Malmené et affecté, autant par le cumul des impairs que par la maladresse d’un entourage en manque de doigté, IBK ne sait pas encore à quels saints se vouer. Dans sa tentative de reconquérir un soutien populaire qui lui file entre les doigts, il implore à tout-va et se jette à corps perdu dans les bras du tout-venant. Y compris d’un monde musulman tiraillé par ses contradictions internes, devant lequel il s’est soumis à un exercice de confession où les déballages le disputent à la mise à nu d’intentions à peine voilées.
Il y a de cela une semaine, jour pour jour, le président de la République s’est lui-même démené comme un beau diable en détresse pour accéder à la tribune du Haut Conseil Islamique en congrès. Depuis Dakar où il effectuait une visite d’Etat, il a ainsi sollicité et obtenu l’ajournement de quelque 48 h desdites assises afin de lui permettre de prendre à témoin les religieux du Mali sur le chagrin et les afflictions que lui infligent ses redoutables adversaires.
Comme il est loisible de le deviner, parmi tant de sujets dignes de complaintes, la principale préoccupation du président de la République se situent au niveau de ses connexions présumées avec le Corse Tomi Michel, d’après les révélations fracassantes du journal français Le Monde.
Face à la peur de chuter…
Face à l’alma-mater musulman malien et les nombreux convives étrangers du 2e congrès ordinaire du Hcim, Ibrahim Boubacar Keïta n’a pas manqué d’étaler l’énorme tort à lui causé par ce qu’il a présenté en langue vernaculaire comme un grossier colportage, ni plus ni moins. Il est inadmissible, a-t-il laissé entendre –allusion faite au bruit qui court sur ses collusions mafieuses- «qu’on rapporte sur mon compte de tels ragots, qu’on me prête des comportements incompatibles avec mes valeurs». Et, IBK de vomir son désarroi, les larmes perlant sur ses joues, comme pour implorer la compassion de l’auditoire le plus représentatif de son électorat, selon son propre raisonnement. «Avoir 77 % dans un pays à majorité musulman est la preuve que c’est à vous que je vous dois mon élection», a-t-il martelé au passage.
Mais, l’expression de gratitude, ici, est à peine dissociable d’une nouvelle sollicitation, voire d’un appel au secours, contre une soi-disant malveillance, dont il serait la cible.
IBK, qui n’a cure de présenter la laïcité comme redevable à une seule confession, a ouvertement déclaré qu’on ne réussira jamais à le faire chuter tant qu’il jouira du soutien indéfectible de la communauté musulmane. D’où vient cette peur bleue, de chuter, d’être renversé, après seulement sept mois de règne ? Allez savoir.
L’énigme est probablement cachée derrière les profondeurs de la sulfureuse affaire Tomi, si ébranlante qu’elle nécessite la mobilisation des ressources internes, domaine où la préférence du locataire de Koulouba semble aller plus au confessionnel qu’au politique. En dépit notamment du soutien massif d’une écrasante majorité de partis politiques, y compris sa propre famille politique à laquelle IBK a constamment dénié la paternité de son accession au pouvoir, à la différence des religieux.
Malencontreux lapsus
Non satisfait de cette politisation outrageuse et dangereuse de la religion -ou confessionnalisation de la politique- le président de la République a aussi poussé les dithyrambes et envolées lyriques jusqu’à verser dans certaines révélations incongrues et malencontreuses. Comme à ses habitudes -en tout cas, toutes les fois qu’il s’agit du gênant sujet de ses connexions avec Tomi- il choisit la victimisation et la contre-attaque d’adversaires virtuels qu’une démonstration convaincante de son innocence. C’est ainsi qu’il a osé indiquer, visiblement mal à propos, qu’il détient aussi des dossiers accablants susceptibles de faire fuir ses plus coriaces adversaires. De qui s’agit-il ? Mot n’a été pipé là-dessus, mais le mot est néanmoins lâché : le premier magistrat de la République est en possession d’informations compromettantes, visiblement, des documents en rapport avec des malversations impliquant d’influentes personnalités du microcosme politique malien.
Mais, le paradoxe et l’incohérence tiennent au fait qu’IBK, champion autoproclamé de la lutte contre la corruption, depuis son intronisation -qui ne cesse de claironner sa détermination à sonner le glas de l’impunité dans la croisade contre la mal gouvernance– s’adjuge ouvertement le droit de garder par-devers lui des dossiers normalement destinés aux tribunaux. Son attitude, en plus d’être assimilable à une entrave à la justice, annonce les couleurs d’un combat plutôt sélectif contre le fléau, voire un scénario, à partir duquel l’instrumentalisation de la justice et la chasse aux gênants adversaires pourraient largement l’emporter sur la réelle protection des deniers publics.
L’ancien président de l’Assemblée, locataire actuel de Koulouba, le sait d’ailleurs mieux que quiconque, lui qui, de guerre las face au spectre d’un scénario similaire, n’a voté en son temps la loi sur le Vérificateur général que «par loyauté» pendant qu’il était tenté de la rejeter «par dignité».
Abdrahmane Kéïta
La guerre des confréries affecte les musulmans
La nouvelle configuration du Haut conseil islamique provoque de plus en plus de controverses et de lever de boucliers dans les grin, au tour du kini et du thé, dans les bureaux et autres lieux de contact et d’affluence.
Les avis sont cependant partagés dans le champ politique et religieux. Personne ne comprend absolument rien de cette divergence, cette division entre guides religieux. Même les athées n’en croient pas à leurs oreilles quant aux crachats balancés dans un langage clair et distinct au non de l’Islam par des érudits de l’Islam. En somme, les mentors du Haut conseil islamique du Mali dépassent le seuil de la tolérance religieux.
Faut-il encore rappeler que les guerre ethniques et civiles, tribales et religieux gangrènent l’Afrique ?
L’exemple du Soudan est caractéristique avec l’opposition sanglante entre, d’une part musulmans du Nord et, d’autre part, chrétiens et animistes du Sud d’un pays scindé en deux.
La guerre déclenchée, ici au Mali, oppose, en dernière analyse, une fraction de musulmans de deux confréries. Elle n’est pas religieuse.
Il ne risque pas de se déclencher, pour le moment, une guerre religieuse si et seulement si le président de la République prend les devants et y met un terme. Ou bien, ce sera une dangereuse dérive confrérique. Exactement, de quoi s’agit-il ?
Tout le monde connaît les particularités de l’Islam malien et ce que Vincent Monteil vise comme «islam noir». Point n’est alors besoin d’insister outre mesure sur cet aspect de la question made in Mali.
D’après un grand érudit, le monde abrite environ trois cents confréries. En principe, dans sa signification profonde et authentique, la confrérie est un chemin pour accéder au Maître de l’Univers.
Il est de notoriété qu’il y a au moins au Mali de profondes divisions, de véritables antagonismes au sein même de certaines familles, confréries, très connus parce que portés sur la voie publique et au marché par les principaux concernés, les protagonistes et les antagoniques.
L’autre disait qu’il y a à Paris, dans les vielles archives de la Rue Oudinot, des lettres de dénonciations calomnieuses adressées au colon par des chefs de confréries jaloux de leur semblable éclairé. Il ne faut pas entrer dans les détails pour éviter de remuer le couteau dans la plaie.
Cependant, il faut reconnaître, pour la suite, que le président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar Kéïta, le mal nommé en tout pour le moment, dès son intronisation, a fait montre de musulman parfait pour amuser le «tout musulman». Il se trouve que le discours et la position des ténors des «tout musulman» s’inscrivent dans ce qu’on appelle, sans doute de manière triviale, escarmouches confrériques.
Maintenant, la question est de savoir à quel jeu jouent certains énergumènes qui ne mesurent même pas la portée de leurs faits et gestes.
Pourtant, les fondateurs des confréries furent, sans exception, des hommes de Dieu, de paix. Devant le Tout puissant aucune confrérie –si Dieu la cautionne – n’est au-dessus de l’autre. Les hommes sont nés libres et égaux. Dès lors, il faut savoir raison garder lorsque l’Islam est mis en avant dans quelque domaine que ce soit.
La dimension de l’Islam, du Créateur de l’Univers, de tout ce qui bouge ou qui est inerte, dépasse, à tous points de vue, le pouvoir d’un individu, d’un saint ou d’un prophète.
Mister NO
SOURCE: Le Témoin