Le Parti Africain pour la Solidarité et la Justice n’en finira pas sitôt de gérer ses équations de la future présidentielle. En dépit de la décision désormais sans équivoque d’opter pour un candidat à l’interne, les modalités d’application de ce choix risquent de déclencher un nouvel enlisement et de plonger la Ruche dans un autre cycle de dissensions.
Lors d’une récente réunion sur la question, le Comité Exécutif, par une écrasante majorité et au bout d’une tragique polémique, finira par opter pour la formule longtemps plausible d’affronter la compétition de la présidentielle 2018 par un porte-étendard de la Ruche. Cette décision consacre en même temps la levée des ultimes équivoques ayant continué à alimenter les échauffourées entre adeptes et contempteurs de la candidature interne, bien après la retraite politique dédiée à la question.
Elle n’aura pas débouché, en revanche, sur l’épilogue définitif d’une équation qu’on a tenté de résoudre en semant les germes de nombreuses autres inconnues. En effet, en renvoyant l’éventail de choix du porte-drapeau à des qualificatifs restrictifs comme «rassembleur et consensuels», il n’est point exclu que la polémique resurgissent par la difficulté réelle à s’accorder sur une personnalité qui réunisse les qualités requises. Comme qui dirait que la formule retenue pour sortir de la zone de turbulence ne fait que différer le problème en faveur des adversaires de la candidature interne, pour autant qu’ils soient confortés par les incertitudes qui entourent la carte Dioncounda Traoré. L’ancien président des Abeilles demeure la seule figure répondant aux critères retenus sans doute pour épargner au parti une désignation de son candidat au moyen d’un périlleux choc des ambitions. Nonobstant, il continue de résister vaillamment aux sollicitations des différentes structures qui voient toutes en lui une inégalable carte maîtresse pour sortir glorieusement du dilemme suivant : comment ne pas disparaître du défaut de candidature propre ou de la désignation d’un candidat sans relief.
Quoi qu’il en soit, la tendance acquise par principe à la candidature du PASJ présidentielle dispose des coudées franches pour imposer un déclenchement du processus d’appel à candidature préconisé par les dispositions statutaires. Il n’en demeure pas moins, toutefois, qu’une telle démarche pourrait se heurter à des obstacles autres que la forclusion sur le délai statuaire d’ouverture des candidatures, soit un an au moins avant la présidentielle. S’y ajoute en outre la difficulté voire l’impossibilité de se conformer aux textes en la matière, une brèche largement ouverte pour qui veut priver le PASJ de candidat. Et pour cause, selon les dispositions de l’article 64, le choix puis l’investiture du candidat Adema à la présidentielle doivent être précédés par certaines étapes électives obligatoires pour tout prétendant au statut de porte-étendard. Ce dernier est tenu, en effet, sous peine d’éventuelle invalidation par le Comité Exécutif, “d’obtenir le parrainage de son Assemblée générale de Comité, de sa Conférence de sous-section et de sa Conférence de section”. Ce n’est pas tout. Selon les mêmes dispositions, le candidat à la candidature devra en outre jouir du parrainage de la majorité simple des sections de sa région ainsi que d’au moins une section dans les les 2/3 des régions administratives du pays. Comme on le voit, les jalons de la candidature consensuelle sont avant tout statutaires d’autant qu’ils reposent sur le socle de la dimension territoriale du postulant. C’est probablement la raison pour laquelle aucune des candidatures déclarées ne réunit pour l’heure les exigences statutaires en vigueur depuis le dernier congrès du PASJ. Qu’il s’agisse de Dramane Dembelé ou du novice KalfaSanogo, aucun ne pourra lever, dans le temps imparti, le défi de la conformité statutaire de sa candidature et éviter le risque de son invalidation.
Il n’est donc pas exclu que l’infructuosité de l’appel à la candidature interne devienne le nouveau champ de la bataille entre les deux tendances inconciliables de l’Adema-Pasj. Les Abeilles semblent plutôt bien parties pour le début d’une autre polémique sans issue au lieu de la désignation du candidat interne tant annoncé.
A Keïta
«Le débat sur une candidature éventuelle de l’Adema n’est pas une démarcation», a confié Tiémoko Sangaré en accueillant Soumeylou B. Maïga au siège du PASJ
Il s’agissait d’une visite au pas de charge effectuée par le nouveau Premier ministre, SBM, visiblement pour rectifier une erreur de casting à sa prise de fonction. En effet, à la différence du Rpm, la locomotive de la Majorité présidentielle, l’Adema, son premier wagon, n’avait point bénéficié du privilège de recevoir le chef du Gouvernement au lendemain de sa nomination. Un détail qui, pour certains, aura peut-être contribué à désarçonner la tendance Ademiste acquise à une candidature commune de la majorité présidentielle. Et il ne paraissait guère trop tard, en dépit d’avoir déjà tranché la question de la candidature interne, de faire un appel du pied à l’Adema par une visite du Premier ministre, quoiqu’il ait annoncé les couleurs de ses intentions par des mises en garde sur l’impossibilité de cheminer avec des potentiels concurrents à la présidentielle 2018. Mais le malaise consécutif à la récente rencontre du Premier Ministre avec la CMP ne semble pas avoir déteint outre mesure sur la chaleur de son accueil, vendredi, au siège du Pasj où SoumeylouBoubèyeMaiga rencontrait les membres du CE. Les échanges, selon la restitution qu’en a fait le président du Pasj et membre du Gouvernement, Tiémoko Sangaré, ont essentiellement porté sur les différents chantiers qui polarise l’action gouvernementale et les attentes de la classe politique, à savoir : la situation sécuritaire du pays, les préparatifs des élections ainsi que les besoins fondamentaux et quotidiens de la population. «Étant entendu que l’Adema en tant que membre de la majorité présidentielle et siégeant au gouvernement est engagé dans l’action gouvernementale conformément à la décision du 23 Août d’accompagner le président de la République pendant son mandat, il était important que le Premier ministre viennent échanger et informer la direction sur les grands axes de ce qui est prévu par le gouvernement comme solution aux préoccupations majeures de l’heure», a le président de l’Adema-Pasj au sortir des échanges entre son parti et le chef du Gouvernement. Et le Pr Tiémoko Sangaré d’assurer que le Premier ministre a apaisé les inquiétudes quant à la faisabilité des élections et au respect des délais impératifs de la présidentielle. Si les dispositions annoncées étalaient mise en œuvre, a-t-il laissé entendre, permettront d’avoir des «élections crédibles, transparentes et inclusives», à date et dans les meilleures conditions. Quid de l’épineuse question de la cohabitation au sein de la majorité présidentielle avec un parti qui se distingue par sa démarcation de la dynamique de réélection du président sortant ? Le président des Abeilles soutient que «le débat sur une candidature éventuelle ne devrait pas être perçu comme une démarcation par rapport à une option politique fondamentale». Du reste, explique M. Sangaré, il n’a jamais été question de démarcation puisque dans l’entendement de l’Adema, une majorité se fonde sur un certain nombre de valeurs. «C’est l’adhésion où la non adhésion à ces valeurs qui pourrait indiquer la démarcation d’un parti ou d’un autre de cette majorité». Seulement voilà : il est évident que son interlocuteur ne le perçoit pas de la même façon. En plus de s’être prononcé sur la question avec une position clairement différente – lors de sa récente rencontre avec les partis de la majorité présidentielle, le Premier Ministre Soumeylou B Maiga au sortir des échanges du vendredi avec son ancien parti, est revenu sur la question en affichant sa posture pratiquement inchangée. «Nous ferons tout pour que l’action gouvernementale puisse se faire dans un cadre mutuel, solidaire et avec une équipe soudée en vue de préparer les échéances à venir», a confié le Premier Ministre ASMA, en laissant entendre par ailleurs que chaque entité constitutive de la majorité peut évoluer à son rythme de décision et de réflexion mais sans préjudice pour l’efficacité de l’action gouvernementale». «Je t’aime moi non plus», peut-on résumer, en attendant la levée de toute équivoque sur la question par un remaniement de plus en plus plausible.
A Keïta
Par Le Confident