La Haye – L’ex-rebelle ougandais Dominic Ongwen doit être acquitté de crimes de guerre car il est avant tout une victime après avoir été utilisé comme enfant-soldat par l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), un groupe armé redouté pour ses exactions, a déclaré mardi son avocat.
M. Ongwen, également accusé de crimes contre l’humanité, doit répondre de 70 chefs d’accusation devant la Cour pénale internationale (CPI) pour des actes présumés commis par la LRA et qui ont semé la terreur dans le nord de l’Ouganda entre 2002 et 2005.
M. Ongwen, 43 ans, ne peut être tenu pour responsable des crimes, a plaidé son avocat à l’ouverture des déclarations de la défense devant la Cour basée à La Haye.
L’ex-commandant a lui-même été enlevé par des hommes de la LRA à l’âge de 9 ans en rentrant de l’école, avant d’être formé en tant qu’enfant-soldat, et a ensuite passé « près de 27 ans sous l’emprise » du groupe armé en tant qu’ »esclave », a affirmé Me Krispus Ayena Odongo.
« Dominic Ongwen était une victime (…) Victime un jour, victime toujours », a-t-il poursuivi, ajoutant que les enfants enlevés par la LRA grandissaient « dans l’un des environnements les plus brutaux jamais connus de l’humanité ».
Une fois capturé, l’accusé, « endoctriné », n’avait pas d’autre choix que de développer son instinct de survie, a-t-il souligné.
Son client écoutait impassiblement les débats pendant que ses avocats détaillaient la violence « ahurissante » de la LRA du chef Joseph Kony, toujours recherché, 13 ans après l’émission d’un mandat d’arrêt international.
Prophète auto-proclamé, M. Kony a mélangé mystique religieuse, techniques éprouvées de guérilla et brutalité sanglante en prétendant vouloir mettre en place un régime fondé sur les Dix commandements.
D’après l’ONU, la LRA a massacré plus de 100.000 personnes et enlevé plus de 60.000 enfants depuis sa création vers 1986, pour les transformer en enfants-soldats ou en « épouses », des esclaves sexuelles en réalité.
A l’ouverture du procès d’Ongwen en janvier 2016, le procureur de la CPI, Fatou Bensouda, avait montré une vidéo prise après une attaque en 2004 contre le camp de réfugiés de Lukodi (nord de l’Ouganda), montrant des enfants éventrés et les corps carbonisés de bébés enterrés à la hâte.
Plus de 4.000 victimes sont représentées au procès de l’ex-rebelle, qui s’était rendu aux forces spéciales américaines en janvier 2015 en Centrafrique. Il est le premier accusé de la CPI à être considéré comme une victime par certains groupes de défense des droits de l’homme.
Le gouvernement ougandais n’a pas les « mains propres » dans cette « affaire politique, a fustigé la défense mardi, ajoutant que les procureurs devraient chercher M. Kony plutôt que de poursuivre M.Ongwen, « la victime ».
« Ceux qui ont témoigné pour l’accusation sont bien conscients qu’ils doivent retourner vivre dans un Etat qui a toutes les raisons de cacher son rôle dans les atrocités », a affirmé Me Odongo.
AFP