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Les humeurs de Facoh : Chemin d’Afrique

Ils furent, garçons et filles, plus d’une centaine de la cuvée du bac malien 2e partie de diverses disciplines, à faire le voyage en Europe en septembre 1971 qui, pour être ingénieur en quelque chose, qui pour être interprète, qui pour être vétérinaire et les autres pour être des docteurs en droit ou en lettres.

L’ambition était noble, peut-être même folle. Et par la même occasion, on oublia de mesurer la longueur du trajet de l’étude et d’estimer le volume des écueils. Le vieux Boeing 727 de la compagnie nationale Air Mali qui n’était pas encore morte, ne rassurait guère mais vu que c’était le seul moyen technique de transport aérien disponible, il fallait se résoudre à l’emprunter.

Dans des conditions atmosphériques plus que mauvaises, le vieil oiseau brinquebalant prit son envol et s’éleva dans les airs pour prendre la direction de l’Europe où il atterrit en terre phocéenne après 5 heures de vol avant de s’élancer vers Paris.

L’accueil, non à Roissy Charles de Gaulle qui n’était même pas encore en chantier, mais au Bourget fut plutôt dramatique en raison du froid de canard qui sévissait alors dans toute l’Europe et auquel ces jeunes bacheliers habillés en boubous légers n’étaient point préparés.

Fort heureusement, l’organisation continentale estudiantine, la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France (Feanf) à travers sa structure malienne, l’Association des étudiants et stagiaires maliens en France (AESMF), était présente à l’aéroport avec des habits chauds qu’on distribua à ces futurs cadres supposés et qui évitèrent à bon nombre d’entre eux une maladie due au froid, la pneumonie par exemple.

Tous furent dirigés sur Germain-en-Laye, en banlieue parisienne où se trouvait un foyer d’accueil et où une étudiante hollandaise très blonde aux yeux couleur bleu clair préposée à la réception apparut à certains comme Faro, la déesse du Niger. Il est vrai que se sachant au centre de l’admiration de ces jeunes sauvages, elle déambulait des hanches comme si elle était avertie du goût des Noirs en matière de canon de beauté féminine.

A Paris, l’Office de coopération et d’accueil universitaire (Ocau), dirigé par une vieille dame à la peau basanée par suite d’un long séjour dans diverses colonies françaises, se chargea de la répartition de la meute entre les différentes universités françaises et il eut lieu une lutte entre étudiants pour avoir une orientation dans les régions du Sud où le climat était jugé plus clément que celles du Nord au climat presque polaire.

A l’analyse des documents envoyés par le ministère de l’Education nationale adressés à l’Ocau, il s’avéra que certaines disciplines y mentionnées n’existaient pas dans l’organisation des universités françaises et des réajustements furent proposés et admis des deux côtés. La bourse malienne de 450 FF de l’époque d’ailleurs irrégulièrement payée permettait juste de joindre les deux bouts à côté de celle des Gabonais, des Ivoiriens, des Voltaïques et même des Nigériens qui allaient de 600 à 900 FF.

Au bout du compte, dans cette affaire il y eut peu de réussites à vrai dire. La bande ayant accumulé des tas de déchets sociaux et universitaires auxquels le gouvernement malien ne s’attendait pas certainement. Le retour au pays natal fut plus difficile pour bon nombre d’entre eux que le départ. A preuve, le nombre important d’ouvriers que la bande généra et qui se virent contraints de vivre éternellement en France.

Facoh Donki Diarra

Écrivain

Mali Tribune

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