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Mali, la guerre perdue contre le terrorisme

Fin 2011, des centaines de combattants touaregs maliens pris au piège de la guerre contre le colonel Kadhafi rentrent chez eux. Quelques mois plus tard, les 2/3 du pays tombent sous les coups conjugués de ces indépendantistes et des djihadistes algériens installés dans la région. Très vite, les groupes affiliés à Al Qaida prennent le dessus et, en janvier 2013, ils provoquent l’entrée en guerre de la France, à la demande du président malien Dioncounda Traoré. Sept ans et deux élections présidentielles plus tard, un coup d’Etat militaire renverse le président Ibrahim Boubacar Keita. La dégradation de la sécurité et les scandales témoignent de l’impuissance des autorités maliennes et de la communauté internationale, malgré des milliers de soldats, des dizaines de stratégies « Sahel » et des millions d’euros. La relation franco-malienne dégénère. Les Russes reviennent en force à Bamako.

Pour expliquer cet échec collectif, il faut retourner dans l’histoire, celle de l’Etat moderne hérité de la colonisation et celle des anciens empires, pour lesquels ont tour à tour combattues toutes les communautés. Les jeunes, qui représentent les ¾ de la population malienne, poussent au renouveau et bousculent l’ordre social conservateur, dans un contexte de concurrence des modèles de gouvernance : décentralisation,  séparatisme, charia, ordre traditionnel, à côté de la démocratie à l’occidentale.

NOTE D’INTENTION

L’année 2022 a été un formidable accélérateur historique et nous avons tourné notre film comme une course contre la montre. Cette ambiance particulière était propice à la parole, avec un horizon devenu incertain, mais elle a aussi pesé sur les conditions du tournage, dans un contexte de durcissement du pouvoir à Bamako. Ce fut l’année du départ de Barkhane, de l’arrivée de la société Wagner, de tensions très fortes avec la communauté internationale, d’élections repoussées sine die et d’une réflexion, soudain radicale, sur le modèle politique à adopter, la forme de la justice ou de l’école, les choix tactiques à opérer : escalade militaire ou discussions avec les groupes terroristes ? Le Mali semblait au bord d’un gouffre, susceptible de basculer à tout moment dans l’inconnu.

Un Premier ministre de rupture, des politiques inquiets de l’avenir, des chefs de groupes politico-militaires à la recherche d’un ordre nouveau, des leaders traditionnels nostalgiques des temps anciens nous ont livré leur vision de l’Etat, de la crise, de l’histoire, des solutions possibles et de la relation avec la France. Nous avons choisi le temps long des interviews, filmées sur le terrain de chacun, au service d’un propos personnel, du récit intime à l’aventure politique. Nous avons été à la rencontre des acteurs, dans leur ville, leur fief ou leur bastion. Ces déplacements permettent de matérialiser en images la diversité d’un vaste et beau territoire et de ses populations, un voyage dans l’espace et dans le temps qui nous a conduits dans les deux grandes régions de la guerre : le nord et le centre du Mali.

Nous avons filmé les dernières heures de l’armée française dans ses bases, des officiers convaincus d’avoir effectivement accompli leur mission, celle de former et de renforcer l’armée malienne pour mieux affaiblir les groupes djihadistes. Etonnant satisfecit au moment où ces mêmes militaires maliens bottaient la France hors du pays ! Dans le nord du pays, nous avons suivi les combattants touaregs et maures se préparant pour les combats à venir contre l’Etat islamique et/ou l’armée malienne. Nous avons scruté l’origine de l’irrédentisme touareg à Kidal. Nous avons écouté les jeunes ultra de Bamako, criant leur haine de la France et leur ferveur nationaliste. Dans le centre, front principal actuel de la guerre entre l’armée malienne et les djihadistes, nous avons cherché à comprendre comment Al Qaida avait prospéré sur les frustrations accumulées dans la communauté des éleveurs peuls, ce qui a fait basculer leurs voisins dogons dans la guerre à leur tour, provoquant de graves affrontements intercommunautaires.

En contrepoint de la parole des leaders, le film propose celle des Maliens « ordinaires », femmes, jeunes, commerçants, éleveurs, combattants, qui nous livrent leurs malheurs mais aussi leurs espoirs, leurs engagements, leur idée du drapeau et de la Nation.

PERSONNALITES INTERVIEWEES

Cheick Aliou Sangaré – Secrétaire général des Jeunes engagés pour le Mali
Choguel Kokalla Maïga  – Premier ministre
Fahad Ag Almahmoud   – Secrétaire général Groupe d’autodéfense touareg Imghad et alliés (Gatia)
Ali Nouhoum Diallo  – Ancien président de l’Assemblée nationale, médecin, fils de berger peul
Tiebilé Dramé  – Ancien ministre des Affaires étrangères (2019)
Moussa Mara  – Ancien Premier ministre (2014-2015)
Mahmoud Dicko –  Imam
Haoua Maïga – Chanteuse
Capitaine Stéphane – Membre de la force Serval en 2013 puis de la Force Barkhane en 2022
Colonel Statucki – Chef du Groupement Tactique Désert aérocombat
Colonel Doithier – Chef de corps du Groupement Tactique Désert 2
Hama Cissé – Imam
Marcelin Guenguere –  Ancien porte-parole de la milice dogon
Anonyme  Ancien combattant de la Katiba Macina (Al Qaida)
Aminata Bara – Habitante du village de Wo, déplacée
Boukhari Ben Essayouti – Chef de la mission culturelle de Tombouctou
Alphadi Wangara – Imam de la mosquée Sidi Yahia
Diadié Hamadoun Maïga – Ex-président du comité de crise de Tombouctou
Khadidja Bamoye – Tombouctienne
Anonyme – Combattant d’Al Qaida
Bilal Ag Acherif – Secrétaire général du Mouvement National de Libération de l’Azawad
Ibrahim Ag Assaleh – Ancien cadre indépendantiste touareg
Ibrahim Ould Handa – Secrétaire général du Mouvement arabe de l’Azawad
Moussa Ag Acharatoumane – Secrétaire général du Mouvement pour le Salut de l’Azawad
Tinawelane Wallet Mohamed – Habitante de Kidal
Mohamed Assaleh – Maire de Talataye

BIOGRAPHIE DE NATHALIE PREVOST

Née en 1963, Nathalie Prévost a exercé comme journaliste à Paris jusqu’au début des années 2000, à Reuters, au JDD puis à l’agence Capa, comme spécialiste de la justice, des questions de sécurité puis d’investigation. Après cette première vie, le hasard la conduit à Niamey où elle s’installe en 2003 pour former des jeunes aux métiers des médias et de l’audiovisuel dans le cadre d’une association de coopération confraternelle nord-sud. Elle y reste quinze ans et le Sahel deviendra sa deuxième vie et sa deuxième culture. Surtout au Niger, mais aussi au Mali, au Burkina Faso et en Mauritanie, elle continue de travailler dans la formation professionnelle puis dans la communication au service du développement, sur les questions de santé, d’éducation, de genre, de justice et de démocratie. Ces thématiques représentent une grande partie du champ de l’aide au développement.

En 2010, à l’occasion du coup d’État et de la transition qui s’ensuivra jusqu’aux élections de 2011, elle tourne et réalise un film documentaire autoproduit intitulé « Demain, la démocratie. » A la même époque, elle reprend une activité journalistique en tant que correspondante au Niger, alors que l’insécurité liée aux enlèvements d’Occidentaux et à l’activité des groupes djihadistes grandit dans la région. Depuis lors, elle se consacre très largement à cette thématique, reprenant le fil de sa spécialité journalistique antérieure. Elle observe l’embrasement progressif du Sahel, autour d’enjeux universels, mais ici criants : la jeunesse, la pauvreté, l’injustice, l’espoir d’une vie meilleure, la fracture du monde. De retour en France, elle continue de suivre la région et de s’y déplacer.

Source: francetvpro

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