Alors que l’avis de la classe politique et des organisations de la société civile diverge sur le contenu du projet de loi électorale, le Conseil national de Transition (CNT) a convoqué ce vendredi une plénière d’examen sur ledit projet de loi. L’une des modifications majeures dans ce texte, c’est la création de l’Autorité indépendante de Gestion des Élections en abrégé « AIGE » avec le mandat d’organiser et de gérer toutes les opérations électorales et référendaires.
Le projet de loi électorale controversée est soumis ce vendredi à l’examen et au vote du Conseil national de Transition (CNT). La nécessité de la relecture de la loi électorale consistait à corriger les lacunes et les faiblesses de ce texte en vue minimiser les contestations électorales.
L’AIGE au cœur des élections
Dans ce projet de loi, dont nous avons pris connaissance, des modifications ont été apportées à la loi initiale. Le changement majeur se trouve au niveau de l’article 4 du projet de texte qui prévoit la création de l’Autorité indépendante de Gestion des Élections en abrégé « AIGE », tant réclamée par la classe dont la mission sera d’organiser et de gérer toutes les opérations électorales et référendaires.
En clair, ce sont les prérogatives de la Direction générale aux élections (DGE) et la Commission électorale indépendante (CENI) ainsi que celles du ministère de l’Administration territoriale qui seront transférées à l’AIGE si le document était adopté par le CNT. Ainsi, ce qui lui permettrait de jouer le rôle central et principal du processus électoral.
À ce titre, elle est chargée notamment : de la préparation technique et matérielle l’ensemble des opérations référendaires et électorales ; de la confection, de la gestion, de la mise à jour et de la conservation du fichier électoral ; de la gestion du financement public des partis politiques ; de la réception des rapports annuels d’activités et de gestion des partis politiques et leur publication sur le site de l’AIGE ; du plafonnement et du contrôle des dépenses de campagne électorale.
L’AIGE se charge aussi de la confection et de la personnalisation des cartes d’électeur ; de la réception et de la transmission des dossiers de candidatures relatifs aux élections des députés et des conseillers des Collectivités territoriales ; du recensement des votes, de la centralisation, de la proclamation et de la publication des résultats provisoires des scrutins par bureau de vote.
De même, il est également chargé de la gestion des observateurs nationaux et internationaux ; de l’élaboration de son budget annuel de fonctionnement et du budget des consultations référendaires et électorales ; de la formation électorale et de la coordination des activités y afférentes ; de la publication et de la remise officielle du rapport annuel d’activités.
Outre le scrutin des élus (collectivités, députation et la présidentielle), l’AIGE peut également organiser, à leur demande et à leurs frais, les élections des ordres professionnels, des organisations faîtières des Maliens établis à l’extérieur et des chambres consulaires. Et l’instrument de vote sera désormais la carte biométrique, prévoit le projet de loi.
Le parrainage citoyen et la représentation proportionnelle
En plus de cette modification majeure, le projet intègre aussi le parrainage citoyen à côté du parrainage des élus prévu à l’article 164 du texte.. La loi initiale ne prévoyait que parrainage des élus. Ce nouveau mode parrainage est exigé aux candidats à la présidentielle.
Pour le cas du parrainage citoyen, la candidature doit avoir la signature d’électeurs représentant au moins 0,3% du fichier électoral général.
De même, dans le processus d’élection, il est prévu « le scrutin à la représentation proportionnelle sans panachage ni vote préférentiel » pour l’élection des députés et des conseillers des collectivités territoriales. Ainsi, sur chaque liste, les sièges sont attribués aux candidats d’après l’ordre de présentation.
L’attribution des sièges s’effectue selon la règle de la plus forte moyenne.
Toutefois, « les listes qui n’ont pas obtenu cinq pour cent (5%) des suffrages exprimés ne sont pas admises à la répartition des sièges. En cas d’égalité de suffrages, le siège est attribué au candidat le plus âgé. En cas d’égalité d’âge, il est attribué au candidat inscrit sur la liste de candidatures déposée en premier », selon les termes du projet de loi que nous avons consulté.
Ouverture au vote
électronique
Le document prend également en compte la représentation de la diaspora au sein de l’Assemblée nationale. Ainsi, les circonscriptions électorales pour les Maliens établis à l’extérieur seront géographiquement déterminées en collaboration avec le ministère chargé des Affaires étrangères et celui des Maliens établis à l’extérieur.
« Une décision du Président de l’AIGE fixe les zones géographiques retenues. Cette décision est publiée et notifiée à toutes les juridictions d’Ambassade et de Consulat », précise le projet de loi.
Par ailleurs, le texte qui sera soumis au débat du CNT fait une ouverture au vote électronique en ces termes : « Le vote peut être manuel ou électronique. Une loi détermine les conditions et modalités d’introduction du vote électronique».
Ce projet, selon plusieurs sources, est aussi le résultat de la synthèse des écoutes menées par les membres de la Commission Lois constitutionnelles où plus de 200 responsables de politiques et de structures se sont prêtés à l’exercice en apportant leurs observations au texte.
La démarche consistait pour le président de la Commission de Lois constitutionnelles d’avoir un texte autour duquel il y a un très grand consensus des acteurs politiques.
À l’analyse du document, des dispositions décriées comme l’AIGE y figurent. Elles constituent d’ailleurs l’une des modifications majeures.
Ainsi, dans sa réaction sur le contenu dudit projet de loi, le Cadre d’échange recommandait au gouvernement de s’en tenir à la recommandation des ateliers organisés par le ministère de l’Administration territoriale en mai et juin 2021 sur la création de l’Autorité indépendante de la gestion des élections.
Lors de ces rencontres, rappelle le Cadre, « le principe de création de cet organe a été approuvé par la quasi-totalité des participants, mais tous ont recommandé, en raison des difficultés évidentes de mise en œuvre, que son application soit réservée aux nouvelles autorités issues des urnes.»
C’est l’une des raisons pour laquelle, le Cadre d’Échange des partis et regroupements politiques pour une transition réussie avait demandé « le retrait pur et simple du projet de loi électorale jusqu’à ce que les conditions idoines de consensus soient réunies. »
Idem pour le PARENA qui ne voulait s’inscrire dans aucun processus qui exigerait la révision de la constitution dans ce contexte où la priorité doit être de rassembler les Maliens.
Les mêmes préoccupations sont partagées par certaines missions d’observations d’électorales, à l’image de la MODELE-Mali qui appelle également à un large consensus autour des réformes.
PAR SIKOU BAH
Source : Info-Matin