«Votre situation est très difficile. Au nom de tous ceux qui ont fait du mal et pour l’indifférence du monde, je demande pardon. Car, nous sommes tous créés à l’image de Dieu. La présence de Dieu est aujourd’hui Rohingya ». Ces mots du Pape François interpellent à la fois les musulmans, les chrétiens, les bouddhistes birmans mais aussi et surtout la communauté Internationale, en l’occurrence les Nations-Unies. Un Souverain pontife qui, refusant de se substituer politiquement à la communauté internationale, lui exige d’agir au plus vite pour que cette petite communauté ethnique et religieuse musulmane Rohingya de la Birmanie, enclavée à la frontière du Bengladesh, puisse retrouver sa dignité dans le concert du monde civilisé.
Plus de 600 000 Rohingyas ont afflué ces derniers mois vers le sud du Bengladesh pour échapper à ce que l’ONU a déjà qualifié d’épuration ethnique menée par l’armée birmane. Si le Pape a habilement évité de prononcer le mot Rohingyas en Birmanie et préféré utiliser l’expression « réfugiés de l’Etat de Rakhine », région birmane où est persécutée cette minorité ethnico-religieuse, pour inviter les autorités de Rangoon à stopper la crise humanitaire, il a, ce jeudi 30 novembre, pris son courage en main pour appeler le chat par son nom.
Ainsi le Pape François, dans son allocution, a invité du Bengladesh, la communauté internationale à agir au plus vite pour résoudre la crise humanitaire des Rohingyas qui s’exilent en masse vers ce pays voisin. Un appel du Chef de l’Eglise catholique qui s’adresse à la fois aux autorités de Rangoon et à la communauté internationale leur recommandant l’adoption de «mesures décisives » face à l’exode des Rohingyas.
Pendant ce temps, la quasi-totalité des autorités morales musulmanes brillent par leur silence. Où sont-elles pour ignorer la souffrance de leurs coreligionnaires birmans, rejetés dans l’apatridie par les autorités birmanes, sous la pression de leur population majoritairement bouddhiste ? Les Rohingyas ne sont-ils pas des êtres vivants, au-delà d’être des musulmans, pour que leur souffrance soit partagée par les millions de coreligionnaires ?
Fort heureusement, le Pape François, convaincu de l’utilité du dialogue interreligieux pour résoudre les conflits que connaît le monde contemporain, considère que les Rohingyas sont bien des êtres humains qui ont les mêmes droits que tout autre être humain. Par conséquent, le monde épris de paix et de justice doit s’assumer pour imposer aux autorités birmanes de reconsidérer leur position afin d’arrêter illico presto cet exode humain afin que les Rohingyas retournent vivre dignement dans leur pays. En ne le faisant pas, la communauté internationale devient de facto complice de Rangoon, qui voudrait épurer religieusement sa population afin qu’elle devienne homogène religieusement, c’est-à-dire, seulement bouddhiste.
Gaoussou Madani Traoré
Source: Le Challenger