Les quelques lignes qui restent encore du pacte de stabilité, du serment de foi au sein du Mouvement du 5 juin rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) sont en voie de s’envoler par une guéguerre entretenue par certains cadres du Mouvement. Loin des promesses tenues au boulevard de l’Indépendance, les enjeux de cette querelle sont personnels, aucun rapport avec les préoccupations de la population qui galère à joindre les deux bouts. Dans tous les cas, le M5, dont des cadres ont fait la courbette au CNSP pour avoir des strapontins, a galvaudé son serment de faire le combat de l’intérêt général.
La lutte unit, mais le pouvoir divise, dit-on. Cet adage illustre à bien des regards le rififi au sein du Mouvement du 5 juin Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) pour avoir peiné à maintenir sa cohésion après la chute du président feu Ibrahim Boubacar KEITA. Après les départs du clan de Mahmoud DICKO, la création de la dissidence M5 Mali Kura, nous voilà devant une autre crise à l’interne de ce qui reste encore de ce grand regroupement à bout de souffle. Ses idéaux, ses objectifs calqués sur les fortes revendications à l’époque des Maliens ont été souillés sur l’autel de jeu d’intérêt particulier. Pendant ce temps, la dissidence du M5 donne 72 heures au Premier ministre de clarifier sa position ; ce dernier accuse des militaires d’entretenir la division au M5 en vue d’affaiblir le groupe.
Dans l’un cas comme dans l’autre cas, les préoccupations des Maliens sont ailleurs.
Que l’on ne cache pas la face
Même si on a tenté ces derniers jours d’étouffer les éclats de voix, la compilation des esclandres dénote d’une déconfiture déjà poussée qui pourrait sonné l’agitation d’une aventure qui n’a eu le mérite de secouer le cocotier IBK, et ses camarades du syndicat des chefs d’État de la CEDEAO.
Sur des revendications légitimes, notamment la cherté de la vie, le problème d’électricité, la corruption, le chômage, l’insécurité, les cadres du M5 continuent de garder l’omerta, en saluant la résilience de la population.
Entre temps, eux n’hésitent pas à hausser le ton pour décrier la gestion du Comité stratégique par le vice-président Boubacar K. TRAORE en tentant de faire avaler des couleuvres au peuple qu’il ne s’agit donc pas des « protestations à l’interne contre de telles pratiques comme des demandes de postes (…) Les difficultés actuelles n’ont donc aucun lien avec des demandes de postes».
Un extrait de la déclaration de l’imam Oumarou DIARRA. Que nenni. En effet, presque toutes les dissidences au M5 sont parties de la frustration de querelle de poste.
Sachant que nul ne peut se prévoir de sa propre turpitude, ces cadres du M5 veulent enfumer la situation, en montrant pâte blanche que leur combat était pour le Mali, oubliant que dès les premières heures du coup d’État, ils ont exigé aux militaires le principe de la justice des vainqueurs.
«Les deux acteurs (CNSP et M5-RFP) doivent rester vigilants. Nous devons redoubler de vigilance pour que dans la confusion, les multiples experts, les spécialistes en démocratie ne viennent avec des propositions pour brouiller le chemin qui est très clair dans nos têtes. En plus de rester non seulement vigilants, ces deux acteurs doivent se donner la main pour que cette mission réussisse. Nous devons nous tenir la main dans cette tempête pour arriver à bon port. Nous devons rester vigilants face à toute sorte de pression qui viendra faire échapper le processus aux véritables forces du changement », a déclaré Choguel Kokalla MAÏGA porte-parole du M5 sans qu’il ne soit contesté et démenti à l’époque.
En clair, pour avoir été les héros des derrières heures contre IBK, des responsables du M5 se targuent d’avoir plus de dignité, plus de compétence que les autres Maliens à être dans la transition.
Le M5-RFP s’est positionné comme le seul interlocuteur crédible du CNSP pour la formation et la conduite de la transition politique pour l’après IBK.
Frustrés de la gestion d’IBK, assoiffés du pouvoir et pressés d’être dans le rouage de l’administration, les premières contestations de la victoire sont nées suite à l’appel de propositions du chef du gouvernement.
La suite est connue. Sans concertation et en catimini, près d’une dizaine de CV ont été envoyés aux militaires pour être Premier ministre. Cette attitude illustrative de la course aux postes et aux petits emplois a occasionné la 1ère grande fissure du Mouvement, avant que son autorité morale, imam Mahmoud DICKO, ne scelle la trahison en prop´osant Moctar OUANE aux militaires comme Premier ministre. Depuis, les divisions, les dissidences s’enchaînent avec ses conséquences sur l’avenir de ce mouvement.
Les promesses galvaudées
Quoi qu’ils plaident, les promesses tenues sur le Boulevard de l’Indépendance où des milliers de manifestants se donnaient rendez-vous, ont été galvaudées. Ce, en donnant l’impression pour ces leaders politiques et religieux d’avoir usé de la misère des Maliens pour mobiliser pendant plusieurs mois contre un régime démocratique élu jusqu’à sa chute. Après le coup d’Etat qu’est ce qui est fait de ce serment ?
Quid de ceux qui ont été tués dans la foulée des contestations en réclamant un Mali plus juste, équitable et attaché au respect des droits des Maliens ?
Ces revendications semblent être le dernier souci de ces responsables du M5 (gouvernement, CNT…) parce que plus préoccupés et concentrés sur leur part de gâteau au nom de la justice des vainqueurs. Assistons à une revanche de l’histoire ?
Plus de trois ans après le coup d’Etat, le M5 reste l’ombre de lui-même. Tout ce qui reste aujourd’hui au M5-RFP, c’est le verbiage, la diversion pour masquer sa déconfiture et son implosion prochaine. Aussi, dans un baroud d’honneur, il fait dans le charivari politicien en occultant les préoccupations des Maliens.
En somme, la force en sentinelle pour sauvegarder la République est elle-même en déperdition des valeurs républicaines parce que ses intérêts sont portés sur des questions de personnel.
Leur guerre de cours renvoie l’image que leur combat n’était que de privilèges, de conforts, d’intérêts particuliers et non un combat pour le Mali Kura de justice, d’équité, de développement…. En effet, des cadres du M5 qui animent la contestation, alors dans les postes de responsabilités, ont cousu leur bouche, fermé les yeux pour « ne pas à voir et à entendre » afin de critiquer. C’est lorsqu’ils sont démis de leur fonction, qu’ils se rendent compte que la gestion du Comité stratégique du M5 par Choguel n’était pas bonne.
Dans tous les cas, cette cabale contre le Premier ministre qui a 72 heures, met en garde la dissidence, « pour respecter le fait majoritaire, prononcer la nullité des sanctions » va fragiliser davantage le M5 vis-à-vis de ses « partenaires militaires » après les premiers départs.
PAR SIKOU BAH