Face à la multiplication des crises et des défis dans un Mali en proie à d’énormes difficultés existentielles depuis 2012, le président IBK aura tout intérêt à rassembler l’essentiel des forces politiques et sociales autour de sa gouvernance. La formation du gouvernement post-législatives 2020 est une aubaine à plus d’un titre.
« Crises dans la crise » malienne. Tel est le constat d’observateurs avertis comme des diplomates accrédités à Bamako, mais aussi des acteurs sociopolitiques de premier plan sur les bords du fleuve Niger.
En effet, à la crise politico-sécuritaire que traversait le pays se sont des crises sociales et politiques non négligeables. Il s’agit de la crise mondiale née de la pandémie du covid-19, la crise subséquente du secteur de la santé avec les humeurs belliqueuses des médecins et personnels soignants. L’un des corollaires de cette colère des blouses blanches, c’est l’annonce de préavis de grèves dans le secteur de la santé.
Les autres crises sont celle du système éducatif, mise en veilleuse par la fermeture des écoles du fait du covid-19, la crise économique et financière avec des difficultés énormes éprouvées par les ménages (cherté des denrées de première nécessité), la crise sécuritaire avec son lot d’attaques terroristes et d’atteintes à la sécurité des personnes et de leurs biens.
S’y ajoute les crises politiques liées à la contestation (suivie de manifestations) des résultats définitifs des élections législatives, sans oublier l’enlèvement du chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé, le boycott du dialogue national inclusif par l’opposition, etc.
Tous ces éléments font régner dans le pays un sentiment d’incertitude et une certaine prédisposition à des manifestations de mécontentement et de déceptions. C’est ce qui explique que pour le moindre désaccord au sein de l’opinion, les populations semblent désirer la rue, avec son cortège de troubles à l’ordre public. Une sorte de défouloir pour dire à qui de droit, les gouvernants, les insatisfactions et les récriminations du moment. Il s’agit d’une situation qui n’arrange rien à la soif de quiétude pour faire face aux urgences de l’heure, aux réformes politico-institutionnelles attendues, aux questions de survie de la nation et à son développement.
Et, puisque pour IBK, « aucun sacrifice n’est de trop lorsque c’est le Mali qui est en jeu », il urge de tendre à nouveau la main à tous les acteurs de la vie nationale pour ce que Serge Daniel appelle souvent le « smig politique » de relance et de consolidation de la paix sociale.
Cette lecture s’impose d’autant plus que IBK est à son dernier mandat et n’a plus que trois ans à la tête du pays. Comment peut-il léguer un héritage dépouillé d’embûches à ses potentiels dauphins sans auparavant poser les bases d’un modus vivendi politique à la génération des Boubou Cissé, Moussa Timbiné et autres ? Comment IBK peut-il mieux assurer ses arrières dès aujourd’hui en ne réussissant pas un minimum de convergence d’idées autour de sa gouvernance ? Cette gouvernance peut-elle se payer le luxe de continuer à faire face à autant de fronts au même moment ? Combien d’acteurs politiques et activistes peuvent mis hors d’état de nuire sans un minimum d’entente sur les intérêts existentiels de la Nation. Jusqu’où le pouvoir peut-il se mettre à dos des voix discordantes comme celles de Soumaïla Cissé, Modibo Sidibé, Dr ChoguelKokalla Maïga, Me Mountaga Tall, Oumar Mariko , sans négliger celles des Pr Clément Dembélé, NouhoumSarr, etc ? Le pouvoir ne gagnerait-il pas à pacifier ces « petits » fronts de nuisance pour converger les esprits vers les chantiers des réformes de sortie de crise ? Ces questions se posent avec acuité surtout que la mouvance présidentielle, elle-même, n’est pas dépourvue de velléités de ressentiments et de forces centrifuges dans le sillage des dernières élections législatives et du choix du président de l’Assemblée Nationale. Et, ayant opté pour Moussa Timbiné, jeune loup politique aux dents longues, originaire du centre (région de Mopti) du pays, IBK doit agir pour recoudre le tissu sociopolitique malien. C’est bien cela qui impose l’équation d’un gouvernement d’union nationale à résoudre rapidement autour de l’accord politique de gouvernance, dont les balises ont été bien posées par Dr Boubou Cissé.
Bruno D SEGBEDJI
Mali Horizon