La salle des banquets du palais de Koulouba a servi de cadre hier jeudi 14 octobre 2021 à la cérémonie de remise solennelle des Rapports annuels 2019 et 2020 ainsi que l’Étude relative à la déontologie des agents publics au Mali de l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite (OCLEI) au président de la Transition, le Colonel Assimi GOITA. De cette cérémonie, il ressort que valeur des biens présumés illicites dans 9 dossiers transmis à la justice s’élève à 6 milliards 995 millions de FCFA.
La délégation de l’OCLEI était conduite par son président, Dr Moumouni GUINDO. C’était en présence du Premier ministre, ainsi que de plusieurs membres du Gouvernement.
À l’entame de son propos, le Dr GUINDO a rappelé que son service (OCLEI) est chargé de mettre en œuvre l’ensemble des mesures de lutte contre l’enrichissement illicite existant au niveau national, sous-régional, régional et international.
Spécifiquement, a-t-il expliqué, l’OCLEI mène des activités de prévention de l’enrichissement illicite par l’information et la sensibilisation des populations.
Aussi, il mène des enquêtes qui contribuent à la répression du phénomène ; assure la promotion de la collaboration interservices et de la coopération internationale dans la lutte contre l’enrichissement illicite.
De même, il réalise des études et des analyses, afin de formuler des recommandations d’amélioration de la gestion publique.
Au titre de la contribution à la répression, l’OCLEI a transmis à la justice 9 dossiers d’enrichissement illicite présumé. La valeur des biens présumés illicites dans ces 9 dossiers s’élève à 6 milliards 995 millions de FCFA.
Dans ces dossiers, les enquêtes de l’OCLEI ont identifié 384 biens immobiliers, soit 34 maisons d’habitation, 72 bâtiments commerciaux ou professionnels, 139 parcelles ainsi que 78 concessions rurales totalisant 181 hectares.
3, 671 milliards FCFA sur 9
comptes bancaires
Le montant total des entrées sur les comptes bancaires des 9 personnes s’élève à 3 milliards 671 millions de FCFA de 2014 à 2020. Dans la même période, leurs revenus légitimes s’élèvent à 444 millions de FCFA.
Les personnes concernées sont un comptable, deux inspecteurs des Finances, un inspecteur du Trésor, un contrôleur financier, deux maires, un ministre et un préfet.
Conformément au code de procédure pénale, certains d’entre eux ont été poursuivis par le Procureur de la République et inculpés par des juges d’instruction. Des mesures de saisie provisoire ont été prises par la justice sur certains des biens identifiés par l’OCLEI.
87 cas de dénonciations
de corruption
La durée moyenne d’une enquête est d’environ 6 mois. L’OCLEI dispose de 8 officiers de police judiciaire et d’un auditeur pour mener les enquêtes.
Par ailleurs, en collaboration avec le ministère de la Justice, l’OCLEI a mis en place en décembre 2019 un Numéro vert 80 00 22 22. Il a reçu 585 appels sur ce numéro, dont 9 dénonciations d’enrichissement illicite, 87 dénonciations de corruption et 52 dénonciations d’autres infractions
Au titre des déclarations de biens, l’OCLEI a dénombré au niveau de la Cour suprême 1 351 déclarations déposées en 2019 et 2020. L’OCLEI a traité la totalité de ces déclarations.
L’OCLEI a constaté qu’en 2019, le Premier ministre et plusieurs ministres sont restés en fonction plusieurs mois sans avoir procédé à leur déclaration de biens. Le retard a dépassé trois années pour certains d’entre eux.
Pour exploiter les déclarations de biens, l’OCLEI a adopté une démarche méthodique, objective et systématique qui lui a permis d’identifier 48 personnes dont le patrimoine a subi des variations significatives. Des enquêtes sont en cours sur ces cas.
Dans le cadre de la collaboration avec les autres structures, l’OCLEI a organisé, en février 2020, à Bamako, une conférence de haut niveau sur la lutte contre la corruption avec l’appui technique et financier de l’ONUDC. Cette 1re édition a regroupé une centaine de Maliens et les délégués de 17 pays, d’une université canadienne et de plusieurs organisations internationales, dont l’ONUDC et INTERPOL.
Les échanges ont porté sur le thème « Promouvoir les bonnes pratiques en matière de déclaration des biens et de recouvrement des avoirs ».
À ce propos, l’OCLEI sollicite l’accompagnement des autorités pour pérenniser cette initiative, en organisant chaque année au Mali une conférence de haut niveau.
«Cette initiative fera de notre pays un carrefour international de la lutte contre la délinquance financière », a dit le Dr GUINDO.
Le soutien des autorités
de la transition
Après avoir écouté attentivement le président de l’OCLEI, le président de la Transition, le Colonel Assimi GOITA, a souligné que cette cérémonie est assez significative dans la mesure où les autorités transitoires font de la lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite une de leurs préoccupations majeures.
Pour lui, cela se justifie par le fait que ces deux phénomènes sont à l’origine de l’affaiblissement continu de notre pays.
Au passage, il a salué le rapport qui permet de constater tous les efforts consentis par l’OCLEI dans le cadre de la prévention et de la lutte contre l’enrichissement illicite, les déclarations de biens, ainsi que la coopération avec d’autres structures.
Il a rappelé que la bonne gouvernance est l’un des piliers majeurs de l’action gouvernementale.
«Cela doit davantage nous motiver à vous accompagner pour l’atteinte des objectifs assignés à l’OCLEI», a-t-il dit.
De son avis, l’enrichissement illicite, la corruption, le détournement des biens publics et surtout l’impunité qui en découle constituent les principaux facteurs de blocage du triomphe de la justice sociale dans notre pays.
«Je m’engage à tout mettre en œuvre pour créer les conditions d’une gouvernance de rupture et d’exemplarité», a-t-il rassuré.
«Vos rapports nous confortent dans la vision d’un Mali nouveau ; un Mali où les citoyens ont accès à l’eau potable, à la santé, à l’éducation, aux routes de bonne qualité», s’est-il adressé au président de l’OCLEI.
Bref, il s’agit pour lui de construire un Mali en phase avec la satisfaction des besoins vitaux de ses populations. Dans ce cadre, aucun sacrifice ne sera de trop.
«Nous mesurons à la fois l’ampleur et la gravité du phénomène que vous avez la lourde tâche de combattre ; néanmoins, nous sommes prêts à vous apporter toute l’assistance nécessaire à la bonne exécution de vos missions», a-t-il encouragé.
«Je vous renouvelle tout mon soutien et soyez également rassurés de celui du Gouvernement. Sachez que ce soutien sera multiforme, afin de vous permettre de mieux conduire votre mission. En quatre années, vous avez dû fournir des efforts pour produire des rapports qui méritent des encouragements. Nous vous félicitons et vous encourageons à poursuivre votre mission, car le Mali attend beaucoup de vous», a-t-il conclu.
Par Abdoulaye OUATTARA
Source : Info-Matin