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Putsch au Burkina-Faso : “On assiste au déclin inexorable et inéluctable de l’influence et de la présence française en Afrique subsaharienne”, affirme un journaliste

L’ambassade de France à Ouagadougou a été incendié et caillassé par des soutiens du capitaine putschiste Ibrahim Traoré. Selon le journaliste Vincent Hugeux, la population burkinabée estime que l’armée française ne l’a pas protégée contre la menace jihadiste.

 

Poussé vers la sortie dimanche 2 octobre par le capitaine Traoré, le chef de la junte au pouvoir au Burkina Faso, le lieutenant-colonel Damiba, a démissionné. Après ce énième coup d’État, des violences se sont multipliées notamment contre l’ambassade de France. Pour Vincent Hugeux, journaliste, essayiste, enseignant à SciencesPo, invité lundi 3 octobre sur franceinfo, “on assiste” au Burkina Faso au “déclin inexorable et inéluctable de l’influence et de la présence française en Afrique subsaharienne”.

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Vincent Hugeux : Bien entendu, il y a un contingent estimé à 400 hommes, des forces spéciales qui ont vocation à former, à entraîner leurs frères d’armes burkinabés dans une base qui est située à une trentaine de kilomètres de la capitale, Ouagadougou. Si cet élément du dispositif devait être retiré précipitamment après le retrait antérieur du versant malien du dispositif Barkhane, ce serait en quelque sorte un nouvel épisode dans un feuilleton qui pourrait être intitulé le déclin inexorable et inéluctable de l’influence et de la présence française en Afrique subsaharienne.

Au fil des putschs, les liens avec la France se délitent. Est-ce une perte d’influence ?

On vient d’avoir quand même un cas d’école assez inédit, c’est-à-dire des putschs à double détente, d’abord au Mali en 2020-2021, puis maintenant au Burkina Faso, à huit mois d’intervalle. L’obsession légitime des populations africaines, à savoir une amélioration de la situation sécuritaire pour le moment, n’a pas trouvé sa réponse. Il y a un double paradoxe vis-à-vis de cette séquence. C’est quand même au moment où l’emprise de Paris sur ses ex-colonies africaines est la plus faible que le rejet s’avère le plus virulent.

On nous parle de pillage des ressources africaines. C’est effectivement un arriéré colonial qui n’a jamais été vraiment soldé. Mais aujourd’hui, le commerce extérieur et l’investissement français en Afrique représentent moins de 5%.

Vincent Hugeux

à franceinfo

L’essentiel de ces investissements étant dirigé vers des pays d’Afrique anglophones, donc hors du pré carré. Deuxième paradoxe encore plus insolite que le précédent, c’est que l’on se tourne vers la Russie du côté des fers de lance, des opinions locales amplement instrumentalisées par des acteurs locaux et étrangers, à un moment précis où l’armée de la Sainte-Russie essuie et enchaîne les cuisants revers sur le front ukrainien. On ne peut pas dire, j’en ai été le témoin sur le terrain, que cette fameuse force Wagner, ces mercenaires inféodés au Kremlin, aient fait preuve de beaucoup de bravoure dans la lutte contre les jihadistes. Ils ont davantage brillé dans la prédation et dans les exactions que dans le reflux de la menace des fous d’Allah.

La France n’a pas réussi à séduire la population burkinabée ?

Ce que j’ai pu mesurer au fil de mes reportages, c’est l’intense perplexité d’Africains qui vous disent : “Comment se fait-il que la cinquième ou sixième armée du monde, avec toute sa suprématie technologique, ses satellites, ses chasseurs soit incapables d’anéantir une bande de djihadistes?”. Alors, ce n’est pas si simple que ça parce que le jihadisme s’est beaucoup professionnalisé. Il oppose aux armes conventionnelles une conflictualité tout à fait inédite et nouvelle, avec une connaissance parfaite du terrain, des petits groupes isolés, etc.  Mais cela a créé le terreau propice à la diffusion de thèses absolument délirantes qui, notamment, imputent à la France non seulement une forme de mansuétude vis-à-vis des jihadistes, mais l’accusent d’avoir carrément armé, équipé et financé les tueurs d’aujourd’hui.

Source : Franceinfo
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