Dans une déclaration, hier, à la Primature, Moussa Mara a rassuré la majorité présidentielle en lui tendant la main. Première du genre depuis sa nomination, cette déclaration pourra-t-elle calmer les ardeurs du parti majoritaire qui l’avait reçu avec méfiance lors de la cérémonie d’ouverture de la première session ordinaire de l’Assemblée nationale, le 7 avril 2014 ? Aussi, le chef du gouvernement a, lors ladite déclaration, levé un coin de voile sur ses orientations, à savoir le renforcement des institutions, la sécurité, la réconciliation nationale et le développement social, entre autres. Nous vous proposons l’intégralité de cette déclaration.
«Au moment où je prends mes fonctions, afin de poser un certain nombre de jalons relatifs aux missions, à l’état d’esprit dans lequel le gouvernement va évoluer, au socle sur lesquels nous comptons nous poser pour travailler et à la méthode d’action du gouvernement. D’abord au préalable, vous me permettrez de remercier sincèrement le chef de l’Etat, Son Excellence Ibrahim Boubacar Kéita, pour la confiance placée en ma personne, et pour l’honneur qu’il me fait en me confiant la responsabilité de conduire l’action du gouvernement en ce moment difficile pour notre pays. Remerciement aussi à mon prédécesseur, Oumar Tatam Ly, pour l’action déjà engagée, pour les actes déjà posés, avec un sens de l’engagement que j’ai pu mesurer à la hauteur de son patriotisme et de sa volonté du changement dans notre pays. Lui souhaiter le meilleur pour le futur (j’ai eu l’occasion de le lui dire tout à l’heure).
Le chef de l’Etat nous a confié la responsabilité de mener la mission, de conduire l’action du gouvernement conformément à ses orientations. Orientations qui ont été approuvées massivement par nos compatriotes, à l’occasion de l’élection présidentielle passée. Ces orientations sont de six ordres. En premier lieu, la restauration et le renforcement de nos institutions. Vous n’avez pas de pays sans institutions, vous n’avez pas de République sans institutions ; renforcer la gouvernance des services publics ; améliorer les rapports entre les citoyens et l’Etat et de faire en sorte que notre Etat puisse être grandement restauré, sur l’ensemble de notre territoire. Le second axe porte sur la sécurité. La sécurité de l’ensemble des Maliens où ils se trouvent et sur l’ensemble du territoire national. Ensuite la réconciliation nationale. Il nous faut recoudre le tissu social qui a été particulièrement traumatisé par les problèmes des années précédentes : faire en sorte que les Maliens puissent, main dans la main, continuer de nouveau à croire en notre pays et s’employer de nouveau à ce que notre pays puisse avancer. Vous avez après l’école qui conditionne notre avenir, mais qui détermine aussi notre présent et notre place dans le concert des nations.
Redresser l’école, c’est faire en sorte que ses produits puissent permettre à notre pays sa marche en avant. L’économie, créer les conditions d’un développement économique significatif qui puisse se traduire par une réduction forte de la pauvreté dans notre pays. Et en même temps que les fruits de cette prospérité puissent être équitablement repartis. Qu’on fasse en sorte que le coût de la vie, en particulier dans nos villes, soit supportable et que le panier de la ménagère soit amélioré comme on a l’habitude de le dire. Vous avez enfin le développement social : faire en sorte que les services de base (éducation, santé, eau, électricité, logement) puissent être appréciés par le plus grand nombre de la population et que les plus faibles de notre société puissent être sécurisés. Ce développement social constitue l’un des axes majeurs des orientations que le chef de l’Etat nous a fixées pour conduire l’action du gouvernement. Cette mission, nous allons la mener avec un état d’esprit de loyauté envers le chef de l’Etat. Nous n’oublions pas que c’est le président de la République qui est choisi par les Maliens. Le gouvernement constitue son instrument d’action, et ne saurait exister, un membre du gouvernement ne saurait travailler s’il n’est pas loyal au chef de l’Etat et à ses idéaux. Nous conduirons l’action du gouvernement avec l’esprit de solidarité entre Maliens. Il ne peut y avoir un gouvernement sans une équipe. Une équipe, c’est tous unis dans une même direction, avec la volonté de réussir ensemble. Une équipe, ce n’est pas des individualités. Nous allons animer le gouvernement avec l’état d’esprit d’intégrité absolue de ses membres. Nous ne pouvons plus nous permettre, dans notre pays, que la responsabilité publique soit considérée comme un ascenseur socio-économique, que le responsable public ne soit plus au-dessus de tout soupçon. Nous allons veiller à ce que l’intégrité absolue des membres du gouvernement soit concertée. Nous allons aussi mener cette mission avec l’état d’esprit de récompense du mérite, de la culture de sanction.
L’action publique ne peut fonctionner sans que le mérite soit toujours reconnu, sans que les fautes ne soient sanctionnées. La sanction est aussi pédagogique que la récompense du mérite. Nous allons, enfin, mener l’action du gouvernement avec l’état d’esprit et d’équité entre les citoyens, quelque soit notre position sociale, notre genre, nos croyances. Que l’administration reste neutre et impartiale vis-à-vis de tous. C’est dans l’équité que nous allons amener les Maliens à croire de nouveau à l’Etat et à son fonctionnement. Pour que cette mission soit couronnée de succès, il est indispensable que le gouvernement se fonde sur un socle. Et le socle sur lequel nous allons nous fonder, c’est la majorité présidentielle. Nous allons nous employer très rapidement à faire en sorte que la majorité présidentielle et l’Exécutif travaillent main dans la main. Que cette majorité ait un contenu politique. Elle est diverse, elle est variée et c’est ce qui fait sa richesse. Cette majorité sera centrale dans nos fonctions. Il ne peut pas avoir de gouvernement en dehors de la politique.
Le second socle sur lequel nous allons nous fonder, c’est la société malienne. Nous allons faire en sorte qu’entre l’Exécutif et la société civile, nos leaders traditionnels, religieux, sociaux, qu’il n’y ait pas de méfiance. Maintenant, l’action publique est aussi une question de méthode. On peut employer les meilleures énergies pour mener la cause à bien. Mais si on ne le fait pas avec les textes, cela risque d’être imperceptible. Notre action risquerait de se diluer dans l’indifférence et dans l’incompréhension. D’abord, nous allons avoir à cœur le résultat. Rien que le résultat. Le résultat, non pas en terme de réalisation, mais le résultat en terme du bien-être des Maliens. Et l’Etat n’a d’autre fondement, d’autre justification que la satisfaction des attentes des citoyens. Donc, nous devons être attentifs, et nous le serons, à ce que toute action que nous poserons soit mesurée à son impact sur le bien-être des Maliens. C’est pour ce faire, que très rapidement nous allons reconfigurer le programme d’action gouvernementale 2013-2018 pour l’axer davantage sur l’impact du bien-être des Maliens, le décliner à court, moyen et long terme et communiquer sur nos objectifs, pour ensuite communiquer sur nos résultats. Et nous comptons sur vous, hommes et femmes de la presse, pour relayer et faire en sorte que ces informations soient sues par le maximum de nos compatriotes. La méthode, c’est aussi la rapidité de la machine administrative.
La lourdeur, l’indifférence ne seront plus permises. Nous allons faire en sorte que l’administration soit véritablement au service des usagers et que la réactivité, avec laquelle nous répondons aux attentes de nos compatriotes, soit aussi un élément du changement que nous comptons apporter à l’action du gouvernement. La méthode, c’est une constance dans l’action, une constance dans l’implication, une constance dans l’écoute vis-à-vis de nos compatriotes. L’impulsion que nous entendons donner à cette action gouvernementale se traduira essentiellement par ces différentes méthodes, par notre volonté à nous baser sur ce socle, par notre ambition de travailler dans cet état d’esprit pour que les missions que le chef de l’Etat nous a confiées puissent être menées à bien. Je vais terminer en lançant un appel à nos compatriotes. Vous l’avez compris, s’il y a un dénominateur commun ou un point qui revient régulièrement dans mon discours, c’est la volonté de satisfaire le Malien. Le Malien, à qui je m’adresse solennellement ce matin [Ndlr : hier], doit aussi savoir que la réussite du Mali dépend de lui, des autorités certes, mais du citoyen. Nous demandons à l’ensemble de nos compatriotes, en cette période difficile pour notre pays, que chacun mesure sa responsabilité, s’engage à travailler avec l’Etat, respecter les règles, payer ses impôts et s’impliquer dans le fonctionnement de l’administration publique, pour qu’ensemble nous sortions notre pays de la crise et, Inch’Allah, nous y arriverons ».
Transcrit par Rokia DIABATE et Ibrahim N’DIAYE