L’espoir des 20 millions de maliens a été une fois de plus brisé. Pour cause : les Chefs d’Etat de la CEDEAO et de l’UEMOA, réunis en sommet extraordinaire, n’ont pu décider, ce samedi 04 juin à Accra (Ghana), de la levée des dures sanctions économiques et financières sur leur pays. Les maliens devraient encore patienter un mois (soit exactement le 03 juillet prochain) pour connaitre le verdict du « syndicat des Chefs d’Etat » de l’Afrique de l’Ouest. Pourtant à la veille de ce énième sommet, en réalité consacrée sur l’épineuse situation malienne mais que l’on a subtilement élargi aux situations du Burkina et de la Guinée, tous les observateurs et analystes politiques pariaient sur l’obtention d’un compromis entre la CEDEAO et le Mali. L’interview du Président sénégalais Macky Sall, quelques jours plutôt, par notre confrère d’Afrique Média TV, en était un présage.
Toutefois, contre toute attente, le communiqué final de la Conférence des Chefs d’Etat a préféré maintenir le statuquo sur la question malienne. Pas de décision forte sans qu’aucune raison ne soit officiellement évoquée. Pourquoi ? Si l’on se fie aux coulisses, les Chefs d’Etat auraient été divisés. La majorité étant d’accord à ce que les sanctions soient levées. Alors que trois Etats : le Ghana, le Niger et le Nigéria, y étaient farouchement opposés. Ces derniers exigeant la fin de la Transition malienne en 16 mois. On avance aussi que la majorité de pays, pour la levée des sanctions, était favorable pour 18 mois de prorogation mais avec la composition d’un « Gouvernement de Mission » dirigé par un PM neutre. Etait-ce vraiment la pomme de discorde entre la CEDEAO et le Mali ? Où bien, est-ce que tout cela ne veut pas dire qu’en réalité, une main invisible est en train de faire la guerre contre le Mali. En l’occurrence, lorsque l’on sait que l’embargo ne profite point aux pays de la CEDEAO voisins du Mali ?
Abdoulaye Diop, notre ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale a animé une conférence de presse à la fin des deux sommets. En dépit de tout ce qui prévaut, il est curieusement resté serein et optimiste quant à une levée des sanctions économiques et financières sur le Mali lors du sommet prochain ordinaire du 03 juillet 2022. Faut-il le croire ? Ou faut-il comprendre que ses propos ne sont qu’une langue de bois diplomatique, lorsqu’il est une évidence que le pont des négociations ne fait que se rétrécir ? Le décret du président de la Transition, lu avant-hier sur le plateau du journal télévisé de l’ORTM, portant la durée de la Transition à 24 mois à partir du 22 mars 2022 , est bien tranchant et révélateur d’un climat de tension entre les deux protagonistes. D’autant qu’il Il survient tout juste après les deux sommets.
La CEDEAO est financée, en grande partie, par la France, l’UE et les USA. Alors que l’UEMOA est un instrument économique et financier du Trésor français. Il i va s’en dire que les sanctions imposées par les deux organisations ouest africaines contre le Mali sont bien commanditées par la France et les USA. D’ailleurs, ne soyons pas naïfs, Paris ne va jamais pardonner à Bamako d’avoir : mis fin à la présence de ses forces militaires « Barkhane » (et européennes « Takuba ») sur le territoire national et dénoncé l’accord de défense qui liait les deux Etats ; expulsé son ambassadeur. Pour renforcer sa coopération militaire et économique avec la Fédération de Russie. Nous en voulons pour preuve, les propos du président de la commission Défense et Affaires étrangères du Sénat français, devant ses pairs, martelant en substance que le Mali va payer cher sa rupture d’avec la France. Mais avant ce sénateur arrogant et condescendant, le président Macron n’avait-il pas personnellement déclaré, en fin décembre 2021, qu’il va demander (en réalité exiger) aux Chefs d’Etat de la CEDEAO de punir la Transition malienne ? Quid des USA ?
Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis d’Amérique, avec la création de l’OTAN, ont vassalisé l’Europe occidentale. Actuellement, l’ensemble de l’Europe y est sous le joug américain. Et les USA sont le garant des intérêts économiques et géostratégiques du monde occidental. N’est-ce pas pourquoi le Congrès américain, tout en reconnaissant que l’Afrique regorge de ressources naturelles minières et d’hydrocarbures dont l’occident a besoin, a voté, en avril dernier, une loi qui autorise le Gouvernement fédéral à punir (par tous les moyens) tout Etat ou Organisation du continent noir qui coopérerait militairement et économiquement avec la Fédération de Russie. Peut-on alors en déduire que le Mali soit le premier pays africain frappé par ses mesures de rétorsion? A l’évidence, la réponse est affirmative !
Ainsi on peut admettre, sans risque de se tromper, que ce sont les USA et la France qui sont réellement en guerre contre le Mali. Mais par procuration, elles ordonnent à la CEDEAO et l’UEMOA d’imposer des sanctions économiques et financières contre le Mali afin d’amener la population (qui en paye réellement les frais) à se soulever contre les Autorités de la Transition. D’où les incessantes négociations infructueuses entre ces deux organisations sous-régionales et Bamako qui n’ont pour seul but que de produire le pourrissement du pouvoir transitionnel ! Wait and see !
Gaoussou Madani Traoré
Source : Le Pélican