Le Festival du théâtre des réalités dont la première édition a eu lieu en 1996 n’a pu avoir une identité qu’à partir de 2000 parce qu’il se faisait chaque année. Selon Adama Traoré, son directeur artistique et président de l’association culturelle Acte Sept, c’est à partir de 2000 qu’ils ont décidé de le faire tous les 2 ans. La dernière édition remonte en 2020 et normalement, le festival devait se tenir au mois de décembre 2022, mais les organisateurs ont été obligés de le décaler parce qu’il y a eu des mesures par rapport à la coopération internationale qui a impacté sur les activités artistiques et culturelles.
“Maintenant, nous avons décidé de l’organiser du 1er au 7 mai 2023 à Sikasso. C’est un festival dont la programmation est multidisciplinaire. Il y a du théâtre, de la musique, de la danse, les conférences, les marionnettes et une foire exposition. Acte Sept, l’association qui porte ce projet, ne fait pas que de l’événementiel, c’est-à-dire nous utilisons le théâtre pour véhiculer des messages de santé et d’environnement, mais nous créons aussi des pièces d’auteurs maliens, africains ou francophones pour faire des tournées hors du Mali et en Europe aussi”, explique l’initiateur. Adama Traoré souligne que le groupe œuvre beaucoup pour la création de marchés nationaux à travers le processus de décentralisation parce qu’il collabore avec des collectivités pour mettre en place des politiques culturelles. “Nous avons organisé des concertations dans les sept cercles de la région de Sikasso dont les livres ont été publiés. Cela a inspiré le gouvernement nigérien et présentement, nous sommes en train de faire le même travail avec cinq collectivités des communes au Niger. Au niveau du Mali, nous sommes en train de réfléchir parce que notre base c’était l’ancienne région de Sikasso qui en compte 3 maintenant. Nous allons travailler avec les disciples de la savane en Côte d’Ivoire, c’est-à-dire à Korhogo et au niveau du Burkina, la région des Hauts bassins et des Cascades. Cela fait ce qu’on appelle l’espace SKOBO (Sikasso-Korhogo-Bobo). Nous avons voulu faire un travail structurel dans ces zones pour que ça devienne un marché pour la culture au niveau de l’Afrique de l’Ouest”, dit-il.
Selon lui, la dernière édition a été très positive même s’ils ont eu un coup rude parce qu’à quelques jours de la clôture du Festival, il y a eu un pic de Covid-19 et le gouvernement a pris des décisions pour surseoir à toutes les manifestations.
“Au-delà de ça, les différents acteurs culturels qu’on avait invités étaient tous présents et aussi on avait eu à travailler avec le FACEG qui s’occupe de la formation et de la professionnalisation des jeunes. Il avait beaucoup appuyé les jeunes, les femmes dans les différents métiers de transformation des produits locaux et dans d’autres techniques d’emploi. Il avait pris des stands pour les jeunes entrepreneurs et cela nous a permis de faire la jonction entre la culture et l’économie. C’était un acquis de cette édition”, se réjouit le directeur artistique du festival des théâtres des réalités.
Pour cette édition de 2023, Adama Traoré annonce qu’ils ont invité les maires de certains départements du Niger pour travailler sur la citoyenneté culturelle.
“C’est une étape très importante de faire cette conférence sur le rôle des collectivités dans la promotion et le développement de la culture parce que les communautés, les collectivités, la mairie, le conseil de cercle et le conseil régional par définition d’abord met en pratique des programmes au niveau du développement. On veut que la dimension culturelle soit fortement prise dans ces programmes. Il y a eu un décret au Mali en 2016 qui transfère aux collectivités des compétences en matière de culture, donc il faut arriver maintenant à traduire cela concrètement sur le terrain et faire en sorte que les différents échafaudages de la décentralisation, les communes, les cercles et les régions puissent intégrer ce volet culturel dans tous les programmes de développement qu’ils auront à élaborer”, prône-t-il.
A en croire le président de l’association culturelle Acte Sept, au cours de ce festival, un accent particulier sera mis sur les thèmes extrémisme violent et les élections apaisées au Mali parce que lors des dernières législatives, il y a eu des votes contestataires à Sikasso. “Il y a eu des députés contestataires, il y a eu mort d’hommes lors des revendications. Nous allons essayer de sensibiliser la population sur le rôle des jeunes et des femmes dans les élections. Ce sont les innovations et les axes forts de l’édition de cette année”, promet-il.
En termes de coût, l’organisateur déclare que le budget du festival s’élève à 96 millions de F CFA et qu’à quelques jours du festival, ils n’ont pu mobiliser que 66 millions. “Il y a des partenaires qui ne se sont pas encore prononcés pour diverses raisons. On n’a pas chiffré l’appui de notre autorité de tutelle, mais nous sommes dans une situation très délicate parce qu’on ne sait pas si on va avoir ces aides. Pour le moment, nous avons signé les contrats, les artistes sont mobilisés. J’espère qu’on arrivera à répondre à hauteur de souhait aux attentes”, espère Adama Traoré.
Il reconnaît qu’aujourd’hui, la situation de la culture au Mali est très difficile, car elle est financée par la coopération bilatérale ou multilatérale. “Le Mali est l’un des rares pays de la sous-région qui n’a pas un fonds alloué aux activités artistiques. J’ai cru comprendre que dans le budget du ministère de la Culture, il y a une ligne réservée aux grandes manifestations, mais qui est malheureusement réservée aux activités du ministère. Depuis quelques années au Mali, l’animation culturelle se fait par les entreprises privées. Il est temps qu’on réfléchisse à comment utiliser cette aide de l’Etat”, note-t-il.
Rendez-vous est néanmoins pris du 1er au 7 mai 2023 à Sikasso. Marie Dembélé