(Agence Ecofin) – Le Zimbabwe est actuellement le seul pays africain à produire du lithium. Alors que la Namibie, la RDC, le Ghana ou le Mali s’apprêtent à le rejoindre, Harare explore déjà d’autres moyens pour mieux tirer profit de cette ressource.
A Harare le vendredi 16 septembre, le gouvernement du Zimbabwe a paraphé un protocole d’accord de 2,83 milliards de dollars avec les entreprises chinoises Eagle Canyon International Group et Pacific Goal Investment Ltd. Le partenariat tripartite porte sur la construction dans le pays d’Afrique australe d’un complexe industriel étendu sur 5 000 hectares destiné à transformer localement plusieurs métaux dont le lithium.
Selon les détails révélés par Bloomberg, 450 millions $ seront investis dans une usine de sels de lithium qui sera installée sur le site de Mapinga (Mashonaland Ouest), situé à 48 km d’Harare, afin d’alimenter directement les fabricants de batteries électriques. Prévue pour être achevée d’ici fin 2025, elle devrait être une première sur le continent.
Par ailleurs, les investisseurs chinois ont prévu une autre usine destinée à produire du sulfate de nickel pour un coût de 1 milliard $, ainsi qu’une fonderie d’alliage nickel-chrome pour 500 millions $. Pour alimenter cet immense complexe, deux centrales électriques de 300 MW seront construites, pour un coût unitaire de 250 millions $.
Selon Lionel Mhlanga, responsable de la société Eagle Canyon International Group Holding, l’ensemble de ces raffineries devrait générer, une fois en service, un chiffre d’affaires annuel de plus de 13 milliards $, tout en créant près de 5 000 emplois.
S’ils n’ont pas encore été évalués, notons que les revenus que l’Etat devrait tirer de ce projet gigantesque seront conséquents, aussi bien en matière d’impôts que de recettes d’exportation. Pour le vice-président du pays Constantino Chiwenga, ces investissements devraient notamment aider le gouvernement à atteindre son objectif de 12 milliards $ de revenus miniers annuels. En 2021, le pays a récolté 5,2 milliards $, contre 3,65 milliards $ l’année précédente.
« L’exploitation de nos ressources naturelles abondantes doit permettre à un plus grand nombre de nos concitoyens de sortir de la pauvreté et d’accéder à la prospérité », a souligné le chef de l’Etat Emmerson Mnangagwa
Des points d’ombre…
Alors que les critiques fusent très souvent sur l’incapacité des pays miniers africains à transformer localement les matières premières extraites de leur sous-sol, le partenariat annoncé vendredi dernier par le gouvernement zimbabwéen peut susciter de l’espoir. Il correspond en effet à une certaine volonté des dirigeants de ces pays de tirer profit de la transition énergétique pour lancer l’industrialisation massive de leur secteur minier.
L’enthousiasme observé du côté des dirigeants zimbabwéens n’empêche cependant pas de s’interroger sur plusieurs points d’ombre de cet accord. Les sociétés impliquées n’ont ainsi pas encore dévoilé comment elles comptent mobiliser la somme colossale nécessaire à la concrétisation de leurs différents projets dans le pays. Il faut remarquer que les deux sociétés basées à Hong Kong ne sont pas cotées en bourse.
Les modalités d’approvisionnement des futures usines sont également un mystère pour le moment même si le pays possède la seule mine de lithium actuellement en production sur le continent et prévoit de mettre en production deux nouveaux projets, toujours pilotés par des investisseurs chinois, dès l’année prochaine. Il faudra néanmoins trouver un accord avec les différentes compagnies actives sur ces projets pour qu’elles vendent tout ou partie de la production aux usines locales.
Enfin, les précédents projets annoncés dans le secteur minier par le régime actuel n’invitent pas à l’optimisme. On note ainsi peu de progrès concernant les mines de platine pour lesquelles d’importants investissements russes et chypriotes ont été annoncés ces dernières années.
Emiliano Tossou