On ne se lassera jamais de dénoncer le phénomène de l’esclavage tant que des personnes continuent d’être victime de cette pratique moyenâgeuse. Ces derniers temps, le phénomène a atteint des proportions inquiétantes dans certaines localités de la région de Kayes. Sur des vidéos circulant sur les réseaux sociaux, l’on peut voir des personnes maltraitées pour avoir refusé le statut d’esclave. Pire, des cas de morts d’hommes, des blessés graves et plusieurs déplacements forcés ont été enregistrés dans certaines localités. Face à l’ampleur de la situation, les autorités brillent par une indifférence complice. À quand donc l’adoption d’une loi pour criminaliser cette pratique honteuse dans notre pays ?
La Constitution du Mali stipule que tous les citoyens naissent libres et égaux devant la loi. Mais, il est triste de constater qu’en ce 21e siècle des individus s’arrogent le droit de vie et de mort sur leurs semblables, sous prétexte qu’ils sont supérieurs à ces derniers qui leur appartiennent.
Chaque fois que les traitements inhumains infligés à des personnes considérées comme esclaves prennent de l’ampleur, les autorités se contentent d’organiser des pourparlers entre les protagonistes. Ces solutions à l’amiable ne durent pas longtemps et le problème refait surface.
C’est ainsi que face aux nombreux cas enregistrés ces derniers temps, le ministre de la Réconciliation nationale, le Col-Major Ismaël WAGUE, s’est rendu dans la région de Kayes hier jeudi. La raison officielle de cette mission est d’instaurer la paix et le vive ensemble. Mais de manière claire, il s’agit de d’échanger avec les protagonistes sur la question de l’esclavage en vue de calmer les esprits. Pour combien de temps ?
En tout cas, ce n’est pas à travers des pourparlers qu’on aboutira à une solution efficace contre cette forme de droit de propriété d’une personne sur une autre personne appelée esclavage par ascendance.
C’est écœurant de constater que dans un pays de droit, des personnes soient considérées comme des esclaves et soient confrontées à des discriminations et abus inacceptables.
Ceux qui osent s’opposer à la volonté de leurs supposés ‘’maîtres’’ subissent des sanctions sévères. Par exemple, on les empêche d’accéder aux ressources essentielles comme l’eau, la terre ou les biens de consommation de base. Ces dernières années, des milliers de victimes sous le joug de l’esclavage par ascendance ont dû quitter leurs villages dans la région de Kayes, pour avoir dit trop c’est trop. Mais on est dans quel pays-là ?
Le hic est qu’il n’existe pas de loi spécifique criminalisant l’esclavage par ascendance au Mali, contrairement à certains pays voisins. Pour faute de cadre juridique protecteur, les victimes de l’esclavage par ascendance n’ont souvent d’autre choix que de fuir vers des localités où ils se sentent en sécurité.
Notre pays est signataire de diverses conventions internationales contre l’esclavage et qui prévoient le droit à la vie et à la liberté. Malgré tout, la pratique de l’esclavage continue de plus belle. Cela, en dépit des mobilisations pour l’adoption d’une loi criminalisant la pratique.
Il est temps que les autorités changent de fusil d’épaule en prenant leur courage à deux mains pour faire adopter une loi criminalisant la pratique de l’esclavage dans notre pays. Sans l’adoption de cette loi tant attendue, le phénomène continuera à faire des victimes et à ternir l’image de notre pays.
La balle est alors dans le camp des autorités de la transition qui se sont engagées à refonder l’État pour le bonheur des Maliens.
PAR MODIBO KONÉ
Source : Info-Matin