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Paris-Bamako : Rupture sans surprise

L’actualité diplomatique entre le Mali et la France avait atteint son paroxysme. Depuis des mois, les autorités maliennes avaient affiché une posture assez radicale vis-à-vis de son premier partenaire militaire dans la lutte contre le terrorisme avec le choix de diversifier son partenariat militaire. Cela s’est conclu par l’annonce de Paris, du retrait de l’opération Barkhane et de Takuba sur le sol malien. Pour autant, la France ne se retire pas du Sahel et ce nouveau redéploiement se fera au Niger et s’étendra dans les pays du golfe de Guinée.

 

Après 9 années d’engagement des forces militaires françaises contre le terrorisme au Mali et plus particulièrement au Sahel, le péril djihadiste sévit toujours. Même si Paris récuse le terme d’échec, le résultat de cette présence est mitigé. L’opération Serval déclenchée en janvier 2013 avait réussi à stopper l’avancée des groupes terroristes vers le sud du Mali et la reconquête des grandes villes du nord.  A partir de Juillet 2014, la France s’est engagée dans la lutte contre le terrorisme dans toute la région du Sahel avec l’opération Barkhane.

Au regard du caractère évolutif du conflit avec la reconfiguration des groupes armés terroristes notamment la création du GSIM (groupes de soutien à l’islam et aux musulmans), un hub de groupes terroristes affiliés à Al Qaeda et l’EIGS (État islamique au Grand Sahara) affilié à l’EI (État islamique), cette opération n’a pas obtenu les résultats escomptés. Même si des succès ont été enregistrés avec la neutralisation de certains chefs terroristes, l’on se rend compte que le péril djihadiste s’est métastasé dans le Sahel et s’est étendu dans le golfe de Guinée.

L’approche internationale du conflit qui se résume au tout militaire est un échec, car les causes structurelles du conflit demeurent. Cela a créé une suspicion au sein d’une partie de l’opinion publique, qui réclamait même le départ de Barkhane. Bien qu’officiellement le gouvernement malien n’a jamais demandé le départ de la France. La rupture semblait inévitable au regard de l’actualité diplomatique entre les deux pays et du choix stratégique des autorités de la transition. Dans une conférence de presse, en marge du sommet UE-UA, le Président français Emmanuel Macron a affirmé le retrait des opérations Barkhane et Takuba du Mali, dans un délai de 4 à 6 mois. Les autorités maliennes de transition n’ont pas tardé à réagir par voie de communiqué lu par son porte-parole, le colonel Abdoulaye Maïga, à propos de cette décision qu’elles jugent d’ « unilatérale » et qui serait un manquement aux accords de défense qui lient les deux pays. Elles invitent par ailleurs les autorités françaises à retirer sans délai les forces française et européenne du Mali.

Nouveau schéma sécuritaire au Sahel plein d’incertitudes

Vu les moyens logistiques dont disposent les militaires français et européens sur le terrain, le désengagement immédiat serait complexe. Ce retrait redessiné un nouveau schéma sécuritaire au Sahel plein d’incertitudes, qui ne sera pas sans conséquence dans la coordination des opérations des différentes armées, au sein de la force conjointe du G5 Sahel. Le retrait des forces étrangères s’étend pour le moment aux Européens présents au sein de la Minusma, mais entraînera à coup sûr un changement du dispositif de la Minusma, qui bénéficie d’un appui logistique de la part de Barkhane.

Il est difficile pour l’heure de mesurer véritablement l’ampleur. Cela pourrait également être une opportunité pour le gouvernement malien d’engager des pourparlers avec les groupes terroristes qui avaient au préalable exigé le départ des forces étrangères du Mali. Des pourparlers dont la France s’est toujours opposée. L’impopularité dont jouit Barkhane pourrait créer une hostilité des populations vis-à-vis des gouvernants dans un contexte de déliquescence des États sahéliens et côtiers engagés dans la lutte contre le terrorisme.

Le gouvernement nigérien quant à lui passera par un vote à l’Assemblée nationale sur cette question assez sensible d’abriter les opérations Barkhane et Takuba.

 

Bah Traoré

Source : Mali Tribune

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