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Ousmane Samaké, écrivain : « Le chemin du développement de l’Afrique passe par la valorisation de nos cultures »

Le Lieutenant-Colonel Sapeur-pompier, Chef de Division des Études à la Direction générale de la Protection civile du Mali, Expert préventionniste en Sécurité, auteur-compositeur-interprète et écrivain, Ousmane Samaké vient de mettre à la disposition des amateurs du livre, un roman-conte. Un ouvrage original du point de vue contenu que genre. Dans cette première œuvre, plusieurs thématiques s’y retrouvent, notamment le développement de l’Afrique, la valorisation des cultures, le changement climatique, etc. Pour mieux comprendre ce livre, nous avons eu un entretien avec son auteur.

Le Pays : pourquoi le titre « L’Aventure mystérieuse de Fagnouma » ?

Ousmane Samaké : « L’Aventure mystérieuse de Fagnouma » est le récit d’un jeune homme ambitieux, Fagnouma qui part en aventure. Une foudre de malédiction tombe sur son village « N’KOLA ». Face à cette situation, FAGNOUMA part en « aventure » pour montrer sa bravoure. Il part à la recherche du bonheur perdu. Il est prêt à tous les sacrifices, pourvu que sa famille soit heureuse. Il s’expose à toutes sortes de danger pour donner à sa famille, le meilleur de lui-même. Il court le risque de l’aventure pour découvrir les miracles.

Mais quelle était la cause de toutes ces misères à N’KOLA ? FAGNOUMA peut-il rendre sa famille heureuse, pourvu que le village coure un grand sort ? Sa route était-elle longue, délicate et escarpée ?

C’est à travers « L’aventure mystérieuse de FAGNOUMA » que je réponds à toutes ces interrogations. Les rebondissements de FAGNOUMA sont nombreux, les obstacles rencontrés l’obligent à faire preuve d’audace, de courage, de ruse et de réussite.

Vous revendiquez un nouveau genre littéraire, le roman-conte. Pourriez-vous nous expliquer ce nouveau concept ?

Le Roman-Conte est la seconde partie de mon ouvrage. Comme vous le savez, dans cet ouvrage, j’ai fusionné deux genres littéraires : le Roman et le Conte. J’aime toujours faire autrement, amener du nouveau. L’écriture est un art et un art est un talent, une création, un style. Rien ne m’oblige à écrire comme les aînés ou comme l’autre au bout du monde, j’ai ma propre nature et mes écrits sont le fruit de ma propre personnalité qui est unique.

Au lieu de raconter les contes successivement, 1 : il était une fois… ; 2 : il y a très, très longtemps… ; mais pourquoi ne pas recréer l’atmosphère d’une époque qui a tendance à disparaitre, sous nos plumes ? C’est pourquoi, j’ai eu l’idée de toucher le cœur des vieux, que l’actuel ouvrage va leur rappeler leur enfance, tout en véhiculant un message, en suggérant une bonne conduite aux enfants.

J’ai eu l’habitude de lire dans les livres français : Roman autobiographique, Roman historique, Roman policier… mais je n’ai vu dans aucun texte littéraire « Roman-conte », car le roman est un genre littéraire à part, tout comme le conte ; mais cela ne pose pas de problème, car, on entend par « Roman-conte », un récit imaginaire, qui met en scène les personnages, dont un personnage fictif qui, arrivé au terme de la sagesse, raconte les « NZIRIS », pas aux lecteurs, mais aux personnages du roman.

C’est pourquoi ce nouveau genre s’appelle le « Roman-conte » et doit exalter les écrivains à sa pratique et à safréquentation.

Vous pensez que « l’Afrique est une grande forêt qui manque d’entretien ». Pourriez-vous nous expliquer ce passage ? 

Oui, l’Afrique est une grande forêt qui manque d’entretien parce que jusqu’à présent, l’Afrique reste le continent le plus pauvre de la planète, mais très riche en ressources naturelles, minérales et énergiques. Le continent africain regorge de toutes sortes de richesses. Nous avons de l’or, du diamant, de l’uranium, du phosphore, du pétrole, du charbon, du coton, du cacao, du gaz, etc.  Ce continent est le premier fournisseur des pays européens et asiatiques en matières premières. Mais pourquoi nous restons toujours pauvres ? Pour que l’Afrique puisse se développer, je pense que nous devons, d’abord, nous unir comme font les autres continents, tout commence par l’union. Nous devons nous accepter, nous-mêmes. Je veux dire par là qu’on doit valoriser nos propres cultures et coutumes, en mettant en valeurs nos propres produits. Aucun pays ou aucun continent ne peut se développer sans ses propres valeurs. La preuve en est que quand un colonisateur vient pour coloniser une terre, la première des choses, c’est d’imposer sa langue. Et c’est pourquoi certains pays, jusque-là, conscients de la force, de la puissance de la langue, organisent chaque année « La journée internationale de leur langue ». Ce qui me fait rappeler de l’histoire de la Tour de Babel.

L’Afrique a participé au développement des autres continents activement, en passant par l’esclavage, la colonisation, les coopérations, mais je doute fort si ces continents vont faire un retour, un jour, pour que l’Afrique puisse se développer. Ces continents nous donnent à manger du poison et non nous apprendre à pêcher. Nous devons nous organiser, développer notre propre géopolitique, non de mettre du feu à nos pays à chaque fois.

Un adage Bambara dit : « aidez-moi à tuer ce lion, cela doit trouver que la tête de ce lion est entre tes propres jambes »’ l’Afrique ne se développera jamais tant que les Africains, eux-mêmes, ne s’impliquent pas.

L’Afrique n’a besoin de personne pour se développer. Nous comptons sur l’aide des autres depuis que nous avons eu notre indépendance, mais jusqu’à présent aucun chemin de développement. L’Afrique a déjà tout. Toutefois elle a un problème d’hommes, de ressources humaines. La preuve en est que le plus riche de tous les temps était un Africain, plus précisément un Malien, l’empereur Kankou Moussa. Il fallait juste, encore, des grands hommes comme Thomas Sankara, Mouammar Kadhafi, Patrice Lumumba, etc. Mais hélas l’Afrique s’est trahie, elle-même, et a enterré ses meilleurs fils.

Contrairement à Amadou Hampaté Ba qui compare un vieillard à une bibliothèque, vous, vous le comparez à une académie. S’agit-il là d’une critique contre Hampaté Bâ ou un simple prolongement de sa pensée ?

Loin d’être une critique… C’est à partir de l’idée de la citation de Amadou Hampâté Bâ que j’ai comparé, moi aussi, un vieillard africain à une Académie. C’est juste une manière de donner plus raison à Hampâté Bâ, de justifier son proverbe, en donnant plus de qualifications aux vieillards africains. Comme vous le savez, une bibliothèque est un local ou un édifice destiné à recevoir une collection de livres ou de documents qui peuvent être empruntés ou consultés sur place. Par contre une académie est une société savante dont les membres se consacrent à une spécialité des lettres, des arts, des sciences, etc.

Cette citation de Amadou Hampâté Bâ m’a beaucoup marqué depuis l’enfance, c’est pour cela que je ne pouvais pas écrire un livre sans rendre hommage à ce grand homme à travers sa citation.

À travers ce roman-conte, pourquoi avez-vous décidé de bambariser le français ?

C’est l’amour de ma culture qui m’a motivé, inspiré, à bambariser le français et à écrire les valeurs maliennes tout au long de mon livre. J’aime ma culture, je suis un Africain, un Malien Bambara ; jamais de la vie, je ne peux être une autre personne si ce n’est pas un descendant de « Djitoumou Balla » qui était un grand connaisseur de la tradition africaine. Je veux être authentique dans mes écrits. Je suis un bambara, je pense en bambara, je dors en tant qu’un bambara et le matin quand je me réveille, je salue mes parents dans la langue bambara « ’AW NI SOGOMA N’FA… N’BA… »’ Bonjour papa et maman.

C’est en pensant dans ma langue maternelle que je suis arrivé à écrire cet ouvrage. Ce qui justifie même cette innovation dans mon livre « La Bambarisation du Français »

Pour moi le chemin du développement de l’Afrique passe par la valorisation de nos cultures, c’est le seul moyen. Et cette culture passe par nos langues maternelles. Valorisons, industrialisons la culture malienne si nous voulons que le Mali se développe un jour.

La Bambarisation est un concept, une vision, un style d’écriture dans la langue française qui vise à valoriser la culture, les us et mœurs maliennes. C’est la transcription du Bambara en Français. Dans l’annexe de mon livre, j’ai donné la signification, la traduction de tous les mots et expressions Bambara dont j’ai employé dans ce livre.

Vous abordez également la question du changement climatique dans votre ouvrage. Comment expliquez-vous ce phénomène ?

Le changement climatique est un thème d’actualité qui préoccupe le monde entier, nul n’est à l’abri de ce phénomène. La sécheresse, les inondations, les vents violents… sont les méfaits du changement climatique. Nous devons protéger l’environnement, vivre en parfaite harmonie avec la nature si nous voulons notre propre survie sur la terre. Dans mon livre, ce sont les conséquences du changement climatique qui ont motivé Fagnouma à quitter sa famille pour aller chercher son pain quotidien. Quand la sécheresse tombe sur son village, les saisons étaient si difficiles. Les villageois n’arrivaient même plus à avoir les deux repas de la journée. La famine s’accentuait jusqu’à ce que la femme de Fagnouma remplisse la tasse du repas avec de l’eau pour camoufler l’absence de vivres. Les enfants maigrissaient de jour en jour, tout comme les personnes âgées. Chaque jour, Fagnouma partait à la chasse pour que sa famille ne meure pas de faim. Mais il ne voyait même pas une mouche à plus forte raison des animaux. Car les animaux, eux aussi aiment un lieu de rafraîchissement. Les villageois ont coupé tous les arbres de la forêt, c’est la désertification. Et toujours est-il que c’est la misère dans le village et chacun cherchait sa peau.

Réalisée par Fousseni Togola

Source: Journal le Pays- Mali

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