Face à la situation, plusieurs élus du centre sont inquiets. Ils demandent qu’on évite les amalgames et à l’État de prendre ses responsabilités. Ils ont en gros sur le cœur et en appellent à la bonne foi des autorités maliennes pour trouver une solution urgente, à la cascade de tuerie qui ne fait qu’endeuiller des villages entiers.
La situation sécuritaire se dégrade dans le centre du Mali, et quand il s’agit de nommer les auteurs des atrocités commises dans le hameau de Sobanou, plusieurs élus sont prudents, comme le député de la localité de Bandiagara, situé dans le centre. «Je ne peux pas exactement qui a fait cela», dit Bokari Sangara.
Pour lui comme pour d’autres, les problèmes de terres, d’accès à l’eau, aux pâturages entre populations dogons et peuls sont connus, mais ces deux communautés ne sont pas des ennemis. «Il n’y a réellement pas de problèmes peuls-dogons. Il faut faire attention à l’amalgame qui est en train de se poser sur le terrain», poursuit Bokari Sangara.
Issa Togo, président du groupe parlementaire Adema/PASJ, appelle les autorités à saisir le taureau par les cornes avant qu’il ne soit trop tard. Pour le député Youssouf Aya de Koro, la menace terroriste dans la région de Mopti présente une situation de trouble de plus en plus généralisée. Des forces obscures tentent désormais de communautariser la violence afin que le chaos qui en découle leur serve de rempart. C’est le cas dans les cercles de Koro, Bandiagara et Bankass, où des communautés (Peulhs et Dogons) comptent quotidiennement leurs morts.
Les députés de la région de Mopti accusent le gouvernement de «négliger» le conflit intercommunautaire au centre du Mali
Au Mali, la multiplication des conflits intercommunautaires a de quoi inquiéter plus d’un. C’est le moins que l’on puisse dire avec le massacre de près de cent Dogons, intervenu le week-end écoulé dans le centre du pays. Peu avant, soit en mars dernier, une autre attaque avait coûté la vie à 160 personnes, essentiellement des Peulhs à Ogossagou. De quoi donner davantage de soucis aux autorités maliennes déjà en guerre ouverte contre une bande terroriste qui se révèle plutôt coriace sur le terrain et qui donne suffisamment du fil à retordre à la coalition de forces internationales en présence.
C’est dire si le Mali n’a pas besoin de ces conflits intercommunautaires, véritable guerre dans la guerre, autrement plus difficile à maîtriser par des autorités centrales théoriquement astreintes à la neutralité et qui ne sauraient raisonnablement prendre parti pour un camp contre un autre. Et, dans le cas d’espèce, l’on est porté à penser que ni Barkhane ni les forces internationales ne sauraient gérer une telle situation, car ce n’est pas le genre de conflits qui se règlent au bazooka. C’est pourquoi ces conflits intercommunautaires constituent un autre gros défi pour Bamako. En tout cas, le Mali est encore loin d’être sorti de l’auberge, malgré le déploiement d’importants moyens pour la stabilisation du pays.
Paul Dembélé
Source : Nouvelle Libération