Founè Tounkara est une veuve originaire de Macina. Elle est assise avec un bol de café au lait à la main, un bébé de quelques mois couché même le sol sur un vieux pagne auprès d’elle. Elle regardait ces jumeaux qui couraient entre les engins mobiles. Agé de 10 ans environ avec des tailles moyennes et de teints noirs, habillé en maillot de couleur rouge, ils passent la journée à cet endroit avec leur mère pour quémander et recevoir les aumônes des passants sur ce tronçon.
Mme Tounkara et ses jumeaux fréquentent cette autoroute depuis maintenant 1 an. « Je fais rarement du porte-à-porte avec les enfants et notre place principale est le boulevard de l’indépendance ». Explique-t-elle. Founè ajoutant que ses enfants ne sont pas instruits. Elle déclare qu’ils rentrent dans leur village d’origine une fois qu’ils gagnent assez d’argents. Les sous récoltés serviront à couvrir leurs dépenses familiales. D’après Founè, ils peuvent avoir des recettes de 1500 Francs CFA voire 5000 Francs CFA si les généreux donateurs sont nombreux.
Awa et Adam sont des sœurs jumelles âgées de 11 ans. Elles sont originaires de Macina près de Ségou. Elles se retrouvent seules au bord de la voie car leur mère à un autre business à côté. Cette dernière délaisse ses enfants pour laver des habits au marché Dibida.
Elles se promènent sur ce lieu depuis l’an passé et se rendent au village avec leurs parents pendant la période d’hivernage. D’après Awa ce « métier » est bénéfique mais elles rencontrent certaines difficultés. « Au crépuscule nous nous rendons au Dibida et on passe la nuit devant les boutiques de ce marché ». Explique-t-elle. Ces jeunes filles se rendent également devant les mosquées et peuvent souvent être victimes d’accidents de circulations : « Les vendredis on part devant les mosquées et un motocycliste m’a une fois renversée » Affirme Adam. Selon les propos de ses enfants, malgré les dangers, elles gagnent beaucoup plus en se rendant dans les mosquées. Elles peuvent avoir 10.000 Francs CFA.
Contrairement à Founè Tounkara à qui cela n’a pas l’air de déplaire, Mata Konaté, une mère de jumelles âgées de 6 ans regrette cette activité qu’elle est obligée de mener pour subvenir à ses besoins ainsi qu’à ceux de sa famille. Elle demande de l’aide aux autorités afin qu’elle puisse arrêter cette pratique et mener une activité descente.
Mata explique qu’elle retourne au village avec ses jumelles à chaque saison pluvieuse pour travailler dans leur champ. Outre cette activité, elle fait la lessive et la vaisselle dans certaines familles. Elle déclare que si elle trouve un travail fixe, elle abandonnera sans hésiter cette pratique peu rémunératrice et dévalorisante : « nous sommes devenus une sorte de marchandise. Nous recevons la visite des journalistes et d’autres personnes qui nous posent des questions. Ils nous photographient mais aucune aide n’est faite pour nous ». A-t-elle souligné.
« La vie dans une grande famille est difficile. Je quitte mon village avec mes enfants pour avoir un peu d’argents pour les dépenses. J’amène mes enfants pour mendier depuis environ 6 ans. Parfois nous ne gagnons rien dans la journée. Actuellement, je cherche le transport pour retourner au village ». Ajoute notre interlocutrice.
La mendicité est devenue un métier pour ne pas dire une arnaque, dont plusieurs enfants sont victimes. C’est vrai que dans la tradition malienne, il est dit de promener les jumeaux pour éviter qu’ils tombent malades. Les femmes se présentaient juste chez leurs voisins ou dans la famille proche qui donnaient quelques présents aux jeunes. Mais il n’a jamais été question d’en faire une source de revenus comme on le voit de nos jours. Chaque enfant a droit à une éducation et à une hygiène. Or, ces jumeaux sont sous le soleil ardent. Ils sont déshydratés, sales et même souvent victimes d’accidents. Leur avenir est en péril pour quelques miettes. Il est temps d’agir pour freiner de telles pratiques qui n’honorent point ses créatures fragiles.
Aminata Ouattara (Stagiaire)
Source: Bamakonews