Le Général de Brigade Moussa Sinko Coulibaly a présenté au président de la République, sa lettre de « démission des forces armées à compter du 30 novembre 2017 ». La nouvelle a vite fait le tour des réseaux sociaux. Et les spéculations vont bon train à propos des ambitions de ce jeune officier qui s’est révélé au grand public à la faveur du putsch de mars 2012. Au sein de l’opinion nationale, certains annoncent l’entrée imminente en politique du désormais ex-directeur de l’Ecole de maintien de la paix Alioune Blondine Bèye de Bamako (EMP-ABB)
Moussa Sinko Coulibaly, lui-même, lie sa décision à son ambition de contribuer autrement à trouver des solutions aux défis que connait le Mali. Textuellement, il écrit dans sa lettre de démission : « Ce choix est lié à mon ambition de vouloir contribuer autrement à trouver des solutions aux défis politiques, éducatifs, économiques, culturels et sociaux auxquels notre pays est confronté.» Poursuivant, il assure qu’il continuera à servir son pays en tant que civil partout où besoin sera. Pour certains Maliens, le message est limpide: Le général Coulibaly fait sa descente dans l’arène politique. Il s’agirait là du début de concrétisation d’un rêve, longtemps nourrit par l’intéressé.
Cette thèse est d’autant plus crédible que cette démission intervient quelques mois avant la prochaine élection présidentielle. Reste à savoir sous quelle forme se matérialisera l’entrée en politique du général Moussa Sinko Coulibaly qui serait très influent au sein de l’armée malienne. Sera-t-il candidat à la présidentielle de 2018 ? Ou remobilisera-t-il la troupe à la faveur d’un candidat, comme il l’a fait en 2013 ? Quelle que soit l’option qu’il aura choisie, « l’affaire » pourrait s’avérer compliquer. En effet, le général Moussa S Coulibaly n’a aucune assise politique. Et son nom restera à jamais associer au coup d’Etat le plus débile de l’histoire du Mali, celui perpétré le 22 mars 2012 par la bande à Amadou Haya Sanogo. C’est d’ailleurs ce putsch qui a porté « Sinko » de l’ombre à la lumière. Alors colonel, il conduisait une formation à l’École de maintien de la paix, quand des sous-officiers ont pris le pouvoir. Sinko n’était donc pas de la marche sur Koulouba. Mais il s’est rapidement imposé comme l’éminence grise de la junte et de sa figure de proue, le capitaine Sanogo, dont il fut le directeur de cabinet.
Aussi, quand il a fallu rendre le pouvoir aux civils, Sinko a été de ceux qui ont poussé Sanogo à transiger avec les chefs d’État ouest-africains. Puis, quand il a été question d’élections, c’est lui qui a été propulsé au ministère de l’Administration territoriale. La suite est connue…
Qui ne se souvient de sa sortie ratée en juillet 2013 ? Pour mémoire, le 30 juillet de cette année-là, soit deux jours après le premier tour de la présidentielle, il avait offert un spectacle déconcertant, désignant un vainqueur, en la personne de Ibrahim Boubacar Keïta, avant l’heure. Quelques minutes après, le candidat de l’Urd, Soumaïla Cissé, et bien d’autres candidats avaient dénoncé cette tentative de la junte d’imposer “son” candidat. Soumaïla et ceux qui étaient dans la même logique que lui avaient d’ailleurs réclamé la tête de Sinko. Peine perdue. Mais ce qui n’était encore qu’un simple soupçon, s’est avéré au sortir du second tour de l’élection présidentielle. Sans grands efforts et surtout avec la bénédiction de Amadou Haya et ses ouailles, dont Sinko, IBK a été élu président de la République.
Moussa Sinko Coulibaly obtiendra, par la suite, la récompense du service rendu. Il a été fait général de brigade, puis reconduit à la tête du ministère de l’Administration territoriale. Cependant, sa plus grande récompense restera le fait qu’il ait été épargné par la malédiction qui s’est abattue sur la bande à Sanogo. De tous ceux que la junte a placés durant son règne, il est l’un des rares à avoir résisté au retour à l’ordre institutionnel.
Est-ce qu’il pourra, pour autant, redorer son blason auprès des Maliens? Pas évident ! Tous les Maliens savent que l’avènement de la junte de Kati a été une page sombre page de l’histoire du Mali. Le pays, qui était attaqué au nord par des terroristes, a été précité par ces putschistes dans un gouffre sans précédent. Les séquelles sont encore là. Aussi, le règne de la bande à Sanogo s’est résumé en une série d’actes crapuleux : enrichissement illicite, arrestations arbitraires, pillages, séquestrations… bref rien que des abus (dont les plus inimaginables) commis à Bamako et à travers le pays.
I B D
Moussa Sinko Coulibaly est né à Bamako le 14 juillet 1972. Son parcours militaire l’aura conduit successivement au Prytanée militaire de Kati, aux classes préparatoires de La Flèche en France (1990 à 1992), à l’École spéciale militaire de Saint-Cyr où il est diplômé en 1995, à l’École supérieure et d’application du génie (ESAG) d’Angers en 1996 avec un brevet de chef de section du Génie militaire.
De retour au pays, il sera nommé instructeur permanent à l’École militaire inter-armes (EMIA) de Koulikoro, d’octobre 1996 à septembre 1998, puis commandant de compagnie de la 261e compagnie et de support de 2000 à 2001. D’autres formations suivront ce parcours classique. En effet, il a été à Accra (Ghana) en 2006 pour un cours de planification opérationnelle KAIPTC, à Yaoundé pour une formation au Collège inter-armes de défense de Yaoundé (2009 à 2010). Jusqu’à sa nomination au poste de Directeur de cabinet du Président du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État (CNRDRE), le colonel Moussa Sinko Coulibaly était directeur de l’instruction de l’École de maintien de la paix depuis 2010. Il est ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et de l’Aménagement du territoire dans le Gouvernement Cheick Modibo Diarra 2 formé le 20 août 2012. Et en mai 2014, il signe son retour, en tant que directeur général, à l’Ecole de maintien de la paix Alioune Blondin Bèye de Bamako (EMP-ABB).
Source: L’Aube