Amadou Koïta, ministre de la Jeunesse et porte-parole du gouvernement malien, défend le bilan d’Ibrahim Boubacar Keïta, qui s’est porté officiellement candidat à un second mandat, lundi 28 mai. Pour le porte-parole du gouvernement, IBK sera réélu dès le premier tour à la présidentielle du 29 juillet. Interview.
Interrogé par Jeune Afrique dans les heures qui ont suivi la déclaration de son patron, Amadou Koïta affiche son optimisme. Dans son discours de lundi, IBK a notamment affirmé se « réjouir des acquis de ces cinq dernières années », citant notamment la montée en puissance de l’armée malienne et l’application de l’accord de paix signé en 2015 entre le gouvernement malien et les groupes armés du Nord.
« Ce qui est à retenir, c’est que nous avons réussi à avancer », a insisté le président malien. Son ministre de la Jeunesse, également porte-parole du gouvernement, s’inscrit dans son sillage, bien conscient que la défense du bilan du président sortant sera la clé d’une éventuelle réélection.
Jeune Afrique : Ibrahim Boubacar Keïta a annoncé lundi qu’il se portait candidat à un second mandat. Faut-il en déduire qu’il n’a pas atteint ses objectifs durant son premier quinquennat ?
Amadou Koïta : Non pas du tout. Son bilan est positif. Il mérite d’être prolongé et consolidé. La Constitution malienne permet à un président de faire deux mandats. En cinq ans, on ne peut pas tout faire. Le président a hérité d’une situation extrêmement difficile en 2013.
De par son engagement, son patriotisme et sa clairvoyance, le Mali est de retour dans le concert des nations. Ses actions ont été visibles et lisibles. Elles ont impacté positivement le quotidien de nos concitoyens dans tous les domaines : politique, économique, ou encore social. Par ailleurs, quand IBK est arrivé au pouvoir, le taux de croissance était de 2,3%. Il est aujourd’hui à 6%, malgré la crise que nous connaissons.
Dans certaines régions, le quotidien de vos concitoyens est pourtant loin de s’être amélioré, notamment dans le centre du pays où l’insécurité s’est largement accrue en cinq ans…
Le terrorisme n’est pas propre au Mali. D’autres pays plus puissants que le nôtre sont engagés dans ce combat depuis une dizaine d’années. La guerre contre le terrorisme n’est pas une guerre facile car elle est asymétrique. Nous faisons face à des ennemis qui veulent remettre en cause notre vivre ensemble et nos valeurs de civilisation universelle.
Aujourd’hui, la peur a changé de camp. Nous ne sommes pas seuls dans ce combat : nous avons l’appui de la Minusma, de la force Barkhane et nous venons de créer le G5 Sahel pour mutualiser nos efforts avec nos voisins. La situation se normalise.
L’insécurité n’aurait donc pas progressé au Mali depuis l’arrivée d’IBK au pouvoir ?
Nous sommes en train de maîtriser la situation. Quand IBK est arrivé, l’armée malienne était pratiquement à terre. Il a fallu la reconstruire. Grâce à sa volonté politique, une loi d’orientation et de programmation militaire a été adoptée. Elle permet de remettre notre armée sur ses deux pieds.
Aujourd’hui, cette armée monte en puissance. Elle est mieux outillée et s’acquitte de sa mission. Dans le centre, il n’y a plus de cercles où l’administration n’est pas de retour. Nous sommes aussi en train de mettre en œuvre l’accord pour la paix et la réconciliation nationale. La confiance est de retour entre ses signataires.
Plusieurs scandales de corruption – avion présidentiel, surfacturation de matériel militaire, récentes acquisitions de nouveaux appareils militaires… – ont émaillé ce premier mandat d’IBK. Qu’a fait le gouvernement pour lutter contre ces problèmes de mauvaise gouvernance ?
Nous sommes dans un État de droit, où la présomption d’innocence est respectée et où la justice est indépendante. Nous avons des structures de contrôle, telles que le bureau du vérificateur général, l’inspection des finances, la section des comptes de la cour suprême… Certains dossiers ont été transmis à la justice par le président de la république. Le temps de la justice n’est pas le temps politique. Laissons la justice faire son travail. La volonté du président de lutter contre la corruption et la délinquance financière est manifeste. Le combat n’est pas facile et c’est une lutte de longue haleine. La justice française vient par exemple de blanchir le président IBK dans l’affaire Michel Tomi.
Considérez-vous Soumaïla Cissé comme le principal rival d’IBK ?
En tant que chef de file de l’opposition, il doit se reconnaître dans le bilan d’IBK, qui a fait adopter une loi portant statut de l’opposition, laquelle lui accorde une subvention de 500 millions de francs CFA pour lui permettre d’effectuer sa mission de contrôle de l’action du gouvernement. Certes, Soumaïla Cissé a récemment rempli le stade du 26 mars à Bamako, mais il a été aidé, notamment par le jeune rappeur Iba one, qui est très populaire et qui, 48 heures après ce grand meeting, a décidé de soutenir le président IBK.
Comme d’autres cadres de la mouvance présidentielle, vous assurez que le président sortant va l’emporter dès le premier tour. Comment pourrait-il réussir ce qu’il n’a pas réussi à faire il y a cinq ans, quand il avait dû affronter Soumaïla Cissé au second tour ?
Nous sommes en train d’y travailler. Lors d’un déplacement dans l’intérieur du pays, nous avons senti une relation fusionnelle entre lui et les populations. C’est son bilan qui va le faire réélire. Ce bilan est positif et élogieux. Le peuple malien saura l’apprécier à sa juste valeur. Les actions du président menées depuis cinq ans militent pour sa réélection.
Ne craignez-vous pas des tensions post-électorales si IBK est annoncé vainqueur dès le premier tour ?
Non. Toutes les conditions sont en train d’être réunies pour que ces élections soient les plus transparentes, les plus crédibles et les plus sincères. J’en veux pour preuve le processus organisationnel inclusif. Un comité d’experts composé de membres de l’opposition et de la majorité a été mis en place pour la révision de la loi électorale. Idem pour l’audit du fichier électoral. L’OIF, qui a mené l’audit de ce fichier, a estimé qu’il était fiable et qu’il nous permettait d’organiser des élections transparentes. Pour encore plus de transparence, le gouvernement a pris la décision de nommer deux assesseurs – un de la majorité, un de l’opposition – dans chacun des 23 000 bureaux de vote du pays.
Pouvez-vous assurer qu’il n’y aura aucune fraude lors de ce scrutin ?
Je le garantie. Il n’y aura aucune raison de contestation légitime de ces élections, ni aucune fraude. Toutes les conditions sont réunies pour que ces élections soient sincères.
Le fait qu’IBK dispose des moyens de l’État durant la campagne ne fausse-t-il pas la compétition électorale ?
Ce cas de figure se pose partout dans le monde. IBK est président jusqu’au 4 septembre mais il n’utilise pas les moyens de l’État pour battre campagne.
Source: jeuneafrique