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Promotion féminine au Mali : un voyage dans l’histoire

L’histoire nous enseigne que depuis la nuit des temps, la femme occupe une place de choix dans la société malienne. En dépit des pesanteurs socioculturelles auxquels elle bute, la femme a toujours accompagné, conseillé et complété l’homme dans tous les secteurs d’activités ou presque de la société. Mais force est de constater que la problématique de la promotion des femmes dans les instances de décision a été et demeure d’actualité brûlante à travers le monde et au Mali où elle a toujours été une priorité des décideurs. Un clin d’œil sur l’histoire permet de bien cerner la question au Mali.

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Pendant l’empire du Mali, le pouvoir appartenait aux hommes et aux femmes car, à la conférence de Kurukan Fuga qui constitue une référence pour nous, 4 femmes ont siégé au présidium aux cotés des 12 rois de la savane.

Quant à la charte de Kurukan Fuga, elle stipule dans son article 16 que «les femmes, nos mères en plus de leurs occupations quotidiennes, doivent être associées à tous nos gouvernements».

Le premier gouvernement de l’empire du Mali comprenait 36 membres dont 18 hommes et 18 femmes. C’était un gouvernement de parité.

Aussi, l’Assemblée générale des hommes est souvent suspendue car la nuit porte conseil. En réalité, cela permet aux hommes de consulter les femmes (mère ou épouse). Ce que dit la barbe vient de la tresse (proverbe bambara).

Sur les  414 médaillés d’or de l’indépendance du Mali, 31 sont des femmes, ce qui atteste de la lutte héroïque qu’elles ont menées à côté des hommes. Une d’entre elles a su prendre sa place dans les instances de décision de son parti et devenir député. Il s’agit de Aoua Kéita.

Le Mali premier à signer les textes, dernier à les appliquer

Rappelons aussi que la loi sur la promotion du genre n’est pas un cas sans précédent en Afrique. Plusieurs Etats africains comme le Rwanda, le Burundi, le Kenya, l’Ouganda, la Tanzanie et la Somalie, signataires des instruments internationaux de défense et de promotion des droits des femmes susmentionnés, ont inscrit un quota dans leur constitution tandis que des pays comme le Burkina Faso, le Cap Vert, le Ghana, le Liberia et la Sierra Leone ont révisé leurs lois électorales et celles relatives aux partis politiques pour y inscrire le quota applicable aux hommes et aux femmes dans le souci de garantir la représentation d’au moins 30% de l’un ou de l’autre sexe. Quant au Sénégal, il a opté pour la parité. Ces mesures ont permis à ces pays d’accroitre, de manière significative, la représentativité des femmes au niveau de certaines instances décisionnelles, notamment le parlement.

Ainsi au Rwanda, l’introduction du quota a permis d’avoir le plus grand nombre de femmes parlementaires. Après les premières élections de 2003 qui ont suivi les reformes, ce pays comptait 48% de femmes à la chambre basse et 30% au Sénat. Cette représentation qui était déjà une performance a été portée après les élections de 2008 à 56% à la chambre basse et 34,6% au Sénat classant ce pays au premier rang mondial.

Au Niger, l’institution du quota a permis de passer d’une représentante à la législature précédente à 14 sur un total de 113 députés. Elle a aussi permis une entrée fulgurante des femmes dans les conseils municipaux lors des élections de juillet 2000. Sur 3.747 sièges à pourvoir, pour l’ensemble des 265 communes, les femmes en ont remporté 661 soit environ 17%.

Ces expériences montrent  qu’une politique volontariste, telle que celle proposée dans le projet de loi, est un moyen efficace pour permettre aux hommes et femmes d’accéder de manière plus significative aux fonctions nominatives et électives.

Aujourd’hui, il est important de signaler que les mesures particulières sont considérées comme le moyen le plus efficace pour parvenir à un accroissement graduel de la représentation et de la représentativité des femmes dans les instances décisionnelles.

Elles permettent de consolider la démocratie malienne en ce sens qu’elles contribuent à une gouvernance où toutes les composantes de la société jouent un rôle actif.

L’adoption de ce projet de loi permettra au Mali de respecter ses engagements internationaux auxquels il a souscrit sans réserves et de répondre ainsi à certaines observations formulées à l’endroit de notre pays par les Nations Unies en matière de gouvernance.

Elle contribuera à l’émergence de l’Afrique à l’horizon 2035 en ce qui concerne l’égalité des sexes et l’autonomisation de la femme et permettra de rehausser les indicateurs du développement humain durable.

Le gouvernement malien doit mieux faire pour la femme

Ces dernières années, les résultats  du gouvernement malien en matière de respect des droits des femmes sont mitigés et des mesures sont en train d’être prises pour inverser la tendance. La commission parlementaire de la promotion de la femme, de l’emploi, de la jeunesse et de la protection de l’enfant a largement fait l’état des lieux des femmes dans les instances de décision au Mali dans son rapport  de novembre 2015.

Selon ce rapport, au Mali, les femmes constituent 50.4% de la population totale. Elles sont très actives dans la vie économique et sociale du pays. Cependant, elles restent très peu représentées au niveau du gouvernement, dans les postes de décision de l’administration, à l’Assemblée nationale et dans les organes élus des collectivités.

Au niveau du gouvernement, la femme n’a fait son entrée, pour la première fois qu’en 1969. Aujourd’hui, plus de 40 ans après, (sur un total de 31 membres, le gouvernement ne compte que 4 femmes, soit 16%.) à revoir après le dernier remaniement où il y a 6 femmes sur 34 ministres. Cette sous-représentation de la femme est également visible dans plusieurs autres instances de décision malgré l’existence d’un grand nombre de femmes qualifiées et répertoriées, notamment dans le répertoire des femmes cadres du Mali, établi par le centre national de documentation et d’information sur la femme et l’enfant.

La représentation des femmes au niveau des postes électifs, interpelle tout autant, puisque le Mali est sur ce plan, dans une situation de régression. Si en 1997, 18 femmes ont pu être élues à  l’Assemblée nationale, c’est grâce à  l’application volontaire d’un quota de 30% de femmes aux listes présentées par le parti majoritaire aux élections législatives. Depuis 2002, on enregistre un recul.

En effet, cela fait maintenant deux législatures que le nombre de femmes parlementaires est en diminution : de 2002 – 2007 on dénombrait 15 femmes sur 147 députés et de 2014- 2019, il n’y a que 14 femmes sur 147 députés à l’Assemblée nationale, soit moins de 10%.

Par ailleurs, au niveau communal, les statistiques font état de 8 maires sur un total de 703. Sur les 10774 conseillers communaux, on ne compte que 927 femmes. De même les conseillers nationaux ne représentent que 6 femmes sur 73, soit également moins de 10%.

Dans l’environnement politique régional et mondial actuel, le Mali se place au 66e rang sur 97 pays classés pour la représentation des femmes dans le gouvernement et au 121e rang sur 145 pays classés au plan de la représentation dans le parlement (Source : Union Interparlementaire).

Cette sous-représentation des femmes dans les instances décisionnelles découle en grande partie des normes et pesanteurs socioculturelles qui cantonnent généralement les femmes dans la sphère familiale. La situation d’inégalité de genre ainsi décrite empêche les femmes de participer pleinement et efficacement au développement économique et à  l’équilibre sociopolitique du pays. Elle est en décalage avec la constitution qui, dans son article 2, stipule que «tous les hommes naissent et demeurent égaux en droits et en devoirs .Toute discrimination fondée sur l’origine sociale, la couleur, la langue, la race, le sexe, la religion et l’opinion politique est prohibée».

On constate une véritable asymétrie entre la faible représentation des femmes aux instances de décisions et les engagements pris par le Mali à travers plusieurs instruments internationaux de défense et de promotion des droits des femmes. Au nombre de ces engagements, on peut citer la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’ égard des femmes (Cedef) adoptée en 1979 et ratifiée par le Mali le 10 septembre1985 sans aucune réserve, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) et son protocole additionnel, la déclaration solennelle des chefs d’Etat et de gouvernement sur l’égalité des hommes et des femmes en Afrique, tous approuvés et ratifiés par le Mali. Tous ces textes engagent l’Etat à adopter des lois et à mettre en œuvre des mesures d’actions positives visant à garantir aux femmes une participation égale à celle des hommes à la vie politique et  publique.

Dans cette perspective, l’article 4-1 de la convention sur toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes précise que les mesures temporaires spéciales adoptées dans ce cadre et visant à accélérer l’instauration d’une égalité de fait entre les hommes et les femmes ne sont pas considérées comme des actes de discrimination.

Des engagements plus accrus sont mis à la charge des Etats par le protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits de la femme (protocole de Maputo), ratifié par le Mali le 13 janvier 2005 qui prévoit en son article 9 que les Etats assurent une représentation et une  participation accrue, significative et efficace des femmes à tous les niveaux de la prise de décisions et que les Etats entreprennent des actions positives spécifiques pour promouvoir la participation « paritaire » dans la vie politique de leur pays.

Il faut rappeler que ces différents instruments sont soutenus par la Constitution du 25 février 1992 qui fait référence à la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) et à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, et du reste, dans son préambule, proclame la détermination du Mali à défendre les droits de la femme et de l’enfant.

C’est pourquoi il est devenu nécessaire de prendre des mesures concrètes de nature à corriger rapidement la faible représentation des femmes dans les instances  décisionnelles par l’institution de mesures favorisant leur meilleure représentation.

L’initiative du  projet de loi,  s’inscrit dans ce cadre. Cette loi qui a été adoptée à l’Assemblée nationale et promulguée par Ibrahim Boubacar Kéita, propose exige une proportion d’au moins 30% pour toutes les nominations dans les institutions de la République ou dans les différentes catégories de services publics au Mali prononcées par décret, arrêté ou décision. La loi propose aussi un maximum de 70% de femmes ou d’hommes sur les listes de candidature de plus de 3 personnes pour l’élection des députés à l’Assemblée nationale, des membres du Haut conseil des collectivités ou des conseillers des collectivités territoriales.

Cette loi s’inscrit également dans la mise en œuvre de la politique nationale genre à travers son axe stratégique n°4, relatif à la mise à contribution des potentialités des femmes et des hommes dans le développement du pays par leur participation égale aux sphères de décisions.

Autres actes majeurs posés par le gouvernement

Créé en janvier 2012, le Fonds d’appui à l’autonomisation de la femme et à l’épanouissement de l’enfant (FAFE) a été officiellement lancé hier à Koulouba par le Premier ministre Modibo Kéïta en présence de plusieurs membres du gouvernement dont Mme Sangaré Oumou Bah, ministre de la Promotion de la femme, de l’fnfant et de la famille.

Le FAFE est un programme gouvernemental de renforcement de l’émergence des femmes et de promotion des droits de l’enfant à travers des actions diverses. Il est dédié au financement des programmes qui favorisent le renforcement des opportunités économiques des femmes et leur participation politique aux niveaux local et national.

Le FAFE est composé de trois guichets. Le premier guichet est dédié au financement des actions de développement de l’entrepreneuriat féminin afin de consolider la participation des femmes au développement. Le second s’occupe du volet de financement des actions de renforcement du leadership féminin et de la participation politique des femmes et le troisième guichet finance les actions de réinsertion socioéconomique des enfants en situation difficile.

Dans la même optique, le gouvernement du Mali a réalisé de nombreuses ‘’Maisons de la femme’’ à travers le pays. Ce programme a été lancé en 2007 par le président de la République, Amadou Toumani Touré. Gratuitement financé par la République populaire de Chine à hauteurs 4 milliards FCFA, ce programme a permis la réalisation de 10 Maisons de la femme, soit une dans chaque capitale régionale et deux à Bamako.  Cette politique se poursuit sous IBK lequel a procédé à la pose de premières pierres d’autres Maisons de la femme au niveau de certains cercles.

Malgré ces résultats, les femmes estiment que le gouvernement doit mieux faire, surtout en matière de l’accès des femmes aux exploitations agricoles, en matière la lutte contre l’excision et les violences conjugales qui ont fait, ces dernières années, de nombreuses victimes au sein de la gente féminine au Mali. Face aux violences conjugales qui ont pris du galon, les organisations féminines et de défense des droits de l’homme multiplient les marches et exigent du gouvernement la criminalisation de ces formes de violence.

M’Pè Berthé

Source: Delta News

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