Le dimanche 30 juillet dernier, les Chefs d’État et de Gouvernement de la Cédéao ont tenu une session extraordinaire sur la situation politique du Niger. A cet effet, l’instance sous régionale a émis des sanctions contre le Niger en prévenant d’intervenir par la force pour rétablir le Président Mohamed Bazoum, « seul président légitime du Niger », selon l’organisation Ouest-Africaine. Dans un communiqué conjoint, le Burkina Faso et le Mali apportent leur soutien « indéfectible » aux nouvelles autorités nigériennes et au peuple nigérien.
Les autorités du Burkina Faso et du Mali ont décidé de s’aligner derrière les putschistes nigériens. Cela, suite aux sanctions prises lors de la dernière session extraordinaire de la Cédéao, tenue à Abuja, au Nigeria. La Cédéao a donné un ultimatum d’une semaine aux militaires pour remettre le pouvoir à Mohamed Bazoum, « seul président légitime » qu’ils reconnaissent. Le Mali et le Burkina, partageant avec le Niger la zone dite « des trois frontières », dénoncent et qualifient lesdites sanctions « d’illégales », « d’illégitimes » et « inhumaines » émises par la Cédéao contre « un pays qui a pris son destin en main ».
Dans un communiqué conjoint des autorités du Burkina Faso et du Mali, lu par le ministre d’État, ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, non moins Porte-parole du Gouvernement malien, le Colonel Abdoulaye Maiga à la télévision nationale du Mali, les deux Gouvernements disent avoir appris par voie de presse les conclusions des sommets extraordinaires de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de l’Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA), tenus le 30 juillet 2023 à Abuja sur la situation politique au Niger. Au cours de cette rencontre extraordinaire des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la Cédéao, des mesures fortes ont été prises contre le pays du Sahel en proie à l’expansion terroriste depuis près d’une décennie. À la suite de cela, les Gouvernements de transition du Burkina Faso et du Mali ont exprimé, dans ledit communiqué, « leur solidarité fraternelle et celle des peuples burkinabè et malien au peuple frère du Niger qui a décidé, en toute responsabilité, de prendre son destin en main et d’assumer devant l’histoire la plénitude de sa souveraineté ». Aussi, les pays voisins du Niger ont dénoncé « la persistance de ces organisations régionales à prendre des sanctions aggravant la souffrance des populations et mettant en péril l’esprit du panafricanisme ».
« Déclaration de guerre contre le Burkina Faso et le Mali »
Les deux pays du Sahel, dirigés aussi par des militaires, avertissent l’organisation sous régionale (CEDEAO) que toute intervention militaire contre le Niger s’assimilerait à une déclaration de guerre contre le Burkina Faso et le Mali. Ils poursuivent en prévenant que toute intervention militaire contre le Niger entraînerait un retrait du Burkina Faso et du Mali de la CEDEAO, ainsi que l’adoption des mesures de légitime défense en soutien aux forces armées et au peuple du Niger. Le Burkina Faso et le Mali ont également mis en garde contre les conséquences désastreuses d’une intervention militaire au Niger. Laquelle pourrait déstabiliser l’ensemble de la région comme l’a été l’intervention unilatérale de l’OTAN en Libye. Une intervention qui a été à l’origine de l’expansion du terrorisme au Sahel et en Afrique de l’Ouest. Du présent communiqué, il ressort ces propos : « Les Gouvernements de transition du Burkina Faso et du Mali sont profondément indignés et surpris par le déséquilibre observé entre, d’une part, la célérité et l’attitude aventurière de certains responsables politiques d’Afrique de l’Ouest désireux d’utiliser la force armée pour rétablir un ordre constitutionnel dans un pays souverain, et d’autre part, l’inaction, l’indifférence et la complicité passive de ces organisations et de ces responsables politiques à aider les Etats et les peuples victimes du terrorisme depuis une décennie et abandonnés à leur sort ».
Par ailleurs, les deux Gouvernements de Transition ont invité les forces vives à se tenir prêtes et mobilisées en vue de prêter main forte au peuple nigérien « en ces heures sombres du panafricanisme ».
La Guinée se désolidarise, l’Algérie met en garde contre toute intervention militaire
La décision de la Cédéao a également suscité de réaction de la part du Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD) de la Guinée Conakry, dirigée par le Colonel Mamadi Doumbouya. Le CNRD a exprimé son intérêt pour l’évolution de la situation au Niger et a soutenu le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) qui a pris le contrôle du pays après le coup d’État. La Guinée considère, en effet, que « les mesures de sanctions préconisées par la CEDEAO, incluant une intervention militaire, est une option qui ne saurait être une solution au problème actuel, mais entraînerait un désastre humain dont les conséquences pourraient aller au-delà des frontières du Niger ». Aussi, le CNRD estime qu’une « intervention militaire contre le Niger entraînera, de facto, la dislocation de la CEDEAO ». De surcroît, la Guinée annonce se désolidariser formellement des « sanctions prises et des menaces proférées lors du sommet du 30 juillet 2023 à Abuja. Puis d’ajouter qu’elles « n’engagent nullement la République de Guinée ». S’agissant de l’Algérie, elle renouvelle son profond attachement au retour à l’ordre constitutionnel et au respect des exigences de l’État de droit. Par ailleurs, cette dernière a réaffirmé son soutien à Mohamed Bazoum comme Président légitime de la République du Niger. « Le retour à l’ordre constitutionnel doit impérativement s’accomplir par des moyens pacifiques qui éviteront au Niger frère et à l’ensemble de la région un surcroît d’insécurité et d’instabilité, et à nos peuples un surcroît d’adversités et d’épreuves », déclare l’Algérie dans son communiqué de presse. De ce fait, l’Algérie « met en garde » contre toute intervention militaire et appelle à la prudence et à la retenue face aux intentions d’interventions militaires étrangères qui sont, « malheureusement, considérées comme des options envisageables et utilisables alors qu’elles ne sont que des facteurs de complication et d’aggravation de la crise ».
Ibrahim Djitteye
Source : LE PAYS