40.000 Fcfa par ménage offerte gracieusement par l’ONG Islamic Relief Mali.
La chaîne de solidarité comporte une large gamme de donateurs : Qatar Charity, Coordination des affaires humanitaires des Nations unies au Mali (OCHA) et Programme alimentaire mondial des Nations unies (PAM). Les appuis de ces structures viennent en appoint à ceux de l’état. Mais l’aide est toujours insuffisante. Comme solution au problème, Modibo Naco propose d’aider les déplacés à se lancer dans des activités génératrices de revenus. Ce qui leur permettra de mieux se prendre en charge.
Mamadou SY
Amap-Ségou
Source: L’Essor- Mali