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Mahamadou Wadidié, directeur de l’ADR de Bamako : «La multiplicité des acteurs est un handicap»

Dans les lignes qui suivent, il évoque les difficultés qui empêchent les Agences de développement régional de jouer pleinement leur rôle d’appui technique à la régionalisation. Il aborde aussi l’impact de la grève des administrateurs sur les activités de sa structure

 

L’Essor : Pouvez-vous présenter l’Agence de développement régional?

Mahamadou Wadidié : L’Agence de développement régional de Bamako, à l’instar des autres agences, a été créée en 2016, suite à la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, où il a été décidé par les autorités d’aller vers la régionalisation. Et en allant vers cela, il fallait donner à chaque collectivité, à l’échelle régionale, des outils techniques pour les accompagner sur les questions de maîtrise d’ouvrage de développement local et régional. Et cette maîtrise d’ouvrage porte sur les questions de planification, de gestion des infrastructures et des opérations de construction.

Mais aussi, pour un accompagnement dans la mobilisation des ressources financières et des ressources humaines des collectivités. Voilà un peu les missions de l’Agence. C’est beaucoup plus une mission d’assistance pour accompagner les collectivités. Parce qu’avec le transfert de compétences, on estime que les collectivités seront appelées à gérer beaucoup d’autres domaines qu’il n’en était pas auparavant. Donc avec les Agences, cette gestion doit être facilitée.

L’Essor : Comment se passent vos activités sur le terrain quand on sait que de nombreux acteurs interviennent dans le même domaine ?

Mahamadou Wadidié : L’état, en créant les Agences, les a fait reposer sur quatre pieds : les collectivités, l’état à travers le gouvernorat et les services de la planification et de la statistique de la direction régionale, le secteur privé à travers ses représentations dans le conseil d’administration, et la société civile. Ce sont ces quatre piliers qui font le développement. Et si l’état a créé les Agences en les faisant reposer sur ces quatre pieds, cela veut dire qu’aucune de ces instances ne doit être omise.

C’est pour cela que nous disons que la création a été bien réfléchie. Aujourd’hui, les problèmes auxquels on peut être confronté surtout à Bamako, c’est qu’il y a une multiplicité des acteurs. Il n’y a pas une meilleure définition des rôles. Je pense que c’est un problème majeur qui constitue un handicap, parce que non seulement le problème ciblé n’est jamais résolu efficacement, mais on dépense deux ou trois fois dans la même chose.

Et l’état a créé un dispositif très intéressant qu’on appelle le Comité régional d’orientation des actions de développement. Ce comité est l’instance qui permet, à chaque fois qu’il y a une initiative, des discussions entre tous les acteurs pour trouver les meilleurs mécanismes. Malheureusement, on n’a pas trouvé le comité fonctionnel. Mais, nous l’avons réveillé grâce à l’accompagnement du gouverneur qui est son responsable pour que les acteurs puissent se parler. Cependant, on constate qu’il n’y a toujours pas une volonté réelle de la part de certains services à coopérer efficacement avec les collectivités.

Comme je l’ai dit, notre rôle, c’est d’assister. En tant qu’assistant, chaque fois que les collectivités ont besoin de nous, on est prêt à les accompagner. Mais pour que tu puisses accompagner quelqu’un, il faut que la personne sollicite ton aide. Si les structures ne sollicitent pas l’aide de l’Agence, celle-ci ne peut pas s’imposer. Nous sommes une force de propositions.

L’Essor : Quel est l’impact de la grève en cours des travailleurs du ministère de l’Administration territoriale sur vos activités ?

Mahamadou Wadidié : Cette grève a impacté négativement les activités des ADR et bien au-delà. Ce n’est pas courant de voir des administrateurs civils en grève, il n’y a aucun doute que les conséquences sont multiples pour le pays. La mise en œuvre de la feuille de route par le gouvernement de Transition risque d’être sérieusement perturbée. Revenons aux ADR qui sont parties prenantes de la grève, c’est la paralysie générale. Le service minimum assuré ne permet point de faire face à nos engagements nationaux et internationaux. Au passage, nous comptons sur l’indulgence de nos partenaires.

Je vous donne un seul exemple de la situation que nous vivons au sein de l’ADR de Bamako. Nous sommes en train d’appuyer le District de Bamako et cinq communes de la capitale dans le processus d’élaboration des Plans de développement social, économique et culturel (PDSEC) 2021/2025. Mais à cause de la grève, il y a de fortes perturbations dans notre agenda. Et aujourd’hui, les syndicats sont en grève illimitée. Il faut qu’il y ait accord, sinon beaucoup d’acquis seront compromis.

L’Essor : Au niveau des ADR, les grévistes réclament l’application des accords d’établissement et l’ouverture d’une concertation pour doter les Agences de ressources propres. Que peut être la valeur ajoutée de la satisfaction de ces doléances ?

Mahamadou Wadidié : L’application des accords d’établissement n’est que le rétablissement d’un droit acquis. Doter les ADR de ressources propres est une nécessité, ne pas le faire est une volonté délibérée de planifier la fin des ADR, et cela est très dommage. Il est indéniable que les ADR sont des outils techniques indispensables dans le processus de régionalisation. Après 5 ans d’existence, permettre aux ADR de jouer pleinement leurs rôles passe nécessairement par les sortir des situations d’incertitudes et de précarité.

Réalisée par
Bembablin Doumbia

Source : L’ESSOR

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