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Nomination à des postes à responsabilité : Le retour en force des hommes de l’ex-parti unique au pouvoir

Il ne restait plus que cela, réhabiliter le général Moussa Traoré et placer les militants de l’Union démocratique du peuple malien (UDPM) dans les sphères de l’État. Nous avons encore en mémoire la toute première visite des membres du Conseil national pour le salut du peuple (CNSP en 2020) chez le général Moussa Traoré. En 1991, le vocable Comité de transition pour le salut du peuple (CTSP désignait la transition. En 2020, c’est le CNSP. La différence observée entre les deux (02) sigles d’appellation de la transition est la lettre T. CTSP et CNSP, tous parlent de salut du peuple.

Dans le Mali d’aujourd’hui, les générations nées sous Moussa Traoré, Alpha Oumar Konaré, Amadou Toumani Touré (ATT) et Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) représentent 85% de la population. Une bonne partie de cette génération tire les ficelles du pouvoir.

En termes d’avancées démocratiques, les trois dernières décennies pourraient être considérées comme des décennies perdues pour le Mali. Le bilan est sombre: violations délibérées et flagrantes des droits de l’Homme, exercice autocratique du pouvoir par des partis uniques, putschs multiples suivis de meurtres de personnalités politiques. Alors que la transition tire vers sa fin, le président de la transition, suspend les activités des partis politiques et des associations à caractère politique.

Il organise un Dialogue Inter-Maliens pour la paix et la réconciliation nationale comme ce fut le cas du fameux congrès de l’UDPM (26-27 et 28 mars 1991) qui devait décider de l’avènement de la démocratie au Mali en 1991. La suite ? coup d’État du 26 mars 1991. Les personnalités de l’ancien UDPM (Union démocratique du peuple malien) qui rédigeaient les discours à la nation du président Moussa Traoré sont ceux-là aujourd’hui les animateurs des débats du dialogue Inter-Maliens.

Le modèle de démocratie a été expérimenté en Afrique quelques années avant ou quelques années après la proclamation de l’indépendance. Au Mali, deux (02) grands partis politiques existaient sur l’échiquier politique et étaient représentés à l’Assemblée nationale française et à l’Assemblée territoriale soudanaise: l’Union Soudanaise Rassemblement démocratique africain (US-RDA), et le Parti progressiste soudanais (PSP).

L’Assemblée territoriale issue des élections organisées en mai 1957, un an après le vote de la Loi-Cadre intervenu le 26 juin 1956, était composée certes d’une forte majorité d’élus de l’US-RDA (35 députés), mais comptait aussi un certain nombre d’élus PSP (5 députés). C’est cette Assemblée multipartiste présidée par Mahamane Alassane Haïdara qui, un mois après l’éclatement de la Fédération du Mali, annonce dans la nuit du 19 au 20 août 1960, a voté le 22 septembre 1960 la loi proclamant l’indépendance du Mali, libre de tous les engagements et liens politiques vis-vis de la France, selon les termes propres de Modibo Keïta, le premier président de la République du Mali.

Au Mali, les dirigeants des deux (02) premières Républiques partageaient à des degrés divers les péchés de l’intolérance politique et de la gabegie. Ils ont tous emprisonné, torturé et tué des opposants à leur régime. La manifestation, organisée à Bamako le 20 juillet 1962 par des commerçants hostiles à la création du franc malien, servit d’alibi pour l’arrestation, la condamnation à mort, puis déportation à Kidal des deux (02) premiers responsables du Parti progressiste soudanais, Fily Dabo Sissoko et Hammadoun Dicko, et d’un commerçant influent, Marba Kassoum Touré. Ils ont trouvé la mort le 30 juin ou le 05 juillet, selon des sources, dans des circonstances qui n’ont jamais été élucidées par le pouvoir en place.

Le 28 février 1978, le chef de file du Comité militaire de libération nationale (CMLN), le colonel Moussa Traoré, fait arrêter, selon un scénario digne d’un film western, ses compagnons qui contestaient ouvertement son leadership. Il s’agit des lieutenants-colonels Kissima Doukara, Karim Dembélé, Tiécoro Bakayoko, respectivement ministre de la Défense, de la Sécurité et de l’Intérieur; ministre des Transports et des Travaux publics; et Directeur général des Services de sécurité.

Dans le livre de Soungalo Samaké «Ma vie de soldat», on comprend la raison de cette querelle de leadership. Ce sont Tiécoro Bagayoko, Kissima Doukara, Soungalo Samaké qui ont arrêté Modibo Keïta. Où était le lieutenant Moussa Traoré ? Les purges au sein du CMLN se sont poursuivies avec l’arrestation du colonel Charles Samba Sissoko le 08 mars 1978, du lieutenant-colonel Joseph Mara le 02 janvier 1979, et la démission du colonel Youssouf Traoré le 1er mai 1981.

Après un simulacre de procès à Bamako et à Tombouctou, la bande dite des trois et leurs prétendus complices ont été déportés au bagne de Taoudéni, où ils ont été soumis à toutes sortes de travaux avilissants et de sévices inhumains qui ont emporté la plupart d’entre eux. On ne pourrait pas fermer ce chapitre sur les crimes politiques de la deuxième République sans citer la mort en détention officiellement des suites d’un œdème aigu des poumons, vraisemblablement par empoisonnement du premier président du Mali indépendant, Modibo Keïta, le 16 mai 1977; ensuite la mort du leader estudiantin, Abdou Karim Camara dit Cabral le 17 mars 1980 par les sbires du régime de Moussa Traoré.

S’agissant de la gabegie des tenants du pouvoir, c’est surtout sous la dictature militaire instaurée par le Comité militaire de libération nationale (CMLN), puis sous le règne du parti constitutionnel unique, l’Union démocratique du peuple malien (UDPM) qu’une nouvelle bourgeoisie a commencé à voir le jour et s’est mise à étaler sans vergogne les fruits de ses rapines. Un régime de «kleptocratie» a été installé. La «kleptocratie» est un régime politique, où le vol est érigé en système de gouvernement.

Dans le cas du Mali, on peut rappeler, entre autres faits, le «bras de fer» entre le régime militaire et la centrale syndicale à la suite de la tentative de noyautage de sa direction en 1970; la contestation des résultats du simulacre de referendum constitutionnel du 02 juin 1974 par des intellectuels et des militants d’organisations politiques clandestines, la fronde des militants de l’UNEEM (Union nationale des élèves et étudiants du Mali) entre 1977 et 1981; la grève des enseignants entre 1980 et 1981.

Amy SANOGO

Inter De Bamako
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