La société souffre de la mévente de ses produits (craies et serpillières) et demande un coup de pouce aux autorités pour surmonter la pente
En ce début du mois de janvier, il était 14 heures passées et le temps était clément. Cependant, le sifflement des machines de production des meubles était assourdissant. Quelques ouvriers se donnaient un mal fou pour achever un meuble. En face du bâtiment abritant l’atelier de menuiserie, on y voyait un autre atelier où l’on produit des craies. Nous sommes à la Société de production des aveugles du Mali (SOPRAM). Créée en 1988, elle est chargée de l’emploi des aveugles et de la production de la craie, des serpillères et des meubles. Actuellement, cette société emploie environ 50 ouvriers. Mme Diakité Mariam Maiga, directrice générale de la (SOPRAM), affirme que cette année, la situation de sa société est stable puisqu’elle est à jour du paiement des salaires de ses employés.
«Nous ne devons aucune somme aux fournisseurs», s’est-elle réjouie. Une situation heureuse favorisée avec la présence du Premier ministre à l’inauguration de la salle d’informatique de l’Union malienne des aveugles en novembre 2018. En effet, Soumeylou Boubèye Maïga a demandé au ministère chargé des Finances d’acheter les boites de craie restantes de la SOPRAM. Almamy Gana, chef d’atelier de production de craie, se souvient: «à l’époque, il y avait 100.000 boites restantes d’une valeur de 64 millions de FCFA. Cela a causé un retard de paiement de salaires des employés. Il faut dira que les ouvriers ont passé 7 mois de galère».
Malgré tout, la SOPRAM souffre encore de la mévente de ses craies et serpillères. «Dans nos magasins, il y a beaucoup de stocks que nous n’arrivons pas à écouler. La quantité payée par le gouvernement est insuffisante», a affirmé la directrice générale, rappelant que depuis 2005, le ministère de l’Education nationale donnait à la SOPRAM un quota annuel de fourniture de craies d’une valeur d’environ 50 millions FCFA. Ce montant a été ensuite réduit à 24 millions. « De 2017 à nos jours, nous n’avons reçu aucune commande venant de ce ministère», a-t-elle regretté. Pour pallier cette situation de mévente, la directrice de la société propose que le gouvernement donne un quota à la SOPRAM sans qu’elle ne prenne part aux appels d’offres pour écouler ses produits. Mme Diakité Mariam Maiga a aussi invité les structures à suivre l’exemple de la mairie du District de Bamako qui est un fidèle partenaire. En effet, la commande de craies de la mairie centrale se chiffre annuellement à plus de 7 millions FCFA. Le chef d’atelier de production de craie explique que la SOPRAM produit plus de 150.000 boites de craie par an. Et présentement, il y a plus de 50.000 boites qui attendent encore preneur. Selon Almamy Gana, la SOPRAM est une opportunité pour les non voyants, mais avec tous ces problèmes la société risque d’aller en faillite. « Nous adressons cet appel particulièrement au président de la République afin qu’il nous aide. La SOPRAM est un espoir pour les jeunes non voyants qui ont besoin d’emplois. C’est une société qui appuie l’Union malienne des aveugles (UMAV) pour faire face aux dépenses de son internat qui héberge 203 élèves pensionnaires», a-t-il lancé. Pour ce qui est de la qualité des craies fabriquées par la SOPRAM, elle s’est nettement améliorée. Almamy Gana explique que les craies de mauvaisse qualité appartienne au passé. Selon lui, les moules offertes par la Chine ont permis d’améliorer considérablement la qualité des craies produites par sa société.
Lamine Dagnon, non voyant et chef de l’atelier de tissage, assis sur une chaise longue, nous a confié qu’il exerce ce travail depuis une dizaine d’années. « J’adore ce boulot grâce auquel je vis dignement. Je souhaite que les autorités nous appuient davantage afin que les jeunes non voyants cessent de mendier », dit-il. Le retard du paiement des salaires causé par le ralentissement de la vente des serpillières est un souvenir très amer que le jeune Dagnon ne veut plus revivre. « Les gens doivent comprendre que les missions de la SOPRAM consistent à faciliter l’insertion socio-professionnelle des jeunes non voyants », a t-il plaidé, avant d’exhorter la population et les autorités à les soutenir en vue de relever le défi d’insertion. Malick Togo travaille depuis 38 ans dans l’atelier de tissage. «Je me suis marié grâce à cette activité. Aujourd’hui mes enfants vont à l’école et d’autres travaillent», a confié Togo. Il a rappelé que l’implication du ministère de la Solidarité et de l’Action humanitaire pour l’octroi des marchés relevant des compétences de la SOPRAM et la mise à disposition d’un quota de 30 % du marché national en fourniture de craies sont des solutions proposées par les responsables pour assurer la survie de la société.
Mohamed D.
DIAWARA
Source: Essor