Le principal, peut-être l’unique reproche fait à Idriss Déby Itno est de s’être incrusté trop longtemps au pouvoir. A l’instar de Paul Biya au Cameroun (35 ans) feux Félix Houphouët-Boigny de Côte d’Ivoire (33 ans) Mobutu Sese Seko du Zaïre (32 ans) Robert Mugabe du Zimbabwe (30 ans). Blaise Compaoré du Burkina Faso n’y sera resté que 27 ans.
Quant à Idriss Déby Itno, il était arrivé à la tête du Tchad par la voie des armes en décembre 1990, en chassant son ancien allié Hissène Habre, emprisonné à vie depuis 2017 au Sénégal pour » crime contre l’humanité « . Il l’a quitté, hier mardi 20 avril, (plus de 30 ans après) par la même voie des armes puisque décédé des suites de blessures par balles reçues alors qu’il combattait, le samedi précédent, aux côtés de ses troupes, contre les rebelles du Front pour l’Alternance et la Concorde au Tchad (FACT).
Sa prophétie s’est ainsi accomplie. Notre confère de RFI, Alain Fokka, rapporte, en effet, que le défunt président tchadien lui confiait, peu de temps avant de monter au front, qu’ » il n’était pas homme à mourir dans son lit « . Signifiant par là que c’est sur le champ de bataille, en défendant son pouvoir, qu’il périrait. Et c’est ce qui est arrivé ou presque.
L’incrustation de Déby au pouvoir n’était peut-être pas aussi volontaire que celles d’autres chefs d’Etat mentionnés plus hauts. Depuis son accession à l’indépendance en 1960, le Tchad est en proie à une instabilité chronique nourrie par des coups d’Etat, des assassinats, des insurrections armées. Dans ce contexte tourmenté, il n’était pas aisé pour Déby, qui n’avait pas les mains blanches, loin de là, de quitter son poste pour aller mener une vie paisible avec sa famille, quelque part en Europe ou à Abu Dhabi. Il pouvait être une cible pour des règlements de compte ou être poursuivi pour des crimes d’atteinte aux droits de l’homme. Au demeurant son nom a été maintes fois cité dans le retentissant procès de Hissène Habre dont il fut longtemps l’allié politique, le chef de guerre, le responsable de l’armée durant les huit années passées à la présidence tchadienne (1982-1990).
Chef de guerre, il le restera jusqu’au bout. Pour son propre compte.
Sa disparition tragique, alors que les rebelles prétendent avoir démantelé son état-major, infligé de lourdes pertes aux FAN, et n’être plus qu’à quelques encâblures de Ndjamena, pourrait précipiter le Tchad dans le chaos. La région du Sahel occidental, le Mali singulièrement, en seraient affectés eu égard au rôle majeur joué par les militaires tchadiens dans la lutte contre les groupes terroristes qui y sévissent.
Pas plus tard que le samedi 17 avril dernier, le 8è bataillon tchadien de la Force commune (FC) du G5 Sahel s’est illustré, aux côtés du bataillon du FAMA, dans la neutralisation d’au moins une quarantaine de terroristes et la destruction de leurs équipements.
Un haut fait d’armes, venu s’ajouter à de nombreux autres depuis bientôt une dizaine d’années, pour témoigner de ce que le Mali a perdu un ami, un allié, un partenaire de choc.
Source: l’Indépendant