A la faveur de récents mouvements annoncés ou suscités, le secteur bancaire s’invite au débat. A l’évidence, le feu couve sous la cendre. Comme une goutte d’eau versée sur un fer chauffé à rouge, la fumée s’échappe de la cheminée des chapelles bancaires. Blanche ou noire ? En ligne de mire, le mode de gouvernance le plus efficace à même de porter le projet politique au sein des établissements bancaires d’obédience publique.
Les spécialistes de « broderies bancaires » n’ont qu’à bien se tenir. Un nouveau paradigme profile à l’horizon : se saisir d’une interprétation de la réglementation bancaire pour donner corps à une décision stratégique.
Certes, il est difficile de prêter une oreille attentive aux paroles du gourmand lors du partage de la viande. Mais lorsqu’elles sont sages et réfléchies, cela mérite un détour. Les questions de gouvernance doivent être prises très au sérieux. Partout, et surtout en milieu bancaire. On ne peut pas s’y engager avec l’intention de faire un tour de piste, le temps d’imprimer sa marque de fabrique, de garnir ses épaulettes et de raconter une belle histoire aux prescripteurs. Et se dégonfler pour s’arranger plus tard avec la réalité, entre amis, et faire face à l’acuité du quotidien.
La bonne gouvernance n’est et ne saurait être une option, un vélo d’appartement où les animateurs des structures de contre-pouvoirs rongent leurs freins, faute de trouver mieux. La gouvernance ce n’est pas de la paille, encore de l’enfumage. Elle ne saurait être un jeu, une affaire d’improvisation. C’est du costaud. C’est pour avoir été négligé et même oublié, que le concept revient en force sur la scène publique.
La gouvernance est un tout. On ne peut pas la mettre en pièces détachées, prendre la partie gratifiante et laisser « l’os » à d’autres soins. La révélation de manquements et autres coups de canif portés à son encontre ne peut être une tempête circonscrite dans un verre d’eau. Elle touchera, tôt ou tard, avec un effet amplifié, l’image et la réputation de l’établissement bancaire adressé. Pour la simple raison qu’elle remet en cause la confiance, indispensable pour bâtir de relations sérieuses et durables entre toutes les parties prenantes. Est-il besoin d’insister ? Les banques sont les dépositaires de la confiance de leurs clients.
Les spécialistes de « broderies bancaires » n’ont qu’à bien se tenir. Un nouveau paradigme profile à l’horizon : se saisir d’une interprétation de la réglementation bancaire pour donner corps à une décision stratégique.
C’estCertes, il est difficile de prêter une oreille attentive aux paroles du gourmand lors du partage de la viande. Mais lorsqu’elles sont sages et réfléchies, cela mérite un détour. Les questions de gouvernance doivent être prises très au sérieux. Partout, et surtout en milieu bancaire. On ne peut pas s’y engager avec l’intention de faire un tour de piste, le temps d’imprimer sa marque de fabrique, de garnir ses épaulettes et de raconter une belle histoire aux prescripteurs. Et se dégonfler pour s’arranger plus tard avec la réalité, entre amis, et faire face à l’acuité du quotidien.
La bonne gouvernance n’est et ne saurait être une option, un vélo d’appartement où les animateurs des structures de contre-pouvoirs rongent leurs freins, faute de trouver mieux. La gouvernance ce n’est pas de la paille, encore de l’enfumage. Elle ne saurait être un jeu, une affaire d’improvisation. C’est du costaud. C’est pour avoir été négligé et même oublié, que le concept revient en force sur la scène publique.
La gouvernance est un tout. On ne peut pas la mettre en pièces détachées, prendre la partie gratifiante et laisser « l’os » à d’autres soins. La révélation de manquements et autres coups de canif portés à son encontre ne peut être une tempête circonscrite dans un verre d’eau. Elle touchera, tôt ou tard, avec un effet amplifié, l’image et la réputation de l’établissement bancaire adressé. Pour la simple raison qu’elle remet en cause la confiance, indispensable pour bâtir de relations sérieuses et durables entre toutes les parties prenantes. Est-il besoin d’insister ? Les banques sont les dépositaires de la confiance de leurs clients.
Réduite ou élargie ?
L’Acte uniforme sur les sociétés commerciales et GIE de l’Ohada fixe le nombre d’administrateurs des établissements bancaires à trois membres au moins et 12 membres au plus (art 416). La question suivante se pose : la taille est-elle un élément déterminant dans l’efficacité du conseil d’administration ? Plusieurs études conduites dans les grandes banques européennes ont démontré qu’il n’y avait pas de corrélation entre la taille de l’organe délibérant et l’efficacité de la gouvernance. Ce qui n’est pas de l’avis de tous les auteurs.
Jensen et Meckling estiment que le conseil d’administration est plus performant chaque fois que le nombre de ses membres augmente. Par contre, pour Yermack, les conflits sont mieux gérés avec un conseil à taille réduite. Dans la pratique, les banques dotées d’un conseil d’administration à taille réduite (ABN AMRO ou UBS) n’ont pas été les plus épargnées par la crise financière internationale. Tout comme, les conseils à taille élargie n’ont pas apporté plus de valeur ajoutée à leur entreprise.
Comme le rappelle un adage du terroir : « Une pirogue n’est jamais trop grande pour chavirer ». D’autant que pour les grandes banques, la taille qui les identifie et qui constitue leur force, porte aussi le germe de leur fragilité. En effet, une banque est comme un bateau : plus elle est grande, plus elle est difficile à arrimer et à accoster. A taille humaine, elle a une mobilité plus aisée qui lui assure proximité et efficacité.
Moniste ou dual ?
Il faut ici préciser que dans l’espace Ohada le mode d’administration de la société anonyme (SA) peut revêtir deux formes : la SA avec conseil d’administration et la SA avec administrateur général (art 414). Dans l’espace sous-régional Uémoa, la réglementation bancaire n’autorise qu’un mode d’administration unique : la SA avec conseil d’administration. Par contre, le mode de direction reste ouvert : président-directeur général (gouvernance réunie), et président du conseil d’administration et directeur général (gouvernance dissociée).
Certains analystes estiment que le PDG est juge et partie quand il anime le débat au sein du conseil. Si d’aventure, son projet présenté en conseil venait à être refusé par les autres administrateurs, son double statut risque d’être mis en cause. Pour ne pas en arriver là, il peut être tenté de « sur-intervenir » en conseil, ce qui peut être préjudiciable pour la qualité du débat.
Les opposants au monisme proposent donc de dissocier les fonctions de président et de directeur général. Dans ce cas, le conseil à travers son président n’interférera pas dans la gestion opérationnelle de la banque et assumera pleinement son pouvoir de contrôle sur l’exécutif conformément à l’article 435 de l’Acte uniforme sur les sociétés commerciales et GIE.
Les avocats Mamadou Konaté et Bérenger Meuke font remarquer que « la supériorité formelle de la gouvernance duale reste à démontrer, tout dépend des rapports de force internes. Autant la gouvernance duale peut permettre une dissociation des pouvoirs de direction, autant elle peut aboutir de par les rapports de force qui naissent très souvent entre le directeur général et l’actionnariat, à une paralysie de la gestion sociale et partant à la chute de l’entreprise ».
Les deux juristes concluent : « Au-delà de ces ‘petits arrangements entre amis’, c’est aussi la vaste question du contrôle social de la société par l’ensemble de ses parties prenantes (stakeholders) qui est posée ».
Il est intéressant de noter que la pratique en Europe a montré que le système dual (UBS ou ABN AMRO) n’est pas forcément le gage d’une plus grande transparence et donc d’une gouvernance renforcée. La Société générale s’était essayée au dualisme, sans succès évident, avant d’y revenir il y a quelques semaines. Auparavant, elle a aussi expérimenté une nouvelle formule du système moniste avec la nomination d’un PDG, non sans instaurer un lead director (vice-président). Ce poste n’est pas prévu dans les dispositions de l’Ohada.
Au niveau de la sous-région de l’Afrique de l’Ouest, le régulateur a fait part de sa préférence pour la formule duale sans en faire une obligation. Soyons donc clair, précis et concis. Aucune disposition réglementaire en vigueur dans la zone UMOA n’oblige une banque à mettre en place un système dual : PCA et DG. Celui-ci est-il un gage de bonne gouvernance ? Pas forcément. En vérité, il n’y a pas une solution unique mais des méthodes qui sont meilleures dans différentes situations.
La circulaire n°005-2011/CB/C du 4 janvier 2011 relative à la gouvernance des établissements de crédit de l’UMOA, précise en sus des dispositions du droit commun que « l’organe délibérant doit être composé notamment de membres capables de porter un jugement indépendant sur les activités de l’établissement ». Que dire alors des cas d’administrateurs salariés dans le conseil d’administration de certaines banques ? Leur indépendance saurait-elle survivre à leur lien de subordination ?
Cette circulaire de la Commission bancaire reprend à son compte une disposition de l’Acte uniforme notamment celle qui attribue au conseil d’administration la mission de fixer les rémunérations du directeur général et le cas échéant du directeur général adjoint (article 5 point 3 de la circulaire sus visée).
Au menu de leurs travaux, les administrateurs doivent inscrire au moins deux fois par an un point sur la gouvernance d’entreprise. A l’occasion, ils devraient intégrer en leur sein des administrateurs indépendants, libres de tout intérêt (c’est-à-dire non-salariés, non actionnaires et déconnectés de tout lien politique et corporatiste), dont le nombre est limité au tiers des membres du conseil (art 417 de l’Ohada).
La circulaire n°003-2011/CB/C du 04 janvier 2011 de la Commission bancaire fait obligation à l’organe délibérant de créer le Comité d’audit (art 6 de la circulaire) et de veiller à ce que ce comité soit « principalement composé d’administrateurs non-salariés ». Pour renforcer la gouvernance au sein des banques, il nous semble judicieux de veiller à l’assiduité (disponibilité) des administrateurs et à leur engagement (participation) lors du débat des différentes séances du conseil d’administration.
La circulaire de la Commission bancaire n°005-2011/CB/C du 4 janvier 2011 recommande en son article 5 point 5 que « les fonctions de président du conseil d’administration et de directeur général soient assumées par des personnes physiques différentes. Cependant, lorsque le conseil d’administration est dirigé par un PDG, celui-ci doit veiller à assurer une gestion transparente de la société vis-à-vis des autres parties prenantes, et à ne pas entraver l’exercice par le conseil d’administration de son rôle de contrôle de la gestion de la société ».
A la pratique, certaines banques de la zone continuent de fonctionner avec l’unicité de direction (PDG) sans qu’il soit prouvé qu’elles soient moins bien gérées que celles qui ont opté pour le système dualiste. Mieux, certains dirigeants qui avaient opté pour la cohabitation (PCA/DG) avaient plongé leur banque dans un coma profond (administration provisoire) qui a failli leur être fatal.
Les interférences de rôles et de pouvoirs entre les deux organes sociaux peuvent se prolonger au niveau du personnel bancaire, s’amplifier et même dégénérer en conflits de personnes, sectionner la banque en clans et ainsi détériorer gravement le climat social au sein de l’entreprise. En vérité, l’essentiel est ailleurs. Des questions de fond existent, à savoir, d’où ça vient et où ça va aller.
Conclusion
Il n’y a pas de recette « clé en main » ni de solution « passe partout ». Chaque établissement bancaire à ses réalités. Antoine de Saint-Exupéry prévient : « Voyez-vous dans la vie, il n’y a pas de solutions. Il y a des forces en marche : il faut les créer, et les solutions les suivent ».
Dans la nouvelle dynamique en marche, il faut simplement éviter tout atterrissage forcé sur la piste bancaire. Tout comme, il faut s’affranchir des remises en ordre inutilement spectaculaires, dont on doit faire l’économie avec une dose raisonnable d’explication, d’ouverture et d’humilité. Pas plus d’ailleurs que les accusations excessives, les amalgames maladroits et les revanches dissimulées doivent être proscrits.
Est-il vrai que le pouvoir donne des envies et fait des envieux ?
La persistance d’une fêlure béante dans la gouvernance bancaire ne peut qu’avoir des effets dommageables sur l’image et la réputation des établissements adressés. Dans ce contexte, personne ne doit se réjouir à ce que les bouleversements attendus ou suscités produisent leurs effets contraires à la faveur d’un assaut décisif et mal inspiré. Pour autant, personne ne doit tirer intérêt à une gouvernance approximative, hors des standards internationaux, si tant est que les motivations sont fondées, réelles et fécondes. C’est dire que le double postulat avancé n’est pas simplement circonstanciel. En effet, rien n’assure aux survivants d’aujourd’hui qu’ils ne seront pas les victimes de demain.
Plus sérieusement, chacun doit se convaincre que si le vent du malentendu souffle sur l’étincelle des rancœurs, s’allumerait alors un brasier dont personne ne pourrait présumer l’ampleur et les limites. La « théorie du chaos » explique qu’une variation minime dans le mouvement d’éléments liés entre eux peut provoquer des effets en cascade aux conséquences incalculables. A notre humble avis, les enjeux sont plus importants que les ambitions personnelles. Il faut s’élever au-delà des intérêts partisans, éviter les chocs des ambitions et briser le climat de défiance qui pourrait s’installer.
Pour une autre raison, la sérénité est nécessaire. Elle est même indispensable à l’exercice de l’activité bancaire. Comme le rappelait, trivialement, un commerçant guinéen : « l’argent a peur du bruit ».
La vie, d’une personne physique ou morale, n’est jamais un fleuve tranquille. C’est une course de fond, avec plusieurs « check point » sur le passage, qui requiert de l’endurance et de l’humilité. Gardons-nous de compter les poussins avant que la poule n’ait pondu les œufs !
Rien ne peut remplacer la patience. Tout comme, rien n’est aussi préjudiciable que la résignation. Il faut trouver une ambiance nouvelle dans le cadre d’une confiance retrouvée.
Pour ce faire, Il faut se détacher de l’émotion, anticiper et minimiser les distorsions. Les mots doivent être choisis et raisonnés. Les actions, au long cours, qui s’y rapportent doivent être mûrement réfléchis et partagés. Eviter l’abus qui résulterait d’un usage excessif de l’autorité. S’affranchir du laxisme qui pourrait naître d’une trop grande mollesse des actes. Tels sont les gages, nous semble-t-il, de lendemains plus apaisés pour la gouvernance des banques maliennes. Pour mimer une écologiste française, oui à une gouvernance de combat, non à une gouvernance de coups bas.
Cheickna Bounajim Cissé
Cadre dirigeant de banque, économiste et essayiste
SOURCE / L’Indicateur du Renouveau