Les commerçants, encore les commerçants ! Il parait qu’ils veulent observer une grève à partir du 3 Mai prochain… Si observer une grève est un droit pour toute corporation, le recours à ce droit doit aussi se faire dans des conditions bien déterminées. En effet, on ne doit brandir la menace de faire recours à ce droit que lorsqu’il y a constat de rupture totale dans le dialogue entre les protagonistes.
Or pour le cas qui nous concerne, à savoir le commerce, il n’y a jamais eu rupture entre les différentes organisations de commerçants et le Ministère du Commerce. Mieux, tous les responsables des commerçants s’accordent à dire que leur ministre de tutelle est un homme qui a à cœur de faire tout ce qui est dans ses possibilités pour la performance du secteur et pour l’épanouissement des acteurs du commerce au Mali. Aussi, si l’unanimité est faite autour de l’engagement du ministre pour la promotion et la performance du secteur du commerce, s’il est aujourd’hui établi que celui-ci et son équipe sont sensibles aux problèmes posés par les commerçants et qu’ils œuvrent au quotidien pour leurs apporter des solutions qu’il faut, alors il y a lieu de se demander, et ce d’autant que le dialogue n’est jamais rompu avec les responsables de syndicats de commerçants, pour quel intérêt, ou pour l’intérêt de qui, veut-on pousser les choses à l’extrême au point d’afficher des velléités d’aller en grève ? Et pourquoi veulent-ils aller en grève ? Il semble qu’ils veulent y aller pour, comme cela a été consigné dans leur préavis de grève, exiger du gouvernement, la libéralisation et la facilitation de l’octroi de visas long séjour chinois aux commerçants maliens et de la diaspora ; la baisse des frais de dédouanement des marchandises ; la révision des textes sur l’élection du président de la Chambre de Commerce et d’Industrie ; l’arrêt de la concurrence déloyale des commerçants chinois et indiens ; la baisse du taux de 3% imposable à leurs affaires ; l’affectation des bâtiments administratifs aux déguerpis et autres commerçants du marché rose ; l’élaboration d’un cahier de charge avant la construction du marché rose…
Quand on essaye de disséquer ces doléances point par point, on se rend compte très vite qu’elles ne peuvent résister à une analyse sérieuse, et que leur satisfaction ne dépend pas du seul Ministère du Commerce ! Et pour cause !
Pour ce qui concerne l’octroi de visas long séjour chinois aux commerçants maliens et de la diaspora, nos acteurs du commerce ignorent, sinon feignent ignorer que cette question relève d’une question de souveraineté à l’appréciation des seules autorités chinoises. Autrement dit, autant la Chine ne peut tordre la main aux autorités maliennes pour qu’elles accordent le visa du Mali à qui que ce soit, autant le Mali ne peut exiger une telle demande aux autorités chinoises ! Mais dans l’entendement des commerçants, l’Ambassade de Chine ne saurait prétendre refuser quoi que ce soit aux autorités maliennes, ce qui est une lecture erronée des relations Etat-Etat, le respect de la souveraineté de chaque Etat étant, non pas le principe, mais l’essence mêmes de ces relations. Les commerçants veulent quoi encore ? La baisse des frais de dédouanement des marchandises et la baisse du taux de 3% imposable à leurs affaires…
En voici des revendications qui ne sont pas du ressort du ministre du Commerce, mais de celui en charge de l’Economie et des Finances. Mais même là, les responsables de commerçants peuvent le témoigner, les échanges entre les deux ministres continuent, mais le dernier mot, il faut que nos amis commerçants le comprennent, revient au ministre de l’Economie et des Finances. Pour ce qui est du point concernant la concurrence déloyale des commerçants chinois et indiens, là aussi, sauf à vouloir chercher des poux sur la tête du ministre, toutes les pistes pouvant amener nos commerçants à se mettre à l’abris de toute concurrence déloyale les ont été indiquées par le ministre lui-même. Il leur a proposé par exemple d’aller protéger leurs produits et labels auprès de l’Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle, organisme habilité à arbitrer et trancher en matière de concurrence déloyale. On n’apprend que certains l’ont fait, mais peu s’y est intéressé en fait. Autre difficulté dans ce registre que les commerçants n’ont pas dit, ce que nombre parmi eux-mêmes sont complices, sinon collaborateurs des chinois et autres qu’ils accusent aujourd’hui de concurrence déloyale !
En réalité, tout ce qui préoccupe aujourd’hui les commerçants maliens préoccupe, et le ministre, et les services du Ministère du Commerce au plus haut point, et ils s’y attellent tous les jours…
Mais les commerçants doivent comprendre que les choses ne se règlent comme cela du tic au tac, il y a des étapes à suivre, des démarches à faire, et surtout beaucoup de négociations dans les coulisses avec d’autres départements. Le plus important, c’est de pouvoir maintenir le contact et le dialogue. Contact et dialogue qui n’ont jamais manqué entre les services du Ministère du Commerce et les commerçants. Les derniers sont d’ailleurs les mieux placés pour le dire, et ils ne ratent d’ailleurs aucune occasion pour le faire savoir ! En fin de mot et de tous les maux, si les commerçants venaient à aller en grève, chose à laquelle nous réservons des doutes, leur ministre de tutelle étant un homme de compromis, mais pas de compromission… s’ils venaient à aller en grève disions-nous, ce sera alors pour punir les populations, et non pour résoudre les problèmes auxquels ils font face !
Adama S. DIALLO
Source: nouvel horizon