Objectif atteint et même dépassé : réunis à Nouakchott (Mauritanie), les partenaires du G5 Sahel ont porté, le 6 décembre 2018, à 2,4 milliards d’euros leur aide pour la mise en œuvre d’une quarantaine de projets de développement destinés à endiguer les violences djihadistes dans cette vaste zone au sud du Sahara.
“Les partenaires du G5 Sahel ont fait des annonces de financement pour un montant total de 2,4 milliards d’euros, correspondant à 127 % de l’objectif de mobilisation initial”, a précisé l’organisation régionale dans un communiqué publié à l’issue d’une conférence des donateurs dans la capitale mauritanienne, après avoir évoqué dans un premier temps un montant d’aide de “près de 2 milliards d’euros”.
Ecoles, soins et accès à l’eau contre le djihadisme
“Ces engagements de nos partenaires couvrent largement les besoins globaux du programme d’investissement prioritaire”, s’est réjoui le président nigérien Mahamadou Issoufou, actuel président en exercice du G5 Sahel, qui réunit la Mauritanie, le Mali, le Tchad, Burkina Faso et le Niger.
Avant cette conférence, le G5 avait estimé à 1,9 milliard d’euros les fonds nécessaires pour financer son Programme d’Investissements prioritaires (PIP) pour la période 2019-2021, qui vise en particulier les régions frontalières où les djihadistes tirent parti des carences des Etats pour s’implanter.
En construisant des écoles, des centres de soins ou en offrant un accès à l’eau, les gouvernements espèrent fidéliser des populations déshéritées susceptibles sinon de céder aux sirènes djihadistes.
L’Union européenne et la France mettront le plus la main au portefeuille. L’UE a ajouté 122 millions d’euros “d’argent frais”, portant sa participation à 800 millions d’euros, selon le commissaire à la Coopération internationale et au Développement, Neven Mimica.
Paris, qui avait déjà engagé 280 millions d’euros, a également promis une rallonge de 220 millions.
De cette manière, la France (…) investira 500 millions au profit des priorités AFP
L’Arabie saoudite a également annoncé une aide de 100 millions de dollars pour le PIP et de 50 millions de dollars pour la force conjointe antidjihadiste du G5 Sahel.
Les cinq pays membres de l’organisation, parmi les plus pauvres du monde, avaient déjà annoncé qu’ils prendraient 13% des besoins à leur propre charge.
“La sécurité avait pris le dessus sur le développement au sein du G5 Sahel”, relevait récemment une source diplomatique française, en référence à la force conjointe, réactivée en 2017.
“Notre souhait, c’est d’asseoir vigoureusement le second pilier stratégique et décisif de notre action commune, le développement économique et social du G5 Sahel”, a souligné le président Issoufou le 6 décembre.
Dans un rapport publié la veille, Action contre la faim (ACF), Oxfam et Save The Children ont toutefois alerté sur les risques du “lien entre sécurité et développement”.
Selon ces trois ONG, “il est inquiétant de voir que la réponse se focalise sur le développement économique, sans prendre autant en compte les griefs légitimes de la population autour des problèmes de gouvernance, d’inégalités, de distribution des richesses et de justice de genre”.
Les groupes djihadistes, en grande partie chassés du nord du Mali par l’intervention militaire lancée par la France en 2013, ont depuis regagné du terrain, en particulier dans le centre du pays, et le phénomène s’étend au Burkina Faso et au Niger voisins, se mêlant souvent à des conflits intercommunautaires.
Trois priorités pour un développement d’urgence
Cette dégradation de la situation a conduit le G5 Sahel à réactiver son projet de force conjointe. En plus d’un an et demi, cette force a mené une dizaine d’opérations avec l’appui direct de l’opération française Barkhane, sans réel impact sur le terrain où elle n’a pas encore croisé le fer avec les djihadistes.
La pauvreté et les changements climatiques qui réduisent l’accès aux ressources naturelles alimentent aussi les tensions intercommunautaires. Les forces armées sont par ailleurs régulièrement accusées d’exactions.
Dans ce contexte, le G5 Sahel a défini un “programme de développement d’urgence” axé sur trois priorités: l’hydraulique, la gestion des conflits intercommunautaires et la sécurité intérieure.
L’accent est mis sur le nord du Burkina Faso, le centre du Mali, la région des Hodh en Mauritanie ainsi que celles de Tillabéri au Niger et Kanem au Tchad.
Jean-Yves Le Drian s’est rendu à 600 km au sud-est de Nouakchott pour visiter deux projets financés par l’Agence française de développement (AFD) qui s’inscrivent dans cette logique du G5 Sahel: une centrale solaire et thermique, inaugurée en avril, et un centre de santé maternelle.
Par www.francetvinfo.fr