S’ils ont en commun d’être des adeptes de l’Imam Mahmoud DICKO, l’imam Oumarou DIARRA et Issa Kaou N’DJIM sont tout de même divergents sur plusieurs points. C’est ce qui explique en grande partie leur désamour après le coup d’Etat contre le régime du Président Ibrahim Boubacar KEITA.
Pour renforcer la bonne gouvernance, devenir le rempart contre la corruption, le favoritisme, le népotisme, des fidèles de l’Imam Mahmoud DICKO se sont regroupés au sein de la CMAS. Leur lutte de plusieurs mois a été auréolée par le départ de l’ancien Président de la République suite à l’intervention dans la journée du 18 août de l’Armée. Après ce coup d’Etat, 2e sous l’ère démocratique en seulement trente ans de pratique, la cohésion au sein de la CMAS a été fragilisée par des prises de positions non concertées. Conséquence : l’Imam DIARRA et Issa Kaou N’DJIM, deux hommes forts de Mahmoud DICKO, se défeient. Alors où se trouve le problème ?
Les contestations et les divergences poussent l’Imam DIARRA à claquer la porte de la CMAS pour aller créer son mouvement citoyen dénommé Mouvement pour la patrie et la justice (MPJ). Dans sa ligne de conduite, il dit rester fidèle à l’Imam DICKO, mais pas dans le cadre du MPJ. Car, son mouvement n’est pas affilié à un individu. « Le mouvement n’est dédié ni au Chérif de Nioro ni à l’Imam DICKO ni au Chérif du Banconi, mais incarne l’espoir de tous ceux qui aspirent au changement », a-t-il précisé.
Tandis que Issa Kaou N’DJIM pense que la fidélité à l’Imam se fait dans le cadre de la CMAS de l’Imam, en dehors c’est la politique. « La CMAS s’identifie à lui et c’est lui la référence de la CMAS. Ce que dit l’Imam, c’est ça la position officielle de la CMAS. Quand bien même je vous dis quelque chose : tous ceux qui sont à la CMAS tirent leur légitimité de l’Imam DICKO. Parce qu’on dit les mouvements qui se réclament de DICKO, les associations qui se réclament de DICKO, les sympathisants qui se réclament de DICKO », a déclaré Issa Kaou N’DJIM.
Pour les questions politiques, le sujet est géré ailleurs. L’Imam DICKO est un religieux et sa vision politique est différente de celle des politiques qui cherchent à conquérir et à gérer le pouvoir.
S’agissant de leur parcours au sein du M5, si Issa Kaou N’DJIM a pris ses distances d’avec le mouvement de contestation, tel n’est pas le cas de Oumarou DIARRA. Pour ce dernier, il n’est pas question de quitter le navire. Il estime que la fidélité à la mémoire des victimes et aux idéaux du M5 doit être un devoir de loyauté. Ainsi, il reste avec et derrière le M5 jusqu’à la fin du combat. Aussi, pour lui, il est temps que la politique s’inspire de nos valeurs. « Le respect de la parole donnée doit être une vertu sacrée en politique comme le recommandent nos valeurs», a-t-il soutenu.
Quant à Issa Kaou N’DJIM, il estime que la Mission du M5 n’était que de faire partir IBK. Maintenant que cette mission a été accomplie, c’est désormais c’est chacun pour soi et Dieu pour tous. Il défend sa position en rappelant que les politiques du M5-RFP sont en grande partie responsables des maux du pays. Selon lui, ils sont les fossoyeurs de la démocratie. « Tous les problèmes du Mali sont les hommes politiques de 1991. Ils pensent avoir le monopole de la démocratie, or c’est faux », avait déclaré le Coordinateur de la CMAS. A cet égard, il soutient ne plus collaborer avec certains membres du M5. Dans sa démarche, il prend la décision d’interdire toute activité du M5 au sein de la CMAS qui était transformée en QG pendant les heures bouillantes de la contestation contre le régime du Président IBK.
L’un point de discorde réside dans le soutien à la Transition. Sur ce point, Oumarou DIARRA pense que la Transition est leur bébé, mais s’oppose à sa confiscation et à sa militarisation. Lui tout comme de milliers de Maliens estime que les militaires ont parachevé la lutte populaire du M5-RFP. A cet effet, la gestion de la transition ne peut pas exclure les responsables du M5 qui ont risqué leur vie pour braver le régime déchu. C’est pourquoi, lors des concertations, il s’est battu et exigé que la transition soit civile, conformément aux engagements pris par la junte dans sa première déclaration. Pour lui, la meilleure façon de défendre la Transition, c’est dans la constance du M5 à travers une dynamique inclusive et non celle exclusive des militaires.
Pour sa part, Issa Kaou N’DJIM et des alliés de la CMAS pensent que soutenir la Transition c’est soutenir les militaires et garantir leur bifteck. C’est pourquoi, contrairement à la position du M5, il n’a cessé de plaider en faveur du choix des militaires pour diriger la Transition. Au motif que l’essentiel des problèmes maliens incombe à l’incapacité et à l’amateurisme des hommes politiques à gérer le pays. Ainsi, selon lui, la meilleure manière de défendre la Transition c’est défendre les militaires au détriment des politiciens corrompus qui ont pillé et mis à genoux le pays.
Les positions entre les deux hommes sont devenues antagonistes avec le débat sur la mise en place du Conseil national de la Transition (CNT). Contrairement à la ligne du M5, l’Imam Oumarou DIARRA a déploré la démarche solitaire du Président Bah N’DAW en fixant la clé de répartition et le mode de désignation des membres du CNT. En la forme, sans une concertation élargie à des acteurs, le jeune religieux, il n’est pas disposé à être membre dudit Organe. Mais, à la surprise générale, son nom figurait parmi les personnes retenues par le Vice-Président Assimi GOITA pour siéger au CNT.
Pour se défendre, il publie sur sa page Facebook qu’il n’a pas déposé de dossier, qu’il n’acceptera de poste que dans le cadre du M5. Or, le M5 dit qu’il n’est pas dans le CNT. Mais, après des déclarations de l’Imam Diarra vont semer le doute en affirmant qu’il va réfléchir s’il doit siéger dans le CNT, finalement, il va y siéger en donnant même son mandat à DIAW pour l’élection du Président du CNT parce que, dit-il, il fait partie de la junte qui a parachevé la lutte commune. Ainsi, il préfère un militaire à un pro-Boua ou à un politicien de l’ancien régime à la tête du CNT. Et en se pourvoyant, l’Imam décide finalement de démissionner.
Idem pour Issa Kaou N’DJIM. Dans un premier temps, il a annoncé sur tous les toits que son combat ne vise pas à obtenir des postes de responsabilité et qu’il se battait pour le Mali, contre la corruption, l’injustice, entre autres. Après ces déclarations fracassantes, il n’a pas réfléchi par deux fois pour accepter d’être membre du CNT. Comme tous ceux qui se sont dédits, il se justifie en déclarant qu’il va pour répondre à l’appel du pays et défendre le pays.
En dehors de la CMAS, quel crédit faudrait-il accorder à ces personnes ? Ont-elles surfé sur l’estime de l’Imam DICKO ? En tous cas, les activités menées par l’un comme l’autre, en dehors de la CMAS, n’ont pas mobilisé. Pour preuve, l’Imam DIARRA a lancé son mouvement, samedi dernier, à travers une conférence de presse. Mais, le mouvement est mort-né, parce que le zigzag de son promoteur le mènera tout droit au flop.
Issa Kaou N’DJIM, quant à lui, a lancé son mouvement (‘’FASO KA WELE’’), dimanche dernier, dans une salle quasiment vide. Ce jour-là une trentaine de personnes se sont déplacées pour prendre part à l’activité dans une salle de plus de 1000 places ! Voilà la réponse des citoyens maliens à l’appel la plate-forme ‘’FASO KA WELE’’ qui tenait son Assemblée générale constitutive, au Palais de la culture. L’objectif de cette rencontre était de lancer un manifeste, dont l’objectif, selon les responsables, vise à rassembler toutes les forces politiques et sociales pour la réussite de la Transition. Il semble que faute de participants, le rendez-vous a été remis à une date ultérieure. L’appel n’a-t-il pas été entendu ou il a été tout simplement ignoré ?
Par Sikou BAH
Source : INFO-MATIN