Dakar, 20 octobre-Les enfants vivant dans les zones de conflit dans la région du Sahel central à travers le Mali, le Burkina Faso et le Niger sont confrontés à un plus grand risque de recrutement illégal par des groupes armés non étatiques[i] qui cherchent à attirer les jeunes après la fermeture de milliers d’écoles au cours des deux dernières années en raison de la violence croissante et de la COVID-19Un nouveau rapport commandé par Save the Children et publié par le Groupe d’Etudes et de Recherche sur les Migrations [ii] a révélé qu’un nombre croissant de facteurs, dans la région du Sahel central, poussaient les enfants vers les conflits à un rythme alarmant, notamment une nouvelle stratégie de recrutement délibérée et calculée par des groupes armés non étatiques, y compris des groupes extrémistes, dans les trois pays.
Des entretiens menés dans 23 localités avec des jeunes anciennement impliqués dans des groupes armés, des autorités locales et d’autres décideurs ont révélé que certains enfants étaient recrutés de force dans les conflits, d’autres étaient poussés par la pauvreté, tandis que d’autres encore ressentaient le besoin de remplir un devoir religieux ou d’assurer leur sécurité et leur protection.
Mais certains ont été attirés par les promesses de rémunération, de téléphones ou de motos faites par des groupes armés non étatiques.Il reste difficile de déterminer exactement combien d’enfants sont associés à des groupes armés, mais les chercheurs ont constaté que les enfants recrutés avaient abandonné l’école ou n’avaient pas accès à un système scolaire.
Certains enfants âgés de sept ans seulement ont été recrutés illégalement pour recueillir des renseignements sur les communautés locales pour les groupes armés non étatiques. Save the Children, qui est présent au Sahel depuis le début des années 1980, a prévenu que la survenance de situations encore plus désespérées pour les enfants de la région, aggravée par l’impact de la COVID-19, exposait les garçons et les filles à un risque accru d’être recrutés dans les conflits, ce qui constitue une grave violation des droits de l’enfant et du droit humanitaire international.
L’organisation a également exprimé son inquiétude quant à l’absence de réponse pour répondre aux besoins des enfants de la région, comme fixés lors d’une conférence ministérielle de financement[iii] il y a un an. Plus de 1,4 million de personnes sont toujours déplacées dans la région, dont plus de la moitié ont moins de 15 ans.Abdou*, 21 ans, a rejoint un groupe armé opérant au Burkina Faso alors qu’il était encore enfant :
«J’ai passé plus de 4 ans dans un groupe arme. J’ai connu ce groupe en allant écouter leurs prêches (…) Le fait de rester sans rien faire m’a poussé ainsi que d’autres jeunes à trouver une occupation et la seule disponible était de rejoindre un groupe, voilà pourquoi j’ai rejoint ce groupe (…) Au moment du recrutement, ce qui était important était d’avoir des gens motivés, des gens prêts à les suivre, … Il faut se dire que les candidats recherchés sont des enfants âgés de 15 à 25 ans» Au Niger, Mouhamadou*, 22 ans, a rejoint un groupe armé pendant trois ans après en avoir entendu parler par des amis. «Deux choses m’ont poussé à rejoindre le groupe armé. La première était le djihad pour la religion et la deuxième, ils ont dit qu’il y a un salaire par mois. On m’a promis qu’un jour je deviendrais fonctionnaire. »Des sanctions ont été imposées aux enfants pour des erreurs. Ils sont punis en cas de trahison ou s’ils font la moindre erreur. Les sanctions sont différentes en fonction de la nature de la faute. Si tu n’as pas fait beaucoup de fautes, on te prive de nourriture, on t’enferme dans un endroit où tu ne sais pas où tu es. On peut même être tué. « J’ai réalisé que ce n’était pas la vie que je voulais mener. C’est vrai qu’on gagne de l’argent dans le groupe, mais on ne sait pas quoi en faire. » Dans un nouveau document d’orientation publié aujourd’hui, Save the Children appelle les gouvernements de la région du Sahel central et la communauté internationale à s’engager à financer l’éducation dans les situations d’urgence, et à protéger les enfants contre toutes formes de recrutement. Cet appel intervient alors que la quatrième conférence internationale sur la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, se tiendra au Nigeria la semaine prochaine. Eric Hazard, Directeur des politiques panafricaines pour Save the Children, a déclaré :«La violence, la pauvreté et l’insécurité menacent la sécurité de millions d’enfants au Burkina Faso, au Mali et au Niger. Les enfants de la région sont confrontés à une grave crise de protection et doivent avoir accès à l’éducation. Sur les 200 millions de dollars nécessaires pour répondre à la crise de l’éducation au Sahel, seuls 11% ont été mobilisés à ce jour[iv], tandis que plus de 4 000 écoles sont actuellement fermées dans la région, en raison de l’insécurité, ce qui expose plus de 800 000 filles et garçons à un risque accru de recrutement[v]. «Avant la pandémie de COVID-19, huit millions d’enfants n’étaient pas scolarisés en raison de la violence et de l’insécurité. Plus longtemps ils seront déscolarisés, plus le risque de recrutement forcé ne fera qu’augmenter. Pour un enfant vivant dans une zone de conflit,l’école lui permet d’accéder à un espace sûr pour apprendre, se protéger de risques tels que le recrutement dans des groupes armés, et lui procure un sentiment crucial de retour à la normale et de calme.»
FIN *
Les noms figurant dans ce communiqué de presse ont été modifiés pour protéger l’identité des personnes interrogée
Source: Save the children