Le foncier demeure un véritable casse-tête dans notre pays. Les litiges qui y sont liés sont légion et opposent, soit des particuliers entre eux, soit des services aux particuliers. C’est le cas dans la gestion des titres fonciers N° 16 561 et 74 861 de Kati et Souleymanebougou où un litige oppose l’Office de radiodiffusion télévision du Mali (ORTM) à des occupants de ces terres. Pour constater de visu « l’occupation illégale » de ces titres fonciers mais surtout tirer la situation au clair, une délégation du comité syndical de l’ORTM, conduite par son secrétaire général, Abdourhamane Hinfa Touré, a effectué une visite sur les deux sites, jeudi dernier.
Le Syndicat national de l’information, de l’informatique, de la presse et de l’industrie du livre (SNIPIL) et la section syndicale de l’urbanisme et des domaines étaient associés à la visite.
Si le Collectif pour la défense du patrimoine de Moribabougou et N’gabacoro droit et certaines autorités politiques et traditionnelles ont bien accueilli la mission, d’autres ont simplement vu en la visite une provocation qu’ils n’entendaient pas tolérer. Ces ultras étaient prêts à agresser la délégation syndicale et empêcher la presse de faire son travail. Modibo Bah, secrétaire à l’organisation du SINIPIL, a expliqué que le site de Souleymanebougou est un legs de l’Union des radiodiffusions et télévisions nationales d’Afrique (URTNA). Il a déploré la vandalisation des œuvres et installations sur place que l’ORTM aurait pu utiliser. Le syndicaliste a également expliqué que la mission a pour objectif d’alerter sur l’occupation illicite des propriétés de l’Etat devant servir l’ORTM. Constat amer, malheureusement des chantiers poussent sur le site comme des champignons.
Kari Dao, premier conseiller du chef de village de Souleymanebougou, reconnait aisément que la parcelle incriminée ne fait pas partie du patrimoine foncier du quartier. Pour lui, il n’a jamais été question d’une quelconque complicité de la chefferie du quartier dans le morcellement du terrain. « Ce site abritait une installation discrète d’antennes paraboliques qui aurait pu être utilisée par l’ORTM au besoin. Mais ils ont tout cassé », a déploré le secrétaire aux relations extérieures du bureau syndical de l’ORTM, Abdoulaye Gassogue.
Malamine Coulibaly, secrétaire général adjoint du syndicat de l’ORTM, a informé que l’URTNA, en quittant en 1986, a légué le site de deux hectares à son service. Mais c’est le transfert qui se fait attendre depuis. Modibo Dembélé est le maire de la commune rurale de N’gabacoro droit. Il explique que sa mairie aussi a, malheureusement, constaté le morcellement du site par d’autres personnes. L’édile aurait aussitôt informé la direction générale de l’ORTM à travers son directeur général adjoint mais aussi le préfet de Kati. Ces alertes sont apparemment restées vaines puisque les chantiers continuent de plus belle de pousser sur le site en question. Aboubacar Diarra, un riverain, pointe du doigt les autorités chargées de traiter les questions foncières. Il soupçonne des complicités en favers des auteurs du morcellement du site de Souleymanebougou.
Le président du Collectif pour la défense du patrimoine de Moribabougou et N’gabacoro droit, Ibrahima Kebé, dénonce une impunité. Il souligne qu’il s’agit d’un réseau dont les têtes pensantes sont bien connues du «monde des fonciers». «Leur stratégie consiste à donner des parcelles sur des sites de litige à ceux qui peuvent influencer le cours des décisions juridiques et administratives », a-t-il rappelé. Et le responsable du Collectif de conclure : « de sources proches du dossier certains travaileurs de l’ORTM seraient dans la combine. L’autre confusion, c’est que les permis d’occuper ont été délivrés par la mairie de Moribabougou alors qu’administrativement Souleymanebougou relève de N’gabacoro droit.
A Kati, mêmes constats ou presque. Ici aussi des chantiers et champs de culture se décuplent sur le site litigieux. Le secrétaire général du comité syndical de l’ORTM a indiqué que la visite visait à informer l’opinion sur l’occupation illicite des terres de l’Etat. Pour le syndicaliste, il est clair que le comité syndical est bien dans son rôle. Face à l’occupation illicite du patrimoine matériel de l’ORTM, le syndicat a le devoir de se battre afin que force reste à la loi. Par ailleurs, Abdourhamane Hinfa Touré a estimé que la direction générale de l’ORTM doit soutenir les syndicalistes en vue de stopper les chantiers qui avancent très vite.
Issa Baradian TRAORÉ
L’Essor