Dans un nouveau coup de théâtre, Melania Trump s’est rendue jeudi à la frontière avec le Mexique pour une visite surprise à des enfants sans-papiers, en émissaire d’un président américain qui tente de regagner l’opinion publique profondément choquée par sa politique de séparation des familles de clandestins.
“Nous savons tous qu’ils sont là sans leurs familles et je veux vous remercier pour votre dur travail, votre compassion et la gentillesse que vous leur offrez en ces temps difficiles”, a déclaré la Première dame aux professionnels d’un centre d’hébergement de McCallen, grande ville texane.
De l’aveu même du milliardaire, Melania Trump a joué un rôle dans cette décision, qui ne règle toutefois pas la question des plus de 2.300 mineurs arrachés à leurs parents depuis la mise en oeuvre de sa politique de “tolérance zéro”, début mai.
Quand retrouveront-ils leurs familles, demandent depuis mercredi ONG et opposition démocrate.
“Je voudrais aussi vous demander comment je peux aider à réunir ces enfants avec leurs familles aussi vite que possible”, a demandé Melania Trump, dans un développement quasi-surréaliste de cette controverse.
Ce centre, Upbringing New hope Children’s Shelter, accueille actuellement une soixantaine de mineurs âgés de 5 à 17 ans, originaires du Honduras et du Salvador. Selon un haut responsable, la plupart sont des adolescents arrivés aux Etats-Unis sans être accompagnés d’adultes. Seuls six ont été séparés de leurs parents.
La Première dame doit aussi se rendre sur un site des garde-frontières.
L’idée du voyage est venue de Melania Trump, a précisé sa porte-parole, affirmant que son époux l’”a soutenue”. C’est d’ailleurs lui qui a annoncé aux médias son arrivée au Texas.
Donald Trump a profité de l’occasion pour exhorter de nouveau le Congrès à agir pour réformer les lois sur l’immigration.
“Il faut qu’ils se mettent d’accord et fassent quelque chose”, s’est-il exaspéré, rejetant encore une fois la faute de l’inaction sur l’opposition démocrate, qu’il accuse de vouloir “ouvrir les frontières”.
“C’est une honte”, a-t-il martelé.
– Votes au Congrès –
Sous la pression du président et poussés par la crise des familles de migrants, le chef des républicain à la Chambre des représentants Paul Ryan s’est vu forcé de soumettre au vote jeudi deux réformes de l’immigration.
Sans trop y croire lui-même, tant le consensus entre aile dure et droite modérée paraît lointain malgré leur majorité au Congrès. “Nous tentons de résoudre ces problèmes tous seuls”, a ainsi déploré M. Ryan.
Les plans républicains collent au décret Trump: si les enfants ne seront plus séparés de leur famille, c’est parce qu’ils resteront désormais en centre de rétention avec leurs parents pendant les poursuites pénales.
Mais ils vont bien au-delà du sort de ces familles déchirées.
Au menu: financement du mur à la frontière mexicaine, statut des jeunes dits “Rêveurs” –arrivés sans papiers aux Etats-Unis lorsqu’ils étaient enfants– et nette réduction de l’immigration légale, avec notamment de strictes limites au regroupement familial et un changement des critères d’attribution des visas de travail.
Un sujet explosif qui divise d’autant plus profondément le parti que les élections parlementaires de novembre approchent.
Deux votes sont prévus.
D’abord, encore en cours vers 14H00 (18H00 GMT), sur un texte très restrictif qui circule depuis janvier et dont les partisans eux-mêmes reconnaissent qu’il n’aboutira certainement pas.
Puis à partir de 17H00 (21H00 GMT), sur un projet présenté cette semaine et se voulant plus ouvert à la frange modérée, même si cette étiquette fait rire les démocrates. Il prévoit un permis de travail et de résidence pour les “Rêveurs”, renouvelable tous les six ans et qui les autorise à tenter de décrocher ensuite un statut de résident permanent.
Dans une curieuse façon d’encourager un vote qu’il réclame depuis des mois, le président républicain a signalé dès le début de matinée que cette réforme semblait de toutes façons promise à l’échec au Sénat, où son parti n’a qu’un mince majorité.
Pas de suspense du côté démocrate, ils voteront contre. “Les républicains continuent d’être complices des atrocités de” Donald Trump”, a asséné leur cheffe à la Chambre, Nancy Pelosi.
– “Bienvenue en Amérique” –
Au-delà des clivages partisans, le décret Trump ne satisfait pas non plus les associations de défense des droits de l’homme qui s’inquiètent de voir les familles détenues.
Et alors qu’il a souvent vanté par le passé ses nombreuses apparitions en Une du Time, Donald Trump ne devrait pas afficher celle du prochain numéro, révélée jeudi et qui le montre dominant une fillette en larmes, dont la photo a largement contribué à alerter l’opinion, avec le simple titre: “Bienvenue en Amérique”.
AFP