Le conseil de ministres s’est réuni, en session ordinaire, le mercredi 16 octobre 2019, dans la salle de délibération du Palais de Koulouba. L’occasion a été parfaite pour proroger l’état d’urgence. Cette prorogation signifie que les précédents ont été assez bénéfiques. Mais on se demande bien ce que change un état d’urgence au Mali.
Pour la quatrième fois consécutive, l’état d’urgence vient d’être prorogé au Mali. Cette fois-ci, c’est jusqu’au 31 octobre 2020. Cette prorogation se fait sur le rapport du ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation. Pourquoi une telle Loi ? Selon le rapport du conseil de ministres du mercredi dernier, les précédents états d’urgence ont porté leurs fruits en ce qui concerne la poursuite et le renforcement des mesures de prévention au niveau des autorités administratives compétentes, la prorogation des effets des poursuites judiciaires liées à l’état d’urgence ; la croissance des actions de contrôle des forces armées et de sécurité sur le territoire national ; le rétablissement de la sécurité dans certaines localités. « Au regard de la situation, l’état d’urgence est prorogé pour renforcer les capacités opérationnelles des autorités administratives et judiciaires, des forces armées et de sécurité afin de leur permettre de mieux faire face aux situations de menaces ou d’agression », lit-on dans ce rapport.
Si réellement l’état d’urgence a permis de faire tout ceci, il convient alors que nous félicitions les autorités maliennes. Mais combien d’attaques meurtrières sont intervenues au cours de ces dernières années dans ce pays ? À cause de l’insécurité, plus de 900 écoles ne sont-elles pas restées fermées en 2019 ? Ocha Mali n’a-t-il pas tiré la sonnette d’alarme en 2019 sur l’augmentation des besoins humanitaires à cause de la crise au centre ? Durant cette même année, l’insécurité ne s’est-elle pas étendue jusque dans la région de Koulikoro, où des écoles sont restées momentanément fermées sous la menace de certains hommes armés ?
La situation sécuritaire au Mali est assez alarmante aujourd’hui pour croire que l’état d’urgence autorisé par la Loi n°2018-060 du 31 octobre 2018 a été aussi bénéfique pour le Mali. Outre cela, quel est le citoyen malien qui avait encore souvenance que le pays évoluait sous un régime d’état d’urgence ? Sans ambages, pratiquement aucun. Pourquoi ? Parce qu’aucun changement comportemental ne s’est imposé sur eux à cause de cet état. Les cortèges de mariages, les tapages nocturnes sous le nom de « balani show » battent leur plein, les soirées dansantes ainsi que les concerts ont continué à se tenir comme d’habitude. Alors, à quoi sert l’état d’urgence ? Peut-être juste de nom ou pour une instrumentalisation pure et simple de cette situation.
Toutefois, il est temps de sortir de cette logique. Ce n’est pas l’état d’urgence qui va résoudre la situation sécuritaire du Mali. Ce pays souffre d’un déficit d’hommes dévoués à sa cause. Tant qu’il n’y aura pas de vrais patriotes, aussi bien du côté de la gouvernance que de la citoyenneté, les espoirs sont minimes dans la résolution de cette crise qui découd, chaque jour, les tissus sociaux du Mali.
Rappelons que c’est depuis le Décret n°2017-0338/P-RM du 19 avril 2017 que l’état d’urgence a continué à se prolonger. La troisième prorogation est celle survenue selon la Loi n°2018-060 du 31 octobre 2018. Celle-ci devait s’expirer le 31 octobre 2019. Le Mali est alors devenu un pays permanemment sous l’alerte rouge.
F. TOGOLA
Source : Le Pays