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Madagascar : le ministre des affaires étrangères limogé après son vote contre la Russie à l’ONU

La veille de cette annonce, Richard Randriamandrato avait, dans un entretien au « Monde », défendu cette décision au nom du principe d’intégrité territoriale des Etats.

Imbroglio au sommet de la diplomatie malgache. Le ministre des affaires étrangères, Richard Randriamandrato, a été limogé mardi 18 octobre pour avoir pris la décision de voter en faveur de la résolution condamnant « les annexions illégales de la Russie sur l’Ukraine » le 12 octobre à l’ONU. Depuis le début de la guerre, Madagascar avait, comme d’autres pays africains, toujours choisi de s’abstenir de voter des résolutions contre la Russie, campant fermement sur une position de neutralité.

Le revirement opéré la semaine dernière avait d’emblée suscité des questions à Antananarivo, et l’hypothèse d’une initiative solitaire du ministre – sans l’aval du chef de l’Etat, Andry Rajoelina – avait été avancée par L’Express de Madagascar, l’un des principaux quotidiens du pays. Le journal évoquait une première consigne ordonnant de voter l’abstention, envoyée aux diplomates malgaches en poste à New York, puis, quelques minutes avant le scrutin, l’ordre de se rallier à la condamnation des annexions russes. Interrogé par RFI, mercredi, M. Randriamandrato a expliqué avoir « pris cette décision en [s]on âme et conscience », sans avoir « mis en danger l’intérêt de la nation en votant ainsi ».

Dans un entretien téléphonique que nous avions eu la veille, le ministre, qui devait conduire la délégation attendue à Paris les 2 et 3 novembre pour la reprise des discussions sur l’avenir des îles Eparses, avait pourtant démenti tout « cafouillage » et assuré que le vote était le « choix du gouvernement et du président de la République ». « Nous ne pouvons ignorer l’escalade militaire à l’œuvre depuis plusieurs mois, et nous ne pouvons rester sans condamner le non-respect par la Russie du principe d’intégrité territoriale à travers l’annexion de quatre régions de l’est de l’Ukraine. Cela ne serait pas cohérent avec notre propre démarche diplomatique qui, dans quelques jours, nous conduira à Paris pour demander la réintégration des îles Eparses sous la souveraineté malgache », avait justifié M. Randriamandrato. Dans son contentieux avec Paris, Madagascar fait valoir la résolution des Nations unies votée en 1979 invitant clairement la France à « réintégrer » sous souveraineté malgache ce chapelet de terres situées dans le canal du Mozambique.

Position d’équilibriste

Pour autant, cette décision ne remettait pas en cause, selon lui, la neutralité de Madagascar : « Nous ne sortons pas de notre position de neutralité sur le conflit entre la Russie et l’Ukraine, qui est pour nous une guerre éloignée de nos préoccupations directes et quotidiennes. Nous sommes à 10 000 kilomètres de cette région. Face aux sollicitations aussi bien de l’Union européenne que de la Russie, il faut dire les choses en face : ce sont d’abord les problèmes de l’Europe, mais pas ceux de l’Afrique ou de Madagascar. Même si, bien entendu, nous en subissons les conséquences avec des pénuries qui s’annoncent de plus en plus difficiles sur le blé, le carburant et d’autres matières premières. »

Andry Rajoelina a-t-il été mis devant le fait accompli, ou avait-il cautionné cette position d’équilibriste avant d’être contraint de désavouer son ministre sous la pression de la Russie ? Difficile de trancher. Une chose est sûre : la volte-face survient dans un contexte de rapprochement avec Moscou, matérialisé entre autres par la signature d’un accord de coopération militaire au printemps, la promesse d’annulation de la dette bilatérale et le soutien renouvelé du Kremlin sur la demande de restitution des îles Eparses. L’influence russe est évidemment loin de satisfaire les donateurs occidentaux dont dépend Madagascar et que M. Randriamandrato avait tenue à relativiser lors de notre entretien : « Je ne fais pas de la Russie une obsession, ni de sa présence à Madagascar une menace. Je réfute l’idée que la Russie aurait une influence particulière dans notre pays, et notamment sur sa vie politique. » A tort ?

Source: Le Monde

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