Alors que la question divise profondément les Maliens, le Conseil de sécurité, à la suite du secrétaire général de l’ONU, vient de recommander trois exigences au Mali, parmi lesquelles la réussite de la réforme constitutionnelle. Cette réforme constitutionnelle qui prend en compte des dispositions de l’Accord pour la paix, tient beaucoup à cœur la communauté internationale au Mali, dont certains partenaires en font un point d’honneur pour leur accompagnement.
Suite à sa réunion du Conseil de sécurité sur la situation des six derniers mois, au Mali, en prélude au débat sur la révision du mandat de la MINUSMA, le président du conseil de sécurité, à la suite du secrétaire général de l’ONU, a salué les progrès accomplis dans la mise en œuvre de l’Accord tout en posant trois exigences. Il s’agit de réussir la révision constitutionnelle, de redéployer autant que possible l’administration, accroître la présence de l’armée dans la région du nord et créer la zone de développement.
Comme l’a su bien souligné le représentant du secrétaire général de l’ONU au Mali, Mahamat Saleh Annadif, il ne s’agit pas de la mer à boire pour le Mali dont le rétablissement de l’autorité sur l’ensemble du territoire reste préoccupant, malgré la signature d’un accord pour la paix entre le gouvernement et les ex-rebelles du nord. Ce qui fait que le large redéploiement de l’administration et de l’armée sur le territoire est aujourd’hui une des préoccupations partagées par les Maliens en majorité.
Par contre, la révision constitutionnelle, dont le principe n’est pas également contesté par les acteurs politiques et ceux de la société civile, suscite un grand débat, ces derniers temps.
Le processus lancé, depuis janvier 2019, par les autorités nationales, est buté à un problème d’inclusivité. En effet, une bonne partie de la classe politique, dont l’opposition, estime que les pouvoirs publics n’ont pas tenu promesse quant à leur volonté de conduire un processus de révision constitutionnelle inclusif. Dans ce contexte, l’avant-projet loi rédigé par le comité d’experts unilatéralement mis en place le Premier ministre Soumeylou Boubèye MAIGA et remis au président de la République est loin d’être accepté de nombre d’acteurs.
Quant à Modibo KADJOKE du Pacte Malien pour la Refondation (PMR), il pense qu’au regard de la situation sécuritaire précaire dans plusieurs parties du pays, il y a plus urgent que la révision constitutionnelle : ‘’personne ne peut douter aujourd’hui de la pertinence de cette révision. C’est même une priorité. Mais est-ce la priorité ? Nous en doutons’’.
Le président du parti de la Quenouille, non moins responsable de la CoFoP, Housseyny Amion Guindo, Poulo, de son côté soutient qu’« avec les tueries au Centre, avec la famine qui guette cette zone sans qu’aucune solution ne soit trouvée à ces problèmes, je ne pense pas qu’il soit opportun cette révision. Cela revient à inverser la priorité ».
Le Parti FARE de l’ancien Premier ministre, Modibo Sidibé qui a été reçu en audience, ce jeudi 11 avril, par le Président de la République, se démarque totalement de l’approche adoptée par le Gouvernement quant aux réformes envisagées. ‘’Pour les FARE, la seule et vraie exigence de l’heure est de dégager des perspectives solides de sortie de crise, de restaurer la confiance des Maliens de l’intérieur et de l’extérieur en eux-mêmes et en leur État, car le processus qui conduira le Mali à une véritable sortie de crise structurelle, durable et refondatrice ne pourra faire l’économie d’un traitement de fond de l’ensemble des causalités ayant engendré la crise’’.
La COFOP et le FSD ont gentiment décliné l’invitation du président de la république à aller recevoir l’avant-projet de loi constitutionnelle rédigé par le comité d’experts.
Pour Djiguiba KEITA dit PPR, membre du FSD : « ce qui s’est passé n’est pas un processus inclusif, contrairement à ce que le gouvernement veut faire croire. Nous avions demandé un dialogue politique avant le processus pour déterminer les approches. Rien de tout cela n’a été fait ».
Face à ces prises de position contre la démarche des pouvoirs publics, l’on s’achemine inexorablement vers un blocage de la réforme constitutionnelle pourtant une exigence du Conseil de sécurité et de la communauté internationale.
Pour autant, sur la question, M. Annadif est sans équivoque dans une interview accordée ce week-end à la Radio Mikado FM : « nous avons demandé au gouvernement du Mali, de tout faire pour réussir la révision constitutionnelle et qu’elle soit la plus inclusive ». Il s’est empressé de tempérer en soutenant que cette révision de la Constitution ne devait pas être un facteur de blocage : « j’aimerais vraiment lancer un appel à toutes les Maliennes et tous les Maliens pour leur dire que la révision constitutionnelle ne doit pas être un blocage ».
Dans ce contexte, la Communauté internationale? Dans sa volonté d’accélérer les choses, semble aller à contre-courant des acteurs maliens sur cette question.
Par Sidi DAO
Source: info-matin