Il est de plus en plus reproché au président IBK de sacrifier l’intérêt général à son ego en ne prenant pas l’initiative d’un dialogue avec ses adversaires politiques pour sortir le Mali de la crise post-électorale. Laquelle s’est complexifiée avec la prorogation-non prévue par la Constitution et donc parfaitement illégale- du mandat des députés au 30 juin 2019.
Il est surprenant que ce grief émane de plusieurs compartiments de l’opposition, jusques et y compris le camp de Soumaïla Cissé. Car ce sont ceux-là mêmes qui persistent dans leur refus de reconnaître IBK comme président élu, le dépeignent urbi et orbi sous les traits d’un imposteur, ont introduit des recours auprès de la Cour Suprême du Mali et de la Cour de Justice de la CEDEAO pour réclamer l’annulation du scrutin de juillet-août dernier qui a abouti à sa désignation et son investiture à la charge la plus élevée de l’Etat.
Lui demander, dans ces conditions, de ” rendre visible ” la main qu’il a déclaré tendre à son cadet Soumaïla Cissé, c’est l’inviter à aller à Canossa : on voit mal IBK faire amende honorable devant cet adversaire qu’il dit avoir vaincu ” en toute transparence ” les rapports des observateurs électoraux internationaux en faisant foi, selon lui.
Pour ne rien arranger les structures traditionnelles de médiation ne fonctionnent plus au Mali. Les autorités coutumières et religieuses (principalement musulmanes) les associations de la société civile qui se dédient à cette tâche ont perdu la neutralité qui fondait leur crédibilité : elles se sont compromises avec le pouvoir ou entretiennent des accointances avec l’opposition.
Reste la médiation internationale. Le président en exercice de la CEDEAO, le Nigérian Mohamed Buhari a envoyé récemment à Bamako un émissaire qui a pris langue avec IBK et Soumaïla. L’UA, l’UE, les Nations Unies, dont l’accompagnement au Mali a été de tout premier ordre, ces dernières années, doivent s’impliquer davantage pour faire asseoir autour d’une table tous les protagonistes de la crise post-électorale. Et les amener à convenir d’une feuille de route pour œuvrer à la normalisation politique.
A défaut, la persistance du pouvoir en place à vouloir gérer unilatéralement le pays pourrait conduire à une rupture démocratique. En effet, le gouvernement, en violation de la loi fondamentale avec la complicité de la Cour constitutionnelle, a prorogé le mandat des députés de six mois. Si, à l’expiration de ce délai, l’Assemblée nationale n’est pas renouvelée faute de dialogue fécond avec l’ensemble des acteurs politiques, il ne pourrait pas procéder à une deuxième prorogation qui serait de trop. Conséquence : le pays se trouverait dans une situation atypique où l’exécutif (le président de la République et le gouvernement) vont prendre des décisions et les faire exécuter par l’administration en l’absence de l’institution de contrôle qu’est l’Assemblée nationale. Nous serions alors en rupture démocratique, ce qui serait la pire chose qui puisse nous arriver.
Saouti HaIdara
L’Indépendant