Il n’y a plus de doute, les 11 soldats maliens otages des djihadistes ont été tués par la force française Barkhane, lors d’un raid mené dans la nuit du 23 au 24 octobre, contre un camp situé dans la zone d’Abeïbara. Si la France ne nie jusque-là pas l’appartenance de ces militaires à l’armée malienne, elle en rajoute pourtant à la confusion, en précisant qu’elle a effectivement tué des soldats qui étaient devenus des transfuges terroristes.
Le ministre de la Défense, Tiéna Coulibaly, affirme, dans un communiqué en date du 31 octobre, s’être entretenu le même jour avec l’ambassadrice de France au Mali, Évelyne Decorps, accompagnée du général représentant de la force Barkhane au Mali, «suite à une opération antiterroriste menée par la force Barkhane, le lundi 23 octobre 2017, aux alentours d’Abeïbara et au cours de laquelle des militaires maliens, détenus par des terrorise ont trouvé la mort».
La partie française a, pendant cet entretien, expliqué que cette action de Barkhane visait à détruire un camp d’entraînement d’un groupe terroriste et que les reconnaissances menées durant la phase préparatoire n’ont pas permis de déceler la présence de militaires maliens.
Ainsi, tirant les leçons de cette tragédie, les deux parties ont convenu d’améliorer leur communication afin d’éviter la survenue d’un tel événement déplorable dans le futur » après plusieurs jours de silence, Bamako confirme ainsi un fait qui n’était plus qu’un secret de polichinelle.
« Les victimes du raid français sont bien nos soldats. Ils ont été enterrés sur place. Nous avons demandé les coordonnées géographiques à l’armée française afin de récupérer les corps », ajoute Boubacar Diallo, chargé de la communication au ministère malien de la Défense, qui précise que ce sont bien les onze militaires retenus en otages qui ont été tués.
Des photographies des dépouilles de ces soldats qui étaient apparus le 18 octobre dans une vidéo pour implorer le Président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) d’intervenir pour leur libération, auraient permis de « recouper les informations » et de confirmer leur identité « sans grand risque de se tromper », assure par ailleurs à l’AFP une source anonyme au sein de ce ministère.
Du côté français, on est catégorique et on dément toute bavure. Pour Barkhane, il n’y a aucun doute sur la nature de la cible. C’est bien un campement terroriste, un camp d’entraînement qui a été touché.
En effet, au sein de la force française, on rejette donc toute accusation de bavure et on dénonce une manipulation.
«Parfois, il arrive que des otages soient retournés et rejoignent le camp des groupes armés », rappelle l’armée française qui fait comprendre que, quel que soit leur statut antérieur, ce sont des terroristes qui ont été visés en fin octobre.
Depuis mardi dernier, le débat sur cette question est en train de prendre une autre tournure. L’on comprend, depuis peu, les raisons de l’insistance de la France sur la précision de ses renseignements. Elle a finalement lâché le morceau en affirmant que les militaires maliens tués le 23 octobre dernier n’étaient pas des otages, «mais des soldats qui avaient fait défection pour les rangs islamistes».
Si l’on se réfère à l’information donnée par Reuters et RFI «Le raid du 23 octobre a été mené sur la base de renseignements étayés contre un camp dans lequel se trouvaient des soldats maliens passés dans les rangs djihadistes. Ce sont eux qui ont été frappés, entre autres», dit-on à Reuters de source proche du dossier, en refusant de préciser le nombre d’ex-soldats «mis hors de combat».
Ces affirmations donnent du grain à moudre pour les autorités de notre pays qui semblent se noyer dans cette affaire.
Étaient-ils réellement des militaires maliens faits otages par les djihadistes ?
Avaient-ils vraiment changé de camp ?
Cette explication fournie par l’ancienne métropole semble trop tirée par les cheveux, dans le but de se blanchir. Sachant que l’État malien ne dispose d’aucun moyen de vérifier un tel cas, l’on s’agite dans le sens de vite classer cette affaire qui ne manque pas de susciter des interrogations au sein de l’opinion.
Par ailleurs, au regard de la motivation affichée par le camp djihadiste, notamment Iyad Ag Ghali, à fournir des informations sur la situation de ces militaires tués, il y a bien matière à réfléchir.
Pour la première fois, le groupe d’Iyad publie les photos des soldats prisonniers morts et se dit prêt à rendre les corps pour des besoins d’autopsie.
Un terroriste à la dimension d’Iyad a-t-il vraiment besoin de se blanchir suite à la mort de soldats loyalistes, quels qu’en soient les motifs de cette mort ?
Au regard des révélations qui se suivent, cette affaire semble loin d’être classée. Aussi, la France ne se gêne plus de menacer de retirer ses hommes (4000 soldats qui combattent le terrorisme au Sahel) au motif qu’elle ne cesse de perdre la confiance de l’opinion qui le regarde de plus en plus en occupant et non en sauveur.
Par Sidi DAO
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