Depuis plusieurs jours, le retour de l’imam Mahmoud Dicko à Bamako alimente les débats et suscite de nombreuses réactions sur les réseaux sociaux. L’influent leader religieux, qui a passé plus d’un an en Algérie pour des raisons médicales selon ses partisans, devait initialement regagner la capitale malienne ce vendredi 14 février 2025. Toutefois, la Commission des soutiens de l’Imam Dicko a annoncé le report de son retour. Elle invoque des impératifs liés à l’unité nationale et à la préservation de la stabilité du pays.
Dans un communiqué, la Commission des soutiens de l’Imam Mahmoud Dicko explique que plusieurs personnalités ont sollicité un report du retour du leader religieux. Cette demande survient dans un contexte marqué par un important déploiement militaire à Bamako, officiellement pour des « raisons de sécurité ». Une lettre confidentielle, datée du 13 février 2025 et attribuée à la direction régionale de la police nationale du district de Bamako, indique que les autorités perçoivent cette arrivée comme une « tentative de déstabilisation de la transition ».
Face à cette situation, les soutiens de l’imam ont déclaré avoir pris la décision « en toute responsabilité » de reporter l’arrivée de leur leader. Ils affirment que leur priorité demeure l’intérêt supérieur du Mali. Dans un souci d’éviter toute confrontation avec les forces de l’ordre, ils ont demandé à Mahmoud Dicko de différer son voyage. Cette annonce a immédiatement suscité de nombreuses réactions, notamment parmi ses partisans qui espéraient un retour triomphal.
Un précédent qui interroge
La Commission des soutiens de l’Imam Mahmoud Dicko rappelle que ce n’est pas la première fois que l’influent religieux est contraint de reporter une initiative sous la pression. En octobre 2023, la Coordination des mouvements, associations et sympathisants (CMAS) dissoute, qui était alors sous sa direction, avait annulé une marche prévue pour exiger une transition civile, afin de préserver la stabilité du pays, souligne le communiqué. « Cette décision, loin d’apaiser la situation, avait conduit à la dissolution de la CMAS, à l’exil de l’imam et à l’incarcération de son coordinateur, Youssouf Daba Diawara », expliquent les partisans de l’imam dans leur communiqué, tout en dénonçant une « manœuvre visant à affaiblir leur mouvement ».
Les autorités sur leurs gardes
À la veille de l’arrivée prévue de l’imam Dicko, les forces de sécurité ont renforcé leur dispositif dans la capitale. Selon un ordre de service ayant fuité sur les réseaux sociaux, les autorités soupçonnent l’ex-leader du Haut Conseil Islamique du Mali d’activités subversives. Son retour coïncide avec un contexte politique et sécuritaire tendu, marqué par des opérations militaires contre les groupes armés dans plusieurs régions du pays.
La population malienne reste divisée sur ce retour. Tandis que ses partisans saluent un leader soucieux du devenir du Mali, d’autres estiment que sa présence pourrait fragiliser davantage la transition. Certains observateurs y voient une tentative d’ingérence dans le processus politique en cours, alors que les autorités actuelles poursuivent leurs réformes dans un climat déjà marqué par de fortes tensions.
Il convient de rappeler au passage le rôle prépondérant qu’a joué l’imam Mahmoud Dicko en 2020, dans la chute du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), à travers le Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP). Un mouvement émietté en plusieurs tendances aujourd’hui en raison des désaccords entre ses leaders. Imam Dicko est donc connu pour ses capacités de rassemblement et donc de déstabilisation. Surtout que depuis l’étranger, il tient des propos défavorables aux autorités de la transition.
Ibrahim K. Djitteye