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Sécurité: le cas des milices

Souvent employées comme supplétifs de l’Armée, comme c’est le cas de la Plateforme des Mouvement du 14 Juin, du Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA) qui combat dans la zone de Ménaka, souvent combattues et blackboulées quand il s’agit de Dan Nan Ambassagou et d’autres groupes de chasseurs traditionnels, les milices armées mériteraient une clarification une fois pour toutes, de leur situation, dans un souci d’équité et de respect des principes républicains.

 

Un dernier rebondissement met cruellement au-devant de l’actualité nationale cette épineuse question mal appréhendée et logiquement mal traitée. L’on apprend en effet qu’une milice de la Coordination des mouvements et fronts patriotiques pour le renouveau (CMFPR II) a rejoint Dan Nan Ambassagou. L’objectif est clair : mettre en commun les moyens humains et matériels pour mener le même combat de la sécurisation des populations civiles. Ces combattants de la liberté sont-ils dans leur bon droit ou dans le droit ?
Le droit et le bon droit
Pour être dans leur bon droit, ils le sont pleinement. Le cycle de massacres des populations civiles trahit une défaillance dans le dispositif de sécurisation qui légitime leur action. Les exécutions ciblées, les incendies criminels des maisons et des récoltes, les limitations imposées de mouvements sont révélateurs d’un certain délaissement des populations qui décident de prendre leur destin en main. Faut-il servir d’agneau sacrificiel sur l’autel de la folie meurtrière d’aventuriers illuminés ? De façon récurrente, ceux qui doivent protéger les populations arrivent pour faire le décompte macabre des victimes pour lancer ensuite des opérations de ratissage aux résultats riquiquis. L’appellation groupe d’auto-défense résume donc la raison d’être de ces mouvements qui n’ont aucune visée hégémonique.
Les combattants de la liberté sont-ils dans le droit ? Non, pas plus que les mouvements qui composent la Coordination des mouvements de l’Azawad, la Plateforme des mouvements du 14 Juin… Parce que seul l’État a le monopole «violence légitime» qui fait référence au monopole dont dispose celui-ci pour le maintien ou le rétablissement de l’ordre public ainsi qu’en temps de guerre ou de risque de guerre. La violence légitime peut se traduire par une limitation des libertés individuelles. De ce point de vue, ni Dan Nan Ambassagou, ni la CMFPR, mais aussi ni la CMA ni la Plateforme ne devrait se pavaner en armes, de surcroit en armes de guerre dont la détention fait l’objet d’une loi d’interdiction spécifique en République du Mali. En clair, tous les mouvements armés sont dans l’illégalité.

La légalité sélective
des milices
Mais, dans les faits, certains bénéficient d’un traitement préférentiel stipulé dans l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali en ses articles 29 et 30 : ‘’les Parties réitèrent leur engagement à combattre le terrorisme et ses multiples connexions que sont le crime organisé et le trafic de drogue, y compris à travers les stratégies et mécanismes régionaux existants’’ ; ‘’les Parties conviennent de la mise en place, en tant que de besoin, d’unités spéciales aux fins de lutter contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée’’. Ce mariage de raison se traduit par des patrouilles conjointes, la sous-traitance du monopole de la violence à des groupes armés pour la sécurisation des élections… ‘’L’armée malienne et les Casques bleus de l’ONU patrouillent en ville. Quant aux combattants du Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA), du “GATIA”, autre groupe pro-gouvernemental, et d’autres éléments de groupes signataires ex-rebelles, ils tiennent une dizaine de check-points aux alentours de Ménaka’’ lit-on dans le reportage d’un confrère européen. L’unique objectif reste la lutte contre les terroristes.
Les autres milices, à l’instar de Dan Nan Ambassagou, les chasseurs traditionnels de Niono (…) ont également un seul objectif : se protéger des agressions jihadistes dont les populations sont régulièrement victimes. Donc, l’ennemi commun, ce sont les terroristes.
Pourtant, cette dernière catégorie de milice est jugée pesteuse. Les pouvoirs y voient davantage le mal que dans les énergumènes qui se baladent en motos Dragon pour semer la mort et la désolation. Volontairement, on lâche la proie pour l’ombre. Ainsi, sous l’ancien régime, le Premier ministre Boubou CISSE, avait mis un point d’honneur à démanteler les check-points tenus par Dan Nan Ambassagou. On a poussé l’acharnement jusqu’à bombarder une position de cette milice d’auto-défense, en détruisant ses moyens de déplacement. Pourtant, les jihadistes circulent toujours en Dragon et l’aviation était beaucoup plus utile ailleurs.

L’autorité de l’État
en souffrance
Manifestement, les autorités de la Transition ont fait le choix du replâtrage en reconduisant le même schéma. À la suite de l’occupation du village de Farabougou toujours assiégé d’ailleurs, deux fora, en l’espace de deux mois, sur la réconciliation intercommunautaire, dans le but d’apaiser les tensions entre les différentes communautés du Cercle de Niono, précisément entre les chasseurs traditionnels et les jihadistes, sont organisés par les autorités de la Transition. Une mesure forte qui a découlé de ce rassemblement, c’est que le Gouvernement s’engage à désarmer les chasseurs traditionnels donsos indexés, à tort ou à raison, comme les auteurs d’exactions sur les populations peules. C’était la même mesure contre la milice Dan Nan Ambassagou. De l’autre côté (jihadistes), personne ne pipe mot d’un désarmement ; on négocie plutôt la dispense du port obligatoire du voile intégral, le paiement de la zakat, la liberté de mouvement pour les populations emmurées.
À ce stade, l’État devrait plutôt chercher à reprendre la main qu’il est en train de perdre inexorablement par son obsession du dialogue avec les jihadistes. Pour cela, il faudrait traiter en profondeur le cas des milices armées. Parce que les lois de la République s’appliquent indistinctement à tous les sujets de droit. Et aussi, parce que ça continue d’aller en vrille avec des populations qui interdisent tout simplement l’accès de leur localité à la MINUSMA pour insuffisance de résultat. Selon les informations qui nous sont parvenues, hier, elle a été empêchée d’entrer dans la ville de Bandiagara par les populations. Et ce n’est pas la première obstruction à l’exercice de sa mission dans cette partie du territoire très éprouvée par les attaques jihadistes.
En somme, l’équation simplifiée se présente ainsi : les populations ont besoin de sécurité. C’est à l’État de la leur donner. À défaut, leur instinct de survie leur commande de se la donner. Et c’est là où l’État doit trancher : soit il comble le vide sécuritaire, soit il sera comblé par des milices qu’il faudrait désormais traiter sur une base égalitaire puisqu’elles mènent le même combat contre les terroristes.

PAR BERTIN DAKOUO

Source : INFO-MATIN

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